Chères vacances

À la plage
(Photo AFP)

Autorisées à l’intérieur de nos frontières et en Europe dans certains cas, les voyages de vacances ont très probablement entraîné un relâchement des comportements, notamment chez les jeunes, qui se traduit par l’apparition de nouveaux clusters.

LE DÉNI du danger, la soif de distractions, un sens illusoire de l’invulnérabilité expliquent que le nombre de contagions augmente, pour le moment sans mettre en danger l’activité générale. Les services de santé combattent néanmoins le phénomène, qui risque de s’aggraver, dans la perspective d’une « deuxième vague », concept lui-même biaisé, dans la mesure où en réalité, c’est la première vague qui continue de répandre ses méfaits. Cette vaste menace complique le travail des médecins et des pouvoirs publics. C’est l’occasion de rappeler que les Français n’ont pas eu de mots assez durs pour dénoncer la gestion de la pandémie au printemps, alors que certains d’entre nous ne savent pas trop comment qualifier le relâchement de la jeunesse et, parfois, des gens plus âgés. Lesquels ne portent pas le masque et participent à des attroupements favorisant une contamination à  grande échelle, tout en offrant une explication qui, de toute évidence, laisse de côté  les terrifiants effets d’une hospitalisation longue.

Le gazon est plus vert chez les Jones.

De la même manière, depuis le début de la crise, l’alarmisme du gouvernement est constamment dénoncé. On lui reproche de faire peur. Mais comment avertir la population des risques si on n’en montre pas les funestes conséquences ? Ce à quoi nous assistons n’est pas autre chose qu’un mimétisme social suicidaire comparable à celui d’un troupeau de brebis conduit par l’instinct grégaire à sauter par-dessus une falaise. Ce dérapage massif de la psychologie populaire comprend une souche de défi aux autorités, compris comme une forme absolue de liberté : »Je suis libre et à tel point que je préfère la liberté à la vie ». On a déjà vu cette pensée appliquée à des causes plus justes. Elle traduit le désespoir qu’inspirent les gouvernements autoritaires alors que, en réalité, il s’agit de responsabilité individuelle. Voilà que, pour sauter de la falaise, un professeur de médecine talentueux et éminemment crédible, le Pr Éric Caumes (La Pitié-Salpêtrière) n’hésite pas à suggérer une solution qui traîne depuis le début de la pandémie mais ne risque pas de calmer le jeu. Il propose, dans une sorte de rêve éveillé, de laisser les jeunes s’infecter au gré de leurs balades, ce qui constitue un moyen d’immuniser une forte partie de la population. Il avait à peine lancé l’idée qu’elle était combattue par ses pairs sur tous les tréteaux de la république. Et heureusement. Car ce n’est pas autre chose que l’idée de Boris Johnson, de Donald Trump et de Jair Bolsonaro, idée dont les peuples qu’ils gouvernent n’ont pas fini de payer le prix. Rien d’autre que la notion selon laquelle le gazon est plus vert chez les Jones, même si la France est plus intelligente et plus efficace.

L’apport des intellectuels.

Nous en sommes à ce point de la pandémie où, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, nous ne pouvons pas re-confiner tout le pays, même si l’exécutif mentionne cette hypothèse, et où il faut à tout prix éviter la contagion. Nous ne pouvons pas le faire parce que nous n’en avons plus les moyens. Il est impossible d’arrêter une deuxième fois l’activité économique. C’est un défi adressé à chacun d’entre nous : multiplier des précautions certes lassantes tout en produisant autant qu’avant la pandémie et ce, dans tous les métiers. Chacun d’entre nous, dans cette affaire, a donné sa part de petites souffrances. Mais la liberté de s’exposer au virus n’a aucun sens : nous ne sommes ni en guerre ni en France occupée. Je reconnais que beaucoup d’intellectuels de droite et de gauche pestent contre la « verticalité » de décisions dont ils dénoncent l’infantilisme. Mais ils ne sont ni médecins ni responsables des mesures collectives et ils ne disposent pas davantage des paramètres qui structureraient leur philosophie. Ils apportent leur mauvaise humeur dans un débat où l’on en trouve déjà trop et qui devient ridicule à force de vouloir nous faire croire que la distanciation sociale et le port du masque sont pires que la contagion, et de répéter, devant tous les micro-trottoirs, qu’ils n’en peuvent plus, qu’ils ont besoin de respirer (en réanimation ?) et d’exiger qu’on les extraie de cet « enfer ».

RICHARD LISCIA

PS- Je ne pars pas en vacances pour diverses raisons liées au Covid. Il ne serait pas cependant raisonnable de poursuivre ce blog au rythme quotidien. Je veillerai donc uniquement à commenter l’actualité quand elle me paraîtra intéressante. Bonnes vacances à tous les lecteurs.

 

 

 

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5 réponses à Chères vacances

  1. Michel de Guibert dit :

    Ce sont des décérébrés qui manifestent contre le masque à Berlin ou qui se répandent dans les réseaux sociaux !
    Merci pour ce juste édito et bon repos à défaut de vacances, je continuerai à vous lire si vous publiez.
    Ajoutons qu’il ne suffit pas de mettre un masque, encore faut-il ne pas le mettre sous le nez, voire sous le menton, comme trop de personnes le font !
    Réponse
    Merci à vous.
    R. L.

  2. phban dit :

    Autant les soignants sont d’un dévouement et d’un professionnalisme admirables, autant certains médecins « causeurs » font honte à leur profession, avec des déclarations stupéfiantes d’égotisme et d’irresponsabilité.

  3. Laurent Liscia dit :

    Bonnes vacances, Richard ! Même si tu es confiné.

  4. Pierre JOLY dit :

    Merci, et en gardant l’impatience de vous lire…
    Bon repos -pensez à vous
    Pierre
    Réponse
    Un mot qui me va droit au coeur. Bonnes vacances, M. Joly.

  5. Tijac dit :

    Bonnes vacances, bien méritées!
    Prenez soin de vous!
    Réponse
    Merci.
    R. L.

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