Le désarroi de la majorité

La contestation n’a pas diminué
(Photo AFP)

Emmanuel Macron reçoit mardi prochain les députés d’En marche pour les rasséréner. Ils se plaignent en effet de ce qu’il les a traités de manière cavalière, notamment lorsqu’il leur a demandé « plus d’humanité » après leur refus d’entériner une proposition de loi portant de 5 à 12 jours le congé d’un parent en deuil après la mort de son enfant.

ILS ont raison sur au moins un point : entre les consignes de vote et la recherche d’un vote humaniste, il y a souvent une contradiction difficile à résoudre. Mais ce n’était pas le cas. Le président de la République a voulu sans attendre échapper à la critique publique en dénonçant le scrutin dès qu’il a commencé à entendre les vitupérations, toujours bruyantes, de l’opposition. Il semble toutefois que le désaccord entre le chef de l’État et les députés de la République en marche soit bien plus profond qu’une simple péripétie tactique à l’Assemblée. Constatons que les défections d’élus de la REM sont de plus en plus nombreuses, ce qui réduit la marge de manœuvre de la majorité. Entre ces départs et la résistance à toute discipline de vote chez ceux qui sont restés, les bataillons de la réforme des retraites, pas moins choqués que d’autres sur le sens et les éléments de ce projet de loi, diminuent, au profit d’ailleurs des députés du MoDem qui, après avoir apporté, assez fidèlement depuis près de trois ans, leur contribution à la vague du changement, risquent de devenir les ultimes arbitres de la politique réformiste.

Un malentendu ?

L’art de M. Macron est de ne jamais paraître gagné par la panique quand son programme est contesté par ses forces vives. Il ne s’agirait que d’un malentendu. Il a déjà prouvé qu’il peut reprendre par le verbe ce qu’il a perdu dans les actes. Il va s’adresser aux élus REM mardi et il leur fera changer d’avis. C’est ce qui s’est passé lors du fameux « grand débat » qui lui a permis de reconquérir nombre de maires. Comment n’impressionnerait-il pas ceux qui lui doivent leurs fonctions, lui qui a convaincu ceux qui ne lui doivent rien ? Son optimisme se heurte toutefois à quelques phénomènes qui ne le renforcent guère. M. Macron ne peut pas nier que le temps passé par la majorité sur les retraites n’a pas permis de clarifier le débat, que la communication de son gouvernement a été nulle et non avenue, que, au fond, il a lui-même compliqué ce qui déjà n’était pas simple, sans doute parce qu’il a changé d’avis à plusieurs reprises, rejetant l’âge-pivot pour en faire ensuite l’axe de sa politique en invoquant la préoccupation comptable.

Un colosse aux pieds d’argile.

Les députés qui ont quitté la REM se plaignent d’un ensemble de décisions, et pas seulement de la réforme des retraites. Ou bien ne supportent-ils plus les protestations de leurs mandants. Ou bien sont-ils saisis par une besoin d’éthique qui n’est plus satisfait par les allers-retours incessants du Premier ministre, Édouard Philippe, sur le contenu de la réforme des retraites. On les comprend, mais en même temps, ils ont tendance à oublier qui les a faits rois. Ils ont oublié que, même si leur majorité est écrasante, c’est un colosse aux pieds d’argile, du fait des états d’âme de presque tous et des défections de quelques-uns. Ils ont moins la vision de l’enjeu général, la victoire ou la défaite d’une politique centriste, comparée au danger de l’arrivée des extrêmes au pouvoir. Comme les frondeurs socialistes, ils scient la branche sur laquelle ils sont assis. Le président, après les avoir câlinés, ne manquera pas de leur rappeler.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Le désarroi de la majorité

  1. vultaggio-lucas dit :

    C’est la fin de semaine et les vacances pour les Franciliens entre autres… Ainsi,les député(e)s REM auraient ‘tendance à oublier qui les a faits rois. En tout cas ce n’est pas le fait du prince puisqu’elles/ils ont été élu(e)s démocratiquement tout comme leur « boss »…

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