L’épidémie est contrôlée

Jean-François Delfraissy
(Photo AFP)

Le président du Conseil scientifique pour la santé, le Pr Jean-François Delfraissy, a annoncé ce matin sur France Inter que l’épidémie de Covid-19 était désormais contrôlée en France. Ce qui ne signifie pas pour autant que nous en soyons  débarrassés.

Le Pr DELFRAISSY se fonde sur des paramètres convergents : baisse très sensible de la mortalité, baisse du nombre de morts, baisse du nombre de nouveaux cas. Il fallait faire résonner une note optimiste au moment où le déconfinenement lent et surveillé devient la seule garantie d’une relance de l’économie. D’autres voix du Conseil scientifique sont plus prudentes. Et c’est normal : le déconfinement ne veut pas dire que nous puissions prendre tous les risques, abandonner les gestes barrières et participer à une grande fête nationale. On a voulu favoriser le tourisme à la veille de l’été, on songe à rouvrir les restaurants et les cafés, la police devient plus indulgente avec les attroupements raisonnables, mais le devoir civique nous impose de rester indemnes et de ne pas contaminer les autres.

La leçon de ces trois mois.

La somme des connaissances acquises dans la longue épreuve que nous avons subie, nous permet de combattre le virus avec plus d’efficacité. Mais la froide vérité montre que nous ne savons pas grand-chose de ce virus. Nous espérons, mais nous ne sommes pas sûrs, que l’été et la chaleur vont en atténuer l’agressivité ; l’étude biaisée qu’a publiée le Lancet indique que même des savants et des chercheurs peuvent nous tromper ; la persistance de symptômes très désagréables chez 10 à 15 % de nos concitoyens contaminés nous conduit à croire qu’il vaut mieux éviter la contagion par tous les moyens. La leçon des ces terribles trois mois est simple : nous ne sommes sûrs de rien, sinon que ce virus tue, ou fait beaucoup de mal à l’organisme. Nous ne sommes pas certains que les enfants lui échappent complètement. Et nous avons tout lieu de penser que les personnes âgées restent éminemment vulnérables.

Le pays de maintenant, pas le monde d’après.

Le gouvernement, comme nous avons eu l’occasion de le rappeler à maintes reprises, est écartelé entre deux nécessités : livrer bataille encore et encore contre le virus et renvoyer tous les Français à une vie normale, celle du travail et celle des loisirs pendant les vacances prochaines. Il prend des mesures d’urgence et calculées, mais il se heurte à une foule de commentaires lancés par des « visionnaires » qui nous parlent du « monde d’après », alors que c’est le pays de juin qu’il faut sauvegarder, puis celui de juillet. Nous sommes sur le front et nous n’avons pas le temps de songer à la VIè République. Tous ceux qui croient voir le soleil levant de leurs idées enfin réalisées vont trop vite en besogne. Nous avons financé la guerre contre le Covid avec de l’argent que nous n’avons pas et que, d’une manière ou d’une autre, nous devrons rembourser. Nous avons besoin, après une baisse du PIB comprise entre 8 et 11 %, d’un retour flamboyant à la croissance. Le gouvernement, en distribuant beaucoup d’argent, a évité le pire aux Français, mais il doit rapidement changer de politique économique s’il ne veut pas que s’affaissent les structures mêmes de notre système social. Le moindre des réalismes nous met en garde contre des changements révolutionnaires qui seraient dictés par la crise sanitaire, alors qu’elle est sourde et aveugle, n’a pas plus de sens qu’un séisme ou un tsunami, et qu’elle recule quand ses victimes se dérobent à sa férocité.

Les pouvoirs publics cherchent un juste équilibre entre les mesures de prévention et le rebond économique. Ils ont une écrasante responsabilité. Ils ont été critiqués de toutes les manières et pour de bonnes et mauvaises raisons. Il existe cependant un moyen de se faire une idée sur leur action, en comparant leur bilan à celui des autres pays, exercice auquel personne ne souhaite se livrer. Certains ont fait mieux, beaucoup ont fait pire. Une courte hésitation au début de la crise vaut au gouvernement des poursuites en justice. Mais Boris Johnson a flirté avec l’idée d’immunité naturelle de la population britannique pendant quinze jours et voilà que la mortalité au Royaume-Uni est l’une des plus élevées d’Europe ; même chose en Suède, même chose aux États-Unis où le déni de Donald Trump s’est traduit par un surplus affolant de mortalité. Une chose nous semble sûre : la crise sanitaire ne doit pas être la cause d’une division accrue du pays, elle doit être combattue par son unité.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à L’épidémie est contrôlée

  1. Doriel pebin dit :

    Bonne analyse. Effectivement, la sagesse est d’attendre encore quelques mois pour avoir un recul suffisant et une analyse pertinente. Hurler avec les loups pour ceux qui n’ont pas eu de responsabilité à prendre est évidemment plus simple et un bel exemple de leur incapacité à diriger un pays devant une crise aiguë . On voit l’incompétence navrante mais attendue des tribunocrates style Trump ou Bolsonaro entre autres. On saura mieux pourquoi la France , pays soit-disant si mal gouverné , a été coupée en deux pays, un succès pour les deux tiers et un échec pour un tiers. Il est pour le moins tout aussi étonnant, sinon irresponsable, de voir une députée, Clémentine Autain, LFI, dans une manifestation de 20 000 personnes non autorisée soutenue par ce parti. Elle, comme les membres visionnaires de son parti, prône une VIe république où manifestement, la marque de fabrique sera d’être … insoumis. Bonjour, la société de défiance que ce parti et nombre d’autres appellent de leur vœux. Il est vrai que ces « authentiques » démocrates risquent d’imposer leur vue à ce qui ne sont pas d’accord, comme ils le montrent de façon constante alors qu’ils ne représentent qu’environ un cinquième de l’électorat. Le principe de réalité existe peu chez ces dogmatiques.

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