La fabrique du chômage

Il y a déjà sept ans, une manifestation
(Photo AFP)

La décision de la direction de Conforama de fermer 32 magasins en France et de supprimer 1 900 postes de travail confirme que le secteur de la distribution est en difficulté et que d’autres entreprises commerciales risquent, elles aussi, de licencier.

RIEN n’y a fait : en avril, la direction de Conforama avait annoncé un plan de refinancement de 316 millions d’euros et, quelques mois plus tôt, elle avait vendu sa participation à Showroomprivé, numéro deux du déstockage en ligne, pour 78 millions. Les syndicats pensaient donc qu’un plan social pouvait être évité. Ils en sont pour leurs frais. Les difficultés de Conforama sont attribuées à celles de la maison-mère, le groupe sud-africain Steinhoff, qui a une dette de six milliards de dollars. Mais cette explication est trop simple. Il semble en effet que Conforama n’ait pas prévu les changements intervenus depuis vingt ans dans l’offre commerciale et la concurrence des sites en ligne. À une crise nationale, une solution française aurait donc pu être trouvée si la direction avait anticipé ces changements et préparé son adaptation depuis longtemps.

La mondialisation se poursuit.

Le bilan, aujourd’hui, est sinistre et met sur le carreau des salariés qui ont passé quelque vingt ou trente ans dans l’entreprise, et auront donc beaucoup de difficultés à se recaser ailleurs. Mille neuf cent licenciements, sur un total de 9 000, cela représente plus de 20 % du nombre total de salariés. Le problème de Conforama montre que notre pays, dont la croissance n’est pas nulle et qui fournit des efforts notables pour se moderniser, reste encore vulnérable à la mondialisation et n’a pas fini de fermer des usines, et maintenant, des géants de la distribution, puisque d’autres grandes entreprises commerciales, comme Casino, souffrent d’un endettement excessif qui menace  leur existence. Le gouvernement, qui a livré bataille contre General Electric parce qu’il n’a pas tenu ses promesses concernant la survie d’Alstom, est harcelé par les sinistres annonces de plans sociaux qui ne concernent pas que nos anciennes et vénérables industries.

Accepter la compétition.

Il faut considérer qu’il existe deux grands éléments dans la dérive qui conduit à des fermetures d’usines et des plans de licenciement. Le premier élément est indiscutablement la mondialisation et sa concurrence sauvage qui mine nos entreprises parce que le coût de la main d’œuvre est plus élevé chez nous que dans les pays émergents. Le second est l’état d’esprit national, plein de la nostalgie des trois décennies qui ont suivi la guerre et ne nous a pas préparés à accepter la compétition avec des pays qui réclamaient leur part du gâteau. Les auteurs optimistes nous décrivent les bienfaits de la mondialisation qui a réduit la famine dans  le monde dans des proportions considérables et a permis à l’Asie de sortir du sous-développement, tandis que l’Afrique, à son tour, suit le mouvement, mais d’une manière inégale. La prospérité des émergents s’est faite sur le dos des pays déjà industrialisés mais rien au monde n’aurait pu étouffer leur aspiration. Il est évident que nos salariés privés d’emploi rejettent la concurrence étrangère, se méfient des capitalistes qui viennent investir chez nous, parfois pour délocaliser une usine, parfois parce qu’ils rencontrent beaucoup d’obstacles lorsqu’ils tentent de rendre rentables nos industries ou nos commerces.

L’adaptation à la mondialisation n’est donc pas une mince affaire et l’inquiétude que nous avons vient de ce que la crise de la transition n’est pas terminée, que nous aurons encore des surprises désagréables et que, dans l’univers concurrentiel où nous vivons, les entreprises françaises doivent rester sur le pied de guerre.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à La fabrique du chômage

  1. Michel de Guibert dit :

    Pendant ce temps Amazon se porte bien… pas vraiment un pays émergent !

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