Europe : sombre contexte

Un couple fragilisé
(Photo AFP)

Angela Merkel et Emmanuel Macron se rencontrent aujourd’hui à Toulouse pour préparer le prochain sommet européen. Leur objectif est d’aplanir les différences franco-allemandes avant de commencer à s’attaquer aux crises dont souffre l’Union européenne.

LE PRÉSIDENT de la République n’a pas aimé du tout que sa candidate au poste de commissaire européen, Sylvie Goulard, ait été récusée par le vote de deux commissions d’eurodéputés. Il n’a pas hésité à accuser Manfred Weber, député européen, d’avoir mené la cabale contre Mme Goulard. Il est d’autant plus furieux qu’il a beaucoup de mal à proposer un candidat français alternatif. Ce n’est certes pas la première fois que la France et l’Allemagne se querellent. Mais, cette fois, elles ont besoin plus que jamais de s’entendre. La crise déclenchée par le Brexit, qui semble s’apaiser à la dernière minute (un accord serait possible avant le 31 octobre, date fixée par Boris Johnson, le Premier ministre britannique), l’offensive lancée par la Turquie contre les Kurdes de Syrie et le risque d’une recrudescence du terrorisme au Proche-Orient et en Europe, le démantèlement par Donald Trump, des accords commerciaux entre les États-Unis et le Chine et entre l’Europe et les États-Unis, le contexte est sombre. D’autant que les remèdes envisagés dans tous ces chapitres ne sont pas à la hauteur des maux.

Quelques différends.

La chancelière et le président sont des dirigeants assez fins et subtils pour ne pas aggraver le scepticisme européen par un conflit diplomatique entre la France et l’Allemagne qui priverait l’Union d’un leadership stable et éprouvé. Mais le vote qui a évincé Sylvie Goulard a surpris et choqué M. Macron qui ne supporte guère que le « nouveau monde », celui dont il a été le premier à annoncer l’avènement, se retourne contre son inventeur. Dans cette affaire, il appartient à Mme Merkel d’apaiser le chef de l’État français, étant entendu que, de toute façon, le nouveau commissaire européen qui prendra le relais de Mme Goulard sera français. Mais les différends franco-allemands s’étendent à des sujets encore plus graves. Par exemple, la politique dite accommodante de la Banque centrale européenne qui continue à jouer sur la baisse des taux, ce qui irrite énormément les épargnants allemands et inquiète les économistes. Il sera en outre très difficile de trouver autre chose que des points communs de principe entre Paris et Berlin au sujet de la Turquie, très bonne cliente des armements allemands. Enfin la guerre commerciale que Trump mène contre l’Union européenne ne peut entraîner que des représailles du même genre, ce qui ne convient pas forcément à l’Allemagne.

Un paysage brumeux.

Emmanuel Macron n’est jamais autant à l’aise que lorsqu’il doit affronter une crise. Il est donc moins déçu par les revers européens que désireux de les traiter. Il pousse au rassemblement des bonnes volontés en espérant démontrer aussi vite que possible que l’Union a les moyens de se faire respecter et de déjouer les projets américains, turcs ou russes. Dans un paysage brumeux et inquiétant, on ne peut que lui souhaiter beaucoup de courage. Il en a, mais manifestement il est aussi impopulaire dans certains milieux européens qu’il l’est en France. Cela est dû à un fait simple : il ne peut exprimer son activisme qu’en se référant à sa propre autorité. Le Parlement européen, fier de ses prérogatives, n’a aucune envie de lui faire allégeance. Enfin, la conduite des affaires européennes soulève de vives protestations. Un exemple : l’immigration, que les pays de l’ouest de l’Europe veulent encadrer mais dont les pays de l’est ne veulent même pas entendre parler.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Europe : sombre contexte

  1. Vultaggio-Lucas dit :

    « Mais le vote [du parlement européen] qui a évincé Sylvie Goulard a surpris et choqué M. Macron qui ne supporte guère que le « nouveau monde », celui dont il a été le premier à annoncer l’avènement, se retourne contre son inventeur. » nous dites-vous. A part que M. Macron semble ne supporter guère aucune contrariété, « le nouveau monde » dont il aurait annoncé l’avènement, ressemble à s’y méprendre à l’ancien quant aux « entorses » faites aux lois de la République française et aux suppressions d’acquis sociaux qui ressemblent à s’y méprendre à celles déjà effectuées dans nombre d’États de l’UE depuis les années 80. Les dernières élections européennes et les alliances politiques qui suivent, n’ont pas révélé de grande nouveauté si ce n’est la présence de députés du Royaume Uni prêts à partir à l’anglaise. Les 21 députés européens REM sur les 108 composant le groupe Renew Europe (anciennement groupe centriste ALDE rebaptisé à la demande de M. Macron) ne sont que le troisième groupe sur huit au sein du Parlement européen qui compte 751 députés. Il est donc difficile d’un point de vue arithmétique, d’admettre que « le nouveau monde inventé » par Macron et représenté par 21 députés REM, puisse s’être retourné contre lui au Parlement européen.

    Réponse
    Vous faites, une fois de plus, comme si je n’avais paS été explicite. M. Macron a discuté avec Mme Von der Leyen d’une possible candidature de Mme Goulard. Elle s’est montrée enthousiaste et a balayé les démêlés judiciaires de Mme Goulard. C’est pourquoi Macron a insisté auprès de Mme Goulard pour qu’elle soit candidate. Déjà, un accord entre États avait été conclu pour que ce poste spécifique de commissaire européen (marché intérieur) fût confié à un Français. Que Renew fut minoritaire n’entre pas en ligne de compte. Les nostalgiques des spitzenkandidat se sont vengés en refusant de céder à Mme Von der Leyen. Voilà ce qui s’est passé. Si vous m’aviez lu, vous n’aurez pas invoqué l’argument majorité-minorité.
    R.L.

    • Vultaggio-Lucas dit :

      Je ne fais pas « comme si » et ne prends aucun plaisir déviant à commenter vos écrits et une phrase en particulier dans cet article. Pour certaines raisons disons nord africaines, j’ai du respect pour vous, ce qui n’empêche pas nos désaccords. Je suis surpris que l’accord entre États puisse être suffisant alors que le vote du Parlement européen semble bien être requis pour la nomination d’un commissaire européen. Je ne sais pas encore qui sont ces « spitzenkandidat »…

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