LR : descente aux enfers

Xavier Bertrand
(Photo AFP)

Déchiré, inquiet, affaibli à la fois en nombre de militants et en notoriété, le parti les Républicains est plongé dans une descente aux enfers d’où il ne réémergera qu’avec beaucoup de temps, de patience et de réflexion.

LES RÉPUBLICAINS paient d’abord l’erreur stratégique de Laurent Wauquiez qui a cru reprendre des suffrages à la majorité en adoptant une ligne politique proche de celle du Rassemblement national et en attaquant avec virulence -et souvent avec injustice- la majorité. Or il y a dans l’opinion une demande de réformes, celles-là même que la droite au pouvoir n’a pas su réaliser et qu’elle n’a même pas tenté de proposer dans son nouveau programme. Le Premier ministre, Édouard Philippe, n’a pas manqué de bon sens quand il a décrit LR comme « la droite Trocadéro ». Il faisait allusion à ce dimanche funeste où LR a intronisé Français Fillon comme son candidat à la présidence de la République en 2017, alors qu’il avait déjà un lourd contentieux avec la justice au sujet d’une affaire d’enrichissement personnel. L’homme qui s’était écrié, faisant référence à Nicolas Sarkozy : « Peut-on imaginer un président mis en examen ? », s’était lui-même perdu dans les sables des combines, sans pour autant faire le vide autour de lui.

Sur les rives du Styx.

Libre comme l’air, puissant dans sa région, bardé de diplômes impressionnants, Laurent Wauquiez pouvait imprimer à son parti une dynamique d’ouverture capable de rassembler la droite et le centre et de rallier à LR la majorité silencieuse, celle qui vote, ne dit rien mais n’en pense pas moins. Il a préféré livrer l’estocade à Emmanuel Macron alors qu’une forte fraction de l’opinion est favorable aux réformes, sous le prétexte qu’il n’était ni bon ni utile de lancer l’offensive contre le Rassemblement national, lequel n’est pas soutenu que par des électeurs de droite. Cela dit, même si M. Wauquiez a hésité, il a fini, une semaine après le scrutin européen, par démissionner de ses fonctions de président du parti.  Sans doute espère-t-il se refaire une stature avant l’élection présidentielle de 2022. Sans doute a-t-il assumé sa responsabilité de l’échec de LR aux élections européennes. Mais assumer, cela ne va pas loin et ne coûte pas cher. M. Fillon avait dit exactement la même chose quand, non qualifié pour le second tour de la présidentielle de 2017, il avait souligné ses propres responsabilités et lancé ses amis sur les rives du Styx avec bien peu d’espoir de retour.

Une politique à courte vue.

M. Wauquiez étant pour le moment hors service, la reconstruction de LR semble beaucoup plus compliquée qu’il n’y paraissait. Voilà un parti qui a perdu les deux tiers de ses cotisants. Un parti qui imite le RN quand le RN met de l’eau dans son vin et se montre extrêmement prudent au sujet de l’Europe et des progrès sociétaux. On ne sait pas trop de quoi est fait le programme de Mme Le Pen, sinon qu’il est à géométrie variable, de sorte que LR, parti dont les prises de positions sont également confuses, au point que ses élus votent contre des réformes que naguère ils soutenaient ardemment, n’offre pour le moment à l’électorat qu’une soupe à la saveur saumâtre où se mêlent des ingrédients d’autoritarisme parfumés à l’opportunisme. Étant pour tout et pour rien à la fois, M. Wauquiez a fini par convaincre la droite qu’il n’est vraiment ferme et définitif sur aucun sujet.

Une élection en deux tours.

Que, dans ces conditions, la République en marche bénéficie des confusions idéologiques et des allers-retours politiques, comment s’en étonner ? Qu’elle trouve à droite un vivier de talents, où est la surprise ? Que, du coup, elle apparaisse davantage comme le parti qui remplace la droite plutôt que celui du « en même temps », quoi de plus naturel ? Nombreux sont ceux qui désirent occuper la place de Wauquiez, mais pas toujours en le faisant savoir. Les candidats naturels ne manquent pas à commencer par les présidents de région que sont Valérie Pécresse et Xavier Bertrand, deux personnalités qui cultivent la nuance, c’est-à-dire qu’elles atténuent leur engagement à droite par des préoccupations compassionnelles. Gérard Larcher, président du Sénat, a prévu une élection à deux tours en octobre du prochain président LR. On lui souhaite beaucoup de courage car on n’a pas l’impression que de la mêlée gluante où sont empêtrés les chefs de file sortira le génie qui reconstruira le parti.

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Une réponse à LR : descente aux enfers

  1. JULIEN dit :

    Laurent Wauqiez a choisi de droitiser la position du LR, à un moment où cela lui paraissait logique, pris entre le RN sur sa droite et les centristes sur sa gauche. Il a du penser qu’il avait sa place entre les deux. La suite a montré que son calcul n’était pas le bon. puisqu’il a perdu sur les deux tableaux ; il n’a pas pu concurrencer le RN et les centristes sont partis. Les perdants ont toujours tort.
    Réponse
    Certains ne sont pas privés de lui dire qu’il avait tort. Il n’a écouté personne.
    R.L.

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