Un samedi calamiteux

Le feu sur les Champs
(Photo AFP)

Après l’ouragan de violence qui s’est abattu samedi sur les Champs-Elysées, on aurait souhaité un sursaut national rassemblant les bonnes volontés. Il n’en a rien été. La politique ne perd jamais ses droits, surtout quand ça va mal.

ET MÊME très mal. Car l’analyse la plus superficielle a déjà été faite par des milliers de mes confrères : laxisme du gouvernement, stratégie anti-violence complètement erronée ; au terme d’on ne sait plus combien de samedis plus ou moins agités, le pouvoir a donné l’impression de n’avoir rien vu venir, alors que deux jours avant l’émeute, il savait que des blacks blocs venus de l’étranger sèmeraient le désordre. Au point que l’on  arrive à se demander si le président et ses ministres n’ont pas, à dessein, permis aux voyous de se déchaîner pour compromettre définitivement les gilets jaunes. On pouvait trouver ces arguments ce matin dans la presse et dans la bouche des ténors de l’opposition. Mais il ne s’agit en réalité que d’un aspect de cette crise sans précédent. D’abord, il est absurde de se jeter sur une idée de type complotiste et d’en faire une analyse politique : le gouvernement n’a aucun intérêt à ce que Paris soit mis à sac. Il sait parfaitement qu’il doit en rendre compte et que la poursuite des actes de violence est portée à son passif. Ensuite, il faut faire attention à ne pas mettre dans la balance des tomates et des carottes : qu’Emmanuel Macron ait passé deux ou trois jours aux sports d’hiver ne veut pas dire qu’il a quitté ses fonctions pendant ce laps de temps.

Le Sénat, tribunal de première instance.

Le Sénat a convoqué le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner et le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, pour qu’ils s’expliquent au sujet de ce terrible fiasco. C’est assez dire que ce qui compte, aux yeux de l’opposition, ce n’est pas le sort des commerçants et de leurs employés du quartier des Champs-Elysées, mais la bonne méthode pour affaiblir la République en marche avant les élections européennes. Bien entendu, les sénateurs, emmenés par Bruno Retailleau, veulent savoir comment les victimes seront indemnisés, du moins l’affirment-ils. Il y a quelque chose qui ressemble de très près à la perversité quand, au nom de l’indignation et de la protection des gens, on se met à juger non pas les criminels mais ceux qui font tout ce qu’ils peuvent, en tout cas, pour les arrêter. Décidément, il n’y a pas beaucoup à attendre de cette commission des Lois du Sénat, qui a conduit à son terme son examen de l’affaire Benalla et en remet une couche aujourd’hui à propos d’une forme d’insurrection qui menace non seulement le gouvernement, mais aussi le Sénat, car ces bandits invétérés, qui tirent profit du fonctionnement démocratique de nos institutions, n’ont qu’une hâte, celle d’en finir avec le régime, pouvoir et opposition inclus.

Le gouvernement écartelé.

Personne n’a vraiment envie d’excuser le président, le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur, mais tout de même. Le 16 mars a été précédé par de nombreuses polémiques sur l’usage de la force par les policiers et les gendarmes. Au moment où une loi anti-casseurs était en cours d’adoption, la gauche a dénoncé l’usage de certaines armes dans la répression des émeutiers ;  Jacques Toubon, Défenseur des Droits de l’Homme, a dénoncé le recours aux LBD ou lanceurs de balles de défense qui ont éborgné des manifestants dans au moins deux cas ; et à l’ONU, Michelle Bachelet, présidente de la commission des  Droits de l’Homme aux Nations unies, a mis la France dans le même sac que diverses dictatures à cause du traitement qu’elle inflige aux émeutiers. Le gouvernement, me semble-t-il, a pris compte de ces divers commentaires et a réduit de quelques degrés la riposte policière. Il l’a à peine fait que le voilà de nouveau traduit devant ces nouveaux tribunaux que sont les partis d’opposition. M. Macron devrait offrir son siège à M. Wauquiez, à M. Larcher ou à M. Retailleau, avec une seule condition : qu’ils ramènent l’ordre en 48 heures et qu’ils jettent en prison tous les black blocs et tous les manifestants qui se tordent de rire en pillant les vitrines enfoncées. Et qu’ils se coltinent les déclarations assassines de MM. Rufin, Mélenchon et Corbière.

L’opposition a trouvé le coupable.

La mise à sac des Champ-Elysées, le 16 mars, est un acte indigne de plus, dans une litanie d’agressions gratuites, conduits par des personnes dont la bêtise n’a d’égale que la prétention. Mais le plus indigne, c’est le jugement facile, prévisible depuis toujours, totalement inévitable que prononcent les chefs de file des oppositions, ceux qui, n’ayant rien à faire, ont tout le temps de porter la critique. Quelqu’un dans la mêlée, a demandé que tous les partis, sans exception, dénoncent une bonne fois pour toutes cette malédiction que sont les gilets jaunes, qui ne cachent même pas leur volonté de détruire la République, comme l’a fait encore une fois Eric Drouet, qui veut « bloquer les ports et les raffineries ». La droite, l’extrême droite, la gauche et l’extrême gauche ont toutes répondu unanimement à cet appel pour l’unité. Elles ont trouvé le coupable, le criminel qui a commis ces exactions : mais bien sûr, c’est le pouvoir !

RICHARD LISCIA

 

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4 réponses à Un samedi calamiteux

  1. JOLY dit :

    Ouf quand même ! merci d’être là, de votre analyse et commentaires

  2. D.S. dit :

    Ces manifestations violentes semblent exprimer le malheur des Français. Alors pourquoi tant de candidats à l’immigration? Les commentaires du forum du Quotidien du médecin semblent exprimer le malheur des médecins Français. Alors pourquoi tant de candidats au PACES? Les Français et ses médecins auraient ils besoin d’une bonne guerre pour être heureux?

  3. Coulomb dit :

    Très belle analyse. Il est bon de voir que tous les journalistes sont uniquement poussés par la surenchère et la course à la dramatisation pour faire le buzz. Un peu de réflexion fait plaisir. En ce qui concerne les chefs des oppositions, quelle tristesse. Pauvre démocratie française, qu’es-tu devenue avec ces politiciens ?

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