Sombres nouvelles

Le Pr Salomon
(Photo AFP)

Comme il fallait s’y attendre, la sortie de crise prendra quelques semaines au moins. Nous ne sommes pas parvenus au pic de l’épidémie. Le nombre de contaminations et de décès continue d’augmenter. La colère du public est à son comble.

MALGRÉ le beau temps, le réveil, ce matin, était blafard. Le confinement se poursuivra aussi longtemps que la marée contagieuse n’aura pas reflué. Les mesures mettant en œuvre le confinement sont renforcées, ce qui ne laissera plus le loisir aux tricheurs de s’évader pendant plusieurs heures sans raison valable. Nous avons été consternés par les déclarations du Pr Jérôme Salomon, hier soir : le nombre de décès annoncé chaque soir ne concerne que les personnes mortes à l’hôpital, pas celles des Ehpad, nombreuses, ni ceux qui se sont éteints chez eux. La mort à l’hôpital, c’est la partie émergée de l’iceberg, a expliqué le Pr Salomon. Dans ce cas, faut-il multiplier le nombre affiché par deux ou par trois ? Combien de nos concitoyens vont mourir ? Combien seront affectés par la contagion ? Et à quel moment les Français pourront-ils retrouver leurs habitudes ? Certes, le gouvernement a poussé plusieurs cris d’alarme, mais le fait est que nous avons le sentiment que l’information nous est très lentement distillée, qu’elle nous arrive par bribes, comme si nous ne devions pas apprendre toute la vérité en un seul jour, comme si on voulait épargner nos âmes d’enfant, comme si nous étions jugés incapables de supporter la tragique réalité. De ce point de vue, le témoignage de Martin  Hirsch  (AP-HP), ce matin sur France Info, qui appelait à l’aide immédiate de l’État, était bouleversant.

Qui aurait fait mieux ?

Il est logique que nos gouvernants s’efforcent de ne pas déclencher une panique. Sur le retard pris dans l’adoption de mesures draconiennes, ils n’ont fait ni mieux ni pire que d’autres. Si en Asie, la Corée du Sud et Singapour ont littéralement dressé un barrage contre l’épidémie, par le confinement mais aussi par la multiplication des dépistages, l’Italie et l’Espagne souffrent déjà plus que la France. On peut fort bien comprendre que cette crise engendre révolte et recherche des coupables. Mais si les protestataires cèdent au chagrin, ce qui est bien  naturel, ils n’ont pas le monopole de la science et de la compétence. On trouvera souvent des gens qui se promènent dans la rue et se déclarent en même temps scandalisés par l’impéritie de leurs dirigeants. Ce n’est pas le moment d’affronter le pouvoir dans un polémique, disent les oppositions, mais déjà on prévoit une commission parlementaire d’enquête. Si nos dirigeants actuels ont été trop lents dans une crise qui nécessitait des réflexes ultra-rapides, qui peut dire de manière convaincante qu’il aurait fait mieux ? Ce n’est pas le sort politique des uns ou des autres qui nous intéresse, c’est la bonne manière de combler les brèches quand le navire s’abîme dans les flots.

Le rôle des médias.

Fascinés par une épidémie dont peu de gens se rappellent les précédents, les médias n’auront pas manqué de contribuer à la sidération et au début de panique dans la population. Ils ne connaissent plus d’autre sujet. Ils répètent à l’infini les meilleurs et les pires des avis. Les journalistes généralistes se sont faits docteurs en médecine, mais sans diplôme. Ils sont imbattables sur l’information relative à l’épidémie, de sorte que, lorsqu’on abandonne la radio ou les journaux par dépit, on allume son téléviseur, et là, c’est pire. C’est le coronavirus en boucle, dans nos assiettes et sur notre brosse à dents, dans l’eau de la douche et dans nos aliments, le matin et le soir, le jour et la nuit. Je les mets au défi de parler d’autre chose. Il est vrai que l’offre rejoint la demande. Nos concitoyens écoutent tout ce qui se dit non pas parce qu’ils se sont convertis à la science, mais parce qu’ils attendent désespérément la fin de la crise.

RICHARD LISCIA

PS- Une panne informatique a retardé la publication de cette chronique et des trois commentaires les plus récents. Veuillez m’en excuser.

 

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Une réponse à Sombres nouvelles

  1. Laurent Liscia dit :

    Bon, il y aussi le deces d’Uderzo, mais ca me parait moins interessant.

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