La promenade du président

Le couple hier à l’Hôtel de Brienne
(Photo AFP)

Emmanuel Macron et son épouse sont sortis à pied de l’Élysée hier soir et ont marché jusqu’aux Tuileries. Ils ont rencontré des gilets jaunes.

CE N’EST PAS la première fois que le président de la République s’expose à la violence, verbale pour le moment. Les dialogues qu’il ouvre avec les gilets jaunes ont plusieurs fois démontré qu’ils ne rehaussent guère le débat politique. Il est permis de penser que, jusqu’à preuve du contraire, il devrait éviter ce genre de confrontation car il n’existe pas d’argument logique qui puisse persuader ses adversaires : il pourrait tout aussi bien négliger des discussions qui n’apportent rien à l’action politique et réduisent la conversation à la voix la plus nombreuse et la plus tonitruante. Sa volonté d’aller prêcher auprès de cette partie de la population qui lui est la plus hostile témoigne néanmoins de son courage physique, qu’il partage avec Brigitte Macron. Certes, comme l’opposition le fait remarquer dans des déclarations sardoniques, le chef de l’État est protégé par des policiers et ne court pas un grand risque. Mais, au point où nos sommes parvenus de clivage de notre société, personne ne peut jurer de rien, et surtout pas que les « débats » dans la rue ne risquent pas de dégénérer.

Rhétorique ridicule.

C’est d’ailleurs l’argument principal brandi par ses détracteurs. Ils se font du souci pour lui. Ce serait catastrophique qu’il prenne des coups, qu’il soit bousculé ou molesté et que Mme Macron fasse partie des victimes. Cette préoccupation est complètement hypocrite car elle est associée à la conviction inaltérable que les sorties en ville devraient lui être interdites. L’autre critique adressée notamment par Éric Ciotti, qui fait métier  de poursuivre l’exécutif devant la Cour de Justice de la République, et par François-Xavier Bellamy, député européen qui a conduit la liste LR à la défaite aux élections européennes, repose sur l’inanité, à leurs yeux éternelle, des déclarations faites mardi par M. Macron à la télévision. Cela montre que la déroute d’un jour ne diminue en rien l’âpreté du combat politique : on peut perdre une bataille mais on gagne toujours à dénigrer nos gouvernants. Le paradoxe veut que, pour accabler le président, il faut dédouaner les gilets jaunes ou quelque autre forme d’opposition, alors que les Républicains clament haut et fort qu’avec eux l’ordre sera aussitôt rétabli.  Aux promesses toujours contestées du pouvoir s’opposent d’autres promesses dont la faisabilité est de l’ordre de zéro actuellement. Gouverner la France d’aujourd’hui est extrêmement difficile, mais se présenter comme les génies qui non seulement amélioreront la gouvernance mais emmèneront la France vers le paradis sur terre constitue un exercice de rhétorique particulièrement ridicule.

La libertés des électeurs LR.

Cela fait trois ans en effet que la France tire à boulets rouges sur ceux qu’elle a élus. LR souffre spécifiquement de ce que ce parti considère comme une opération, lancée par Macron en 2017 et grâce à laquelle il aurait volé la présidence à LR. Si aujourd’hui les critiques des Républicains deviennent suraiguës, c’est parce que le lent transfert des suffrages de LR à la République en marche n’est pas terminé. Il s’accentuera avec la volonté du président d’orienter sa politique un peu plus à droite pendant que cherchent à se rassembler la gauche et les écologistes. M. Macron n’agit pas au nom d’une idéologie mais au nom du pragmatisme. LR affirme qu’il ne fait rien sinon aller se battre le soir avec des gilets jaunes, mais les électeurs de LR ne sont pas de cet avis. J’ajoute que, quoi qu’il en soit, la reconnaissance du courage physique et mental de M. Macron n’arracherait pas la langue de ses détracteurs. Le président de la République aurait pu aller se coucher après une journée fatigante. Faire irruption devant quelques braillards professionnels n’est jamais agréable ; défendre un point de vue devant ceux qui demandent votre démission en hurlant n’a rien d’une promenade digestive ; se présenter à eux est peut-être une provocation mais c’en est une qui a du panache.

Comme Édouard Philippe, Jean Castex est plus simple qu’Emmanuel Macron. Il ne se croit pas obligé d’ouvrir, en toute occasion, un débat contradictoire dont il admet la futilité. M. Macron s’estime investi des pouvoirs de la République. Il a souvent un langage d’une simplicité exemplaire, mais il ne cède rien sur l’autorité qui lui est conférée. Il n’a pas tort. L’incident d’hier soir montre (et cela a été souligné à juste titre par M. Bellamy) à quel point la liberté républicaine et démocratique débouche sur l’irrespect, l’absence de responsabilité, l’infantilisation des comportements qui, non seulement ne se plient pas à la consigne de distanciation mais poussent le rapprochement physique jusqu’à la menace. C’est la terrible réalité contemporaine.

RICHARD LISCIA

PS-Je reviendrai demain sur le discours de politique générale que prononcera Jean Castex cet après midi.

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2 réponses à La promenade du président

  1. Laurent Liscia dit :

    Lâchons-nous un peu, ça fait du bien en ces temps de Covid. Les gilets jaunes sont un ramassis de rleurs racistes dont les gilets auraient été noirs dans l’Italie de 1930, et qui ont surtout besoin de multiples coups de pieds au derrière. Que les Francais se soient laissés berner aussi longtemps par ces imbéciles en dit long sur les temps qui courent.

    Réponse
    Parmi les imbéciles, celui qui a dit deux fois : « Je te jure, j’arrive pas à le maudire ! »

  2. Doriel pebin dit :

    Merci pour ce commentaire somme toute distancié. Le problème actuel est qu’une bonne partie de la population ne vit que dans le ressentiment et l’ignorance. Le plus triste et le plus grave est précisément que cela est sciemment entretenu par nos hommes et femmes politiques d’opposition de droite et de gauche (et une bonne partie du monde médiatique) qui ont totalement oublié leur responsabilité vis à vis de la nation et de leur métier et leur éthique de responsabilité. La meilleure preuve est que devant cette crise du Covid, presque aussi grave qu’une guerre (économiquement parlant), au lieu de répondre à la demande légitime d’union nationale du gouvernement, chaque parti et chaue ténor n’envisage même pas l’intérêt national mais reste dans son petit pré-carré égoïste et egocentré. Un seul mot d ordre, haro sur ceux qui prennent des responsabilités. Le prochain président (qui que ce soit) sera confronté à la même haine et obstruction systématique et imbécile. Il n aura pas plus de voix au premier tour que Macron et il lui sera reproché une absence de légitimité et l’impératif pour le « peuple » d’être… insoumis ! Autre exemple, alors que l’épidémie persiste , Mme Autain et d’autres insoumis s’affichent ouvertement dans des manifestations interdites au mépris des règles sanitaires, du droit, de l’éthique et du respect de la valeur humaine. Il est vrai qu’ils ne sont pas en première des soins mais de la critique. Pauvre France et « viva la muerte » comme le proclament ces nihilistes inconscients de plus en plus nombreux. Apparemment ils optent pour l homme ou…la femme providentiels, il est vrai qu’une « bonne dictature » serait la solution « idéale ». On n entendrait plus, seul avantage, ces inepties. La voix du chef serait enfin…respectée car la seule autorisée. Ces ignares ont oublié qu’ils peuvent contester parce qu’ils sont en démocratie (qu’ils contribuent à détruire). Merci de continuer à commenter hors de la pensée unique bien-pensante de tout ce monde .

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