Macron dans la bataille

Macron à un sommet européen
(Photo AFP)

Dans un entretien avec une quarantaine de journaux régionaux, le président de la République souligne l’importance des élections européennes du 26 mai et insiste sur le danger que ferait courir une victoire du Rassemblement national à la société française.

EMMANUEL MACRON n’a pris de gants ni pour expliquer son irruption contestée dans la campagne ni pour ce qui concerne une élection qu’il considère comme « la plus importante depuis 1979 parce que l’Union est face à un risque existentiel. Si, en tant que chef de l’État, je laisse se disloquer l’Europe qui a construit la paix et apporté de la prospérité, j’aurai une responsabilité devant l’histoire ». Son analyse est donc cohérente avec  la gravité de la crise sociale et politique en France et, pour justifier sa présence dans la campagne, il en a souligné le caractère exceptionnel. M. Macron propose notamment « une convention fondatrice européenne après les élections » comprenant des élus et de simples citoyens et susceptible de changer le contenu des traités. Il a même envisagé la taxation du kérosène en Europe.  Il veut créer un parti centriste au Parlement de Strasbourg, avec le concours du Premier ministre portugais et avec l’Italien Matteo Renzi.

Tout dépend du score.

Il est logique de jeter sur ses propositions un regard sceptique, non seulement parce qu’un parti centriste européen apparaîtrait comme le rival du PPE, auquel les Allemands sont attachés, mais parce que la force d’entraînement que M. Macron pourrait acquérir dépend étroitement du score de la République en marche dimanche prochain. Ce qui n’empêche pas le président de se présenter comme le moteur de l’Union. Il a balayé en quelques mots les conséquences d’une victoire probable, en tout cas possible, du Rassemblement national et refuse même d’envisager le départ de son Premier ministre, Édouard Philippe. Dans un sens, il est fidèle à lui-même dès lors qu’il n’affronte le danger politique qu’en augmentant sa part de risque tant il croit, non sans raison, que, en dehors de la majorité, il n’y a pas en France une formation politique capable (et soucieuse) de réformer l’Union de telle manière qu’elle survive à la vague de populisme qui la menace.

Un projet cohérent.

Sans faire allusion à Marine Le Pen, il lui a donc répondu sur quelques points essentiels, à savoir que, si la REM arrive en second, il poursuivra son action et ne changera même pas de gouvernement, qu’il conduit la bataille sans se demander s’il va perdre ou l’emporter, qu’il n’est jamais obligé de céder aux critiques, invectives et menaces dont il fait l’objet et que son propre projet européen, même s’il semble un peu ambitieux pour les moyens de persuasion dont il dispose, est le plus cohérent, le plus réaliste, le plus nécessaire de tous les projets qui ont été présentés au cours de la campagne. On trouve sa résilience dans au moins deux aspects de ce scrutin : si le choix de la tête de liste de la REM, Nathalie Loiseau n’est pas le plus heureux, il s’en contente et lui apporte un soutien sans failles ; si l’Allemagne, qui, aujourd’hui, a peur de son ombre, rejette la refondation de l’Union, les faits politiques tels qu’ils vont se succéder obligeront Angela Merkel tôt ou tard à accepter quelques réformes.

Cette vision contient une bonne dose d’optimisme, mais quand tout va mal, on a besoin d’y croire. La description apocalyptique que les nationalistes font de l’Europe actuelle est tellement boursouflée qu’il faut bien quelqu’un pour riposter et ce n’est ni M. Bellamy ni M. Glucksmann. Il y a de la force dans la position de Macron et il a une sorte de témérité plaisante parce que lui, au moins, n’a pas peur du danger. C’est un virtuose de la partition constitutionnelle, il se sait protégé par les institutions et, même si les gilets jaunes ne désarment pas, ils ne peuvent pas dire qu’ils ont eu la peau de Macron. Il n’a pas encore gagné la partie, mais il survit.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Macron dans la bataille

  1. Sphynge dit :

    Le sens de l’Histoire semblerait être aujourd’hui à suppression de l’Union européenne et à la fondation d’une association des pays fondée sur des bases démocratiques avec un contrôle effectif des parlementaires et des dirigeants. M. Macron ne s’attarderait-il pas dans le XX ème siècle ?
    D’autre part, les historiens sont de plus en plus nombreux à affirmer que ce n’est pas l’UE qui est responsable de la paix en Europe mais que c’est l’inverse : la paix et la force nucléaire de frappe française ont permis l’UE.
    Réponse
    J’ai un autre sens de l’Histoire et il est humaniste. La force de frappe n’est pour rien dans la paix. Sans force de frappe française, y aurait-il eu la guerre ? Théorie absurde. La paix résulte de la volonté des Européens de cesser de se battre et de s’unir entre égaux.
    R.L.

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