OTAN : le pugilat

Trump fatigué par le décalage horaire
(Photo AFP)

Le 27ème sommet de l’Organisation du traité Atlantique nord se réunit à Londres cet après-midi et demain dans un climat de tension sans précédent. Les propos du président Macron sur « l’OTAN en état de mort cérébrale », les différends commerciaux entre l’Europe et les États-Unis, le rôle de la Turquie, dont aucune des actions militaires ou diplomatiques n’est conforme aux règles qui régissent l’organisation empêchent un accord sincère.

ALARMÉ par les propos du président français, le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a été reçu la semaine dernière à l’Élysée où il a tenté de raccommoder les rapports entre la France et l’organisation qu’il dirige. M. Macron, pour sa part, s’est contenté de dire une vérité cruelle propice à une négociation entre les États-membres pour qu’ils se ressaisissent et opposent aux ambitions hégémoniques de la Russie, de la Chine et même de la Turquie un front sans failles. Malheureusement, il faut, pour parvenir à cet objectif, que les points de vue des principaux acteurs de l’OTAN se rapprochent. Il est difficile de croire que ce sera le cas cette année, tant les divisions sont criantes.

L’exemple français.

Pour commencer, Donald Trump a pris à la lettre les déclarations de Macron qu’il attribue à une forme soutenue d’inélégance là où le chef de l’État français se contente d’électriser ses partenaires. Les deux hommes se rencontrent aujourd’hui et peut-être est-il préférable de ne pas trop s’alarmer de leurs mots, mais de voir jusqu’où l’un et l’autre peuvent aller pour protéger leurs intérêts nationaux. On peut compter sur Trump pour se montrer intraitable. Au projet du ministère français de l’Économie de taxer les grands groupes américains de nouvelles technologies à hauteur de leur chiffre d’affaires en France, M. Trump a réagi en annonçant une hausse des tarifs douaniers sur quelques précieuses productions françaises, comme le fromage. Mais Trump, par ailleurs reconnaît que les Européens ont augmenté leurs budgets militaires, ce qu’il a exigé dès qu’il est entré à la Maison Blanche. Sur ce point, la France a été exemplaire, qui non seulement a conçu une loi programmatique accroissant le budget de la Défense chaque année, mais se bat seule au Sahel, sans le concours de ses plus proches alliés.

La nouvelle vocation de l’OTAN.

Bien entendu, l’OTAN n’est pas vraiment dans le coma, mais, depuis la chute du mur de Berlin et la réunification de l’Allemagne, elle cherchait une nouvelle vocation. Celle-ci est toute trouvée dans la lutte contre le terrorisme, dans la menace militaire russe et dans le rôle d’apprenti sorcier qu’a adopté Recep Erdogan, président de la Turquie, qui, sans quitter l’OTAN et sans chasser les Américains de son sol, a acheté des fusées russes incompatibles avec l’armement de l’OTAN, mène ses propres conquêtes en Syrie sous prétexte de combattre les Kurdes qu’il qualifie de terroristes et contribue à une déstabilisation accrue de la Syrie qui risque de lâcher dans la nature des djihadistes dangereux pour la sécurité de l’Europe. De fait, les comportements des uns et des autres, et notamment de Trump et d’Erdogan, méritent une large clarification. On ne voit plus vraiment ce que la Turquie fait au sein de l’OTAN, bien que sa position géographique en fasse une pièce maîtresse ; on ne croit plus que les États-Unis sont restés le leader de l’OTAN, dès lors que Donald Trump se déclare las de devoir payer pour la sécurité des Européens, même s’ils font beaucoup d’efforts.

Dissuasion française.

Dans cet embrouillamini, la position allemande est énigmatique, la chancelière, Angela Merkel ne souhaitant manifestement pas engager des dépenses supplémentaires et encore moins envoyer des militaires allemands se faire tuer, comme les nôtres, sur les théâtres d’opérations extérieures. En outre, si M. Macron se proclame lui-même « leader » de l’Europe, son attitude n’est guère appréciée par ses alliés, notamment l’Allemagne et les pays de l’Est qui, quoi qu’il en soit des caprices de Trump, continuent à ne jurer que par l’Amérique et craignent que, livrée à elle seule, l’Union européenne n’assure pas la sécurité des États baltes, de l’Ukraine et de la Pologne. Ils ressemblent à l’autruche effrayée qui met sa tête dans le sable pour échapper au danger : la protection américaine n’est plus garantie, non seulement parce que M. Trump n’a pas envie de se battre pour les Estoniens mais parce qu’il ne sait même pas où est l’Estonie. Un instrument militaire de rechange est donc absolument indispensable, mais il demande du temps, de la patience, de la négociation et d’intenses efforts avant de pouvoir remplacer le parapluie américain. La France est une puissance capable d’envoyer des ogives nucléaires contre un ennemi éventuel et, de ce point de vue, elle peut remplacer les États-Unis, étant entendu qu’il n’y aurait pas de gagnant dans un conflit atomique, mais que la perspective des destructions causées par des armes stratégiques françaises suffirait à intimider la Russie.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à OTAN : le pugilat

  1. Michel de Guibert dit :

    Si la vocation de l’OTAN était désormais de lutter contre le terrorisme, il vaudrait mieux s’allier avec la Russie qui lutte aussi contre le terrorisme qu’avec la Turquie qui le soutient, notamment en Syrie dans la province d’Idlib !

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