Messages contradictoires

Jean-Yves le Drian
(Photo AFP)

Emmanuel Macron a encouragé hier les salariés français à continuer à travailler s’ils le peuvent. En même temps, ceux qui se promènent en ville ou dans la nature sont passibles d’une amende de 135 euros.

LE SOUHAIT du président, c’est de maintenir en bon état l’outil de travail, de manière à éviter l’effondrement de l’économie au terme de l’épidémie.  Mais il va être très difficile, pour les forces de l’ordre, chargées de maintenir le confinement, d’établir la différence entre les insouciants et ceux qui doivent obligatoirement être présents à leur poste. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a annoncé ce matin que 130 000 Français à l’étranger seront rapatriés, mais n’a-t-on pas limité le nombre de vols français de telle sorte que nos concitoyens se retrouvent coincés outremer ? Enfin, on assiste à des affrontements entre diverses entreprises, notamment dans le bâtiment, qui veulent laisser leurs chantiers ouverts mais dont les salariés estiment qu’ils sont insuffisamment protégés. Le gouvernement n’a pas tranché. De même, M. Le Drian affirme que des millions de masques importés de Chine seront distribués aujourd’hui aux soignants et aux pharmacies, ce qui traduit un manque de préparation à l’épidémie. Ces importations, par la France d’une part et par l’Europe d’autre part, finiront par rassurer la population, d’autant que les pouvoirs publics en contrôlent la répartition et les prix. Mais nous avons perdu une quinzaine de jours précieux pendant lesquels des contaminations auraient pu être évitées.

Vieux et solitaires.

La prolongation du confinement semble inéluctable parce que le virus n’est pas maîtrisé, parce que les nouvelles venues d’Italie sont mauvaises, avec encore des contagions et de multiples décès, au point que les églises, les cimetières et les lieux d’incinération sont saturés pendant que s’alignent devant les lieux de culte des cercueils inutiles. C’est une vision, d’apocalypse, mais elle n’explique pas tout. Les décisions prises par l’Union européenne et la Banque centrale européenne, après une longue hésitation coupable, ont fait rebondir la Bourse à Paris. La santé boursière n’est qu’un symptôme, il ne faut pas le négliger pour autant. Le plus difficile, pour le gouvernement, sera de maintenir l’effort collectif à un haut niveau pendant plusieurs semaines. Le pari n’est pas gagné. Nombre d’auditeurs, lecteurs et téléspectateurs expliquent que  la solitude du confinement conduit à la dépression. D’aucuns s’inquiètent ne pas voir venir ceux de leur famille qui les aident à survivre. Les personnes âgées, on peut en faire le constat, ne sont nullement contactées par la mairie, aucun service ne leur est offert et le cas des personnes devient tragique si on ne leur rend pas visite, ce qui, hélas, n’est pas recommandé.

L’attestation dérogatoire.

Tout cela signifie qu’il est relativement facile d’imposer une consigne nationale, mais qu’elle est vécue de façon très différente par les jeunes et les vieux, par les pauvres et les riches, par les citadins et les campagnards. Je publie aujourd’hui le point de vue émouvant d’un lecteur complètement hostile à la prolongation du confinement et qui envisage le pire si on l’empêche de sortir. Il faut donc rappeler que, pour se détendre,  faire quelques pas autour de son pâté de maisons, il suffit de remplir l’attestation dérogatoire de sortie en trouvant les formulaires sur l’un des sites Internet du gouvernement. Un pays tout entier est soumis à une mesure sévère mais qui reste indispensable, pour le temps qu’il faudra. Il y a, dans cette affaire, deux réalités : la première, c’est qu’on n’est pas malade et qu’on ne comprend pas bien pourquoi on ne peut pas sortir. La seconde, c’est que, même si la contagion est le plus souvent bénigne, il y a des gens très atteints et que l’on ne peut soigner qu’avec une assistance respiratoire, étant entendu que nous manquons de lits de réanimation si le nombre de malades augmente. Sans ces lits, l’hôpital ne peut pas sauver les cas les plus graves. Nos concitoyens sans exception doivent s’informer et comprendre les informations qu’ils reçoivent. Il en va de notre salut à tous.

RICHARD LISCIA

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7 réponses à Messages contradictoires

  1. Michel de Guibert dit :

    Il y a les mails, les SMS, le téléphone, WhatsApp, Skype, Teams, etc., pour garder du lien social avec notamment les personnes âgées ou fragiles.

    • Defrance dit :

      C’est oublier bien vite, Michel de Guibert, la fracture numérique, les campagnes, les zones blanches, etc. Selon des statistiques, cela toucherait 20 % de nos concitoyens et plus particulièrement les personnes âgées qui n’ont pas Internet. Ces gens de la France périphérique font aussi partie de notre société non ? Alors ne les oublions pas avec ces raisonnements superficiels.

      Pour info à Michel de Guibert : le déploiement de la FO sur la Charente Maritime commence à se réaliser et se terminera en 2022 peut-être.

      Réponse
      Internet apporte à la plupart des gens, sinon à tous, des moyens de communication extraordinaires. Confiné comme tout un chacun, je continue à publier mon blog quotidien, mais mieux encore, j’écris, fais mettre en page et corrige mes articles dans le Quotidien du médecin et dans le Quotidien du pharmacien sans sortir de chez moi. Si 20 % des gens ou si des handicapés ne peuvent pas utiliser un ordinateur, c’est extrêmement regrettable, d’autant plus regrettable qu’il a changé la société en profondeur.
      R.L.

      • Michel de Guibert dit :

        Defrance, je parlais aussi du téléphone, les personnes âgées vivant seules ou les personnes vivant dans les zones blanches qui n’ont pas internet ont généralement le téléphone, et on peut les appeler, c’est ce que j’ai fait ce week end, merci d’éviter les procès d’intention…

  2. Patrice Martin dit :

    Votre titre est d’une extrême pertinence parce qu’il traduit parfaitement le désarroi des patients qui me consultent. On leur interdit de se rencontrer mais on les convoque à des élections municipales. On leur interdit de se réunir mais on les invite à aller travailler. On ferme les plages, les stations de ski et les golfs mais on laisse ouverts les principaux lieux de contamination que sont les entreprises, les transports en commun et les supermarchés. Il existe pourtant une solution simple pour sortir de cette incohérence des consignes de l’exécutif : interrompre toutes les activités professionnelles à l’exception de celles indispensables à une vie minimale : l’alimentation, l’énergie, la santé, la voirie, la sécurité, les communications, les transports routiers. Restreindre l’accès aux transports en commun aux seuls professionnels sus-nommés. Limiter l’accès aux supermarchés en n’autorisant qu’une visite hebdomadaire et en définissant un nombre maximal de clients simultanés. Imposer le port du masque dès que l’on sort de son domicile. Mais où sont donc passés le milliard de masques chirurgicaux et les 750 millions de FFP2 dont nous disposions après le H1N1 ? Le gouvernement avait promis 18 FFP2 par semaine à tous les généralistes et infirmiers mais la pharmacie ne m’a délivré hier soir que des chirurgicaux parfaitement inefficaces, au prétexte que ma région n’est pas suffisamment impactée actuellement. Pourtant j’ai reçu lundi deux patients chez qui le diagnostic de Covid 19 était cliniquement évident. Impossible de les faire tester parce que mon laboratoire n’a pas de test et d’ailleurs il refuse de recevoir les patients suspects même pour une analyse de sang succincte parce que le personnel ne dispose pas de masques. Et pas de réponse du 15 après un quart d’heure d’attente… Quand tous les généralistes seront morts, la population pourra se faire soigner par ces experts de notre administration de la santé, qui se sont complètement vautrés sur la gravité de la situation et ont ce faisant trompé une grande partie de l’exécutif.
    D’après Philippe Klein, un médecin français qui s’y trouve, le type de confinement auquel nous sommes contraints actuellement s’est révélé totalement inefficace à Wuhan. Si les Chinois semblent avoir gagné, c’est parce que devant cet échec, ils sont allés ensuite beaucoup plus loin. En organisant une distribution des produits alimentaires, déposés tous les matins devant les domiciles par les services de l’armée. En délivrant des masques à toute la population. En surveillant les rues avec des drones. En testant les patients beaucoup plus que nous, en confinant à leur domicile les malades positifs ne justifiant pas l’hospitalisation, en enfermant dans des chambres d’hôtels réquisitionnés tous les sujets contacts de ces patients et en les testant régulièrement avant de les autoriser à en sortir.
    Il est à craindre que ce qui peut s’appliquer à une population disciplinée et fataliste dans un pays communiste, une nation totalitaire, un régime policier, soit inapplicable dans une démocratie gauloise.

  3. D.S. dit :

    Autre information contradictoire: lavez vous souvent les mains, mais ne portez pas de gants, c’est inutile. Alors il faut expliquer: le virus ne présente aucun danger pour les mains. Ce qui est dangereux, c’est de porter la main au visage (avec ou sans gant). Et quand on enlève les gants, il faut de toute façon, se laver les mains.

  4. Laurent Liscia dit :

    La même confusion règne aux États-Unis. Dernière question en date: « Peut-on se promener dans les parcs nationaux? »
    Réponse: oui, mais, pas en groupe; n’utilisez pas les latrines ; et ne vous approchez pas des poubelles. Et lavez-vous les mains quand vous rentrez chez vous.

  5. Del dit :

    Le discours paradoxal, l’arme des pervers narcissiques. Il est inquiétant que notre exécutif l’utilise autant…

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