Une écologie apaisée

Laurence Tubiana
(Photo AFP)

Créée par Emmanuel Macron, la Convention sur l’environnement a remis à Elisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, son rapport qui contient 150 mesures. Le président de la République recevra le 29 juin les membres de la convention, co-présidée par Thierry Pech et Laurence Tubiana.

L’ÉLABORATION de ce document a été faite en toute liberté par 150 citoyens et n’a fait l’objet d’aucune de ces critiques ou contestations qui sont si fréquentes dans notre pays. Elle a été voulue par l’exécutif, ce qui lui assure crédibilité et consensus pour au moins une large partie de ses propositions. Les deux présidents de la Convention ont émis le souhait qu’au moins deux de leurs suggestions fassent l’objet d’un référendum. S’il est vrai que tout recours à l’avis populaire est historiquement plein de chausses-trappes, la complexité d’une politique environnementale nouvelle nécessite une forte majorité pour son application. Ce qui est frappant dans ce processus, c’est qu’il n’y a aucune dissension entre le gouvernement et les membres de la Convention : le pouvoir ne s’est pas focalisé sur des projets susceptibles de l’importuner ou de l’agacer, il a voulu que la Convention s’exprime sans lui poser des conditions. Dans sa démarche, la sincérité abonde et dans celle de la Convention, il y a toute une série de points qui seront rejetés , par exemple, par de nombreux automobilistes (limitation des vitesses et suppression de la publicité pour les SUV). L’essentiel est que soit établie cette synergie entre Convention et exécutif, sans laquelle le programme indiqué n’aurait pas la moindre chance de trouver un début de réalisation. Les signataires du document demandent deux avancées importantes : que le respect de l’environnement soit inscrit dans la Constitution et que soit adopté le terme de « écocide ».

L’écologie n’est pas une vue de l’esprit.

On peut craindre, bien sûr, que, dans la mise en œuvre du processus, apparaissent des blocages et des querelles. Christian Jacob, président des Républicains, n’a pas tardé à réagir en mentionnant un argument ancien, mais éculé : l’écologie ne doit pas être punitive. Elle ne doit pas non plus représenter seulement une vue de l’esprit. Elle doit entrer dans les mœurs si elle veut avoir une chance de changer en profondeur notre mode de vie. Nous sommes, dans ce domaine, comme dans tant d’autres, partagés entre révolution et réforme. Celle-ci serait plus lente, mais à n’en pas douter moins violente. On peut rappeler que le voie de la réforme est la plus sûre, d’abord parce que M. Macron est un expert dans ce domaine, ensuite parce qu’il n’existe aucune bonne raison de brutaliser les Français par un programme autoritaire dont les effets néfastes s’ajouteraient à ceux de la pandémie et de la crise économique et sociale. Avec la Covid, nous avons tous été contraints d’adopter des normes de vie très différentes de celles auxquelles nous étions tant habitués.  Ce qui nous a permis de survivre en tant que peuple, sinon en tant que société prospère. La preuve a été ainsi fournie que rien, même pas une grave épidémie, ne peut nous abattre. C’est maintenant le moment de tirer profit de notre résilience, par opposition à l’idée très répandue que nous sommes trop affaiblis par la crise pour mettre en danger le rebond économique que nous appelons de nos vœux.

La thérapie, c’est le rassemblement.

Pour lutter contre l’utopie ou le statu quo, il n’y a pas de meilleure procédure que le rassemblement. Il sera férocement combattu par une large partie du personnel politique. Les Verts veulent incarner à eux seuls toute l’écologie française, ce qui relève de l’illusion ; les réactionnaires voudront jeter le rapport au panier ; d’autres diront qu’on peut joindre l’écologie à un autre programme idéologique, manière de dire que les Verts n’ont pas un monopole. Mais le fait nouveau, c’est que la macronie vient de renforcer sa crédibilité dans le domaine de l’environnement, que les Français vont se prononcer sur ce qui doit être la préoccupation numéro un d’une société ; et que, pour la première fois peut-être, une idée du pouvoir a convenu aux gens et qu’elle s’est concrétisée dans un consensus formel augurant des actes à venir. L’expérience de ces trois années de réformes tonitruantes qui ont soulevé tant d’hostilité, de haine, de rancœur et produit tant de dégâts, nous conduit à penser que, cette fois, un projet a une bonne chance d’être réalisé sans mettre le pays en ébullition.

RICHARD LISCIA

 

 

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3 réponses à Une écologie apaisée

  1. admin dit :

    Laurent Liscia dit :
    Oui, enfin un peu de bon – mais il faut faire de ce sujet le coeur de l’action planétaire pour les 50 prochaines années.

  2. PICOT dit :

    Pas mal comme diversion. Je dirais même bien joué. Cela évite de trop mettre sur la table les sujets urgents du moment, et ce n’est pas ce qui manque. Vraiment, même si c’est intéressant, ces problèmes écologiques peuvent attendre un peu, vu l’état actuel du pays.

  3. Num dit :

    Je prends le pari que s’il y a un référendum, le non l’emportera. N’oublions pas que ce sont de telles mesures qui ont été à l’origine du mouvement de Gilets Jaunes. Attendons un peu avant d’affirmer qu’il n’y aucune contestation.
    Cette convention a été totalement noyautée par les lobbys écolo-radicaux qui ont été les seuls à avoir la parole. Résultat : uniquement des taxes et des interdictions. Sans compter qu’on a échappé de peu à la semaine de travail de 28 heures (si, si !).

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