Boris et le Brexit

Boris Johnson
(Photo AFP)

L’élection, avec 66 % des suffrages du parti conservateur, de Boris Johnson lui permet de remplacer Theresa May au poste de Premier ministre. Ce n’est une surprise pour personne. En revanche, l’accueil chaleureux des chefs d’État et de gouvernement, dont Emmanuel Macron, et d’Ursula Von Der Leyden, nouvelle présidente de la Commission européenne, pourrait améliorer les chances d’accord entre la Grande-Bretagne et l’Union sur le Brexit.

LES DIRIGEANTS européens n’ont pas voulu insulter l’avenir. Ils ne sont guère enthousiastes à l’idée de s’adresser à cet interlocuteur turbulent et imprévisible.  Mais ils n’ont pas le choix : aussi confuses, chaotiques et périlleuses qu’ont été les délibérations à la Chambre des Communes, tout ce qui s’y est passé a respecté les exigences de la démocratie. Les Européens ne pouvaient imposer aux Britanniques le choix de leur chef de gouvernement. Dans ces conditions, mieux valait faire bonne figure. Mais Boris Johnson, qui ne s’est pas senti obligé d’introduire un peu de prudence dans son action diplomatique, a affirmé, dès son élection, que, quoi qu’il en coûte, le Brexit aurait lieu au plus tard le 31 octobre de cette année. Trois mois après trois ans de palabres.

Le risque de l’absence d’accord.

Ce qui est une façon de dire qu’il s’agira d’un Brexit dur, peut-être sans accord et qui produira de multiples effets négatifs sur le commerce et les économies britannique et européenne. La plupart des observateurs expriment leur scepticisme quant à cette éventualité et voient un Boris Johnson plus fin et plus complexe que Donald Trump, la comparaison entre les deux hommes leur étant insupportable. M. Johnson s’est  présenté souvent comme un clown cherchant à amuser la galerie, ce qui n’enlève rien à son passage à Eton, ni à sa culture. En revanche, il est clair qu’il a mis le Brexit au service de sa carrière personnelle et que, après un processus d’une longueur interminable, il pense qu’il vaut mieux calmer les enragés de la rupture, quitte à en faire les frais, que de gouverner dans la lave brûlante du volcan. Il faut donc qu’il montre à ceux qui l’ont soutenu qu’ils ont fait le bon choix et que, s’il a perdu beaucoup de temps dans des comportements simiesques, il est surtout un homme fort, donc qui n’hésite pas à sauter dans l’inconnu.

Le mensonge en politique.

De ce point de vue, il a déjà donné  l’exemple de sa témérité, n’hésitant pas à mentir de manière grotesque sur les faits, notamment quand il a annoncé, en même temps qu’un parti d’extrême droite, l’UKIP, alors dirigé par Nigel Farage, que la rupture avec l’Europe allait faire gagner des fortunes au Royaume-Uni. Ensuite, il a apporté la preuve que le mensonge ne tue pas électoralement, puisque le voilà Premier ministre, probablement le pire que la Grande-Bretagne ait jamais eu. La simple vérité est donc que Boris Johnson ne va pas s’assagir au pouvoir et que, s’il veut tenir parole, il devra ignorer les engagements de son pays, notamment financiers, vis-à-vis de l’Union, et qu’il mangera son pain blanc le jour où il annoncera à son peuple que le Royaume-Uni prend le large, mais sans bagages et dans une mer démontée.

Il en effet très difficile de croire que M. Johnson changera au contact du pouvoir, d’autant que sa méthode, qui mêle l’amuseur public et le démagogue peu soucieux des canons de l’éthique, lui vaut aujourd’hui d’être à la tête du pays. De la même manière, il dira qu’il a été élu pour le Brexit et qu’il doit le parachever. Après, peut-être sera-t-il plus raisonnable. Mais il sera trop tard.

RICHARD LISCIA

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4 réponses à Boris et le Brexit

  1. Alan dit :

    Je vous trouve un peu sévère de dire « le voilà Premier ministre, probablement le pire que la Grande-Bretagne ait jamais eu », d’autant qu’il n’a pas encore commencé son mandat. Il a certes un côté excentrique et provocateur (à l’anglaise), mais c’est un homme d’une grande intelligence et culture, très différent à mon avis de Trump.
    L’homme que Boris Johnson admire le plus, et à qui il a consacré une très belle biographie, est Winston Churchill, soyons donc patients. Même hors de l’Europe la Grande Bretagne est un pays ami, et gageons que Boris Johnson saura agir pour le bien de son pays, ce qui ne nous nuira pas forcément.

    Réponse
    Patients, il me semble que nous l’avons été. L’intelligence et la culture, que je n’ai jamais niées à M. Johnson, n’enlèvent rien à sa malhonnêteté. Il est menteur et démagogue, il me semble que ça fait beaucoup, surtout pour une grande nation.Enfin, s’il eu raison de consacrer un livre à Churchill, il n’en est que le très lointain reflet.
    R. L.

  2. phban dit :

    Ce qui me surprend à propos du Brexit, c’est qu’à ma connaissance, aucun commentateur non britannique ne s’interroge sur une éventuelle responsabilité de l’Europe dans ce choix du peuple anglais ? Peut-être qu’un peu moins de dogmatisme, de rigidité administrative et de mépris des citoyens aurait pu éviter cette malheureuse rupture ?
    Concernant Boris Johnson, il me semble que vous allez vite en besogne, le qualifiant de « pire premier ministre ». Sa gestion de la mairie de Londres n’a pas été si calamiteuse et, après tout, dans son engagement en faveur du Brexit, il ne fait que satisfaire à la volonté de la majorité. Attendons donc de le juger sur ses actes.

    Réponse
    Je maintiens qu’il sera le pire des Premiers ministres britanniques car cet homme n’a aucun scrupule. En outre, il est clair que la majorité de 2016 n’existe plus et qu’un référendum est une menace grave pour la démocratie.Le juger sur les actes ? Mais vous ne m’avez pas lu : il a menti sur le Brexit, il a annoncé un enrichissement de la Grande Bretagne. Certes, on sait comment il va faire : il refusera de payer les engagements à hauteur de 50 milliards d’euros pris par les précédents gouvernements britanniques. Loin d’avoir du mépris pour qui que ce soit, accusation parfaitement ridicule, je suis sincèrement désolé de voir ce que devient le Royaume Uni après ce qu’il a été. Rendez vous au 31 octobre. J’espère que vous aurez le courage de reconnaître votre erreur de jugement.
    R.L.

    • phban dit :

      Le « mépris » ne vous était nullement imputé, désolé, je pensais aux technocrates et décideurs européens. Et je suis tout prêt à reconnaître m’être trompé, d’autant que je n’accorde nul blanc-seing au fantasque BoJo, mais simplement le bénéfice du doute.
      « Wait and see » comme on dit outre-Manche.

  3. Rigon Jean-Luc dit :

    Tout cela (le Brexit) confirme ce que tout le monde savait depuis l’origine (y compris les Anglais): la Grande Bretagne est un corps étranger en Europe.
    C’est une nation qui a refusé la monnaie unique, les idéaux sociaux-démocrates et prôné une mondialisation ultra-libérale.
    Souhaitons lui bon vent et construisons enfin une Europe des citoyens et non pas des banquiers ultra-libéraux.

    Réponse
    Les Britanniques resteront attachés à l’Europe pour la sécurité et la défense. Leur coopération dans ces deux domaines reste exemplaire.
    R.L.

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