Majorité peau de chagrin

Barbara Pompili
(Photo AFP)

Les divisions de la majorité porteront-elles un coup fatal à la candidature plus que probable d’Emmanuel Macron à un second mandat présidentiel ? L’apparente sérénité du président semble indiquer que les divisions, les défections de nombre d’élus, le différend avec le MoDem sur le mode de scrutin n’ont pas modifié la stratégie qu’il entend pousser à son terme en 2022.

MACRON a perdu la majorité absolue à l’Assemblée nationale et ne peut engager aucun programme sans le soutien du MoDem de François Bayrou qui, malgré ses exigences, notamment en ce qui concerne l’instauration d’une « dose » de proportionnelle, ne lui a jamais ménagé son soutien. Les plus récents sujets de polémique (la décision de la mairie de Lyon de supprimer la viande dans les cantines scolaires, le débat virulent sur l’université qui, selon la ministre Frédérique Vidal, serait « gangrenée » par l’islamo-gauchisme) ont déclenché des querelles plus virulentes entre l’aile droite et l’aile gauche de la majorité République en marche que dans les partis d’opposition. La ministre de l’Environnement, Barbara Pompili, qui tire une partie de ses convictions de la « bible » écologiste, se dresse avec aplomb contre l’Élysée. Dans ces conditions, sur quelles troupes dévouées le président sortant peut-il compter pour obtenir son second mandat ?

« L’imposteur ».

Les anti-macronistes historiques affirment l’avoir toujours prévu : le fossé séparant la droite de la gauche n’a pas été comblé par le « en même temps ». Macron n’a pas fusionné les deux courants en un seul ; il a été conduit, sous l’autorité d’Édouard Philippe, à pratiquer bien plus une politique de droite qu’un programme de gauche ; il a remplacé M. Philippe par Jean Castex, connu pour ses convictions conservatrices. La droite classique en vient à dire que tout ce que les macronistes ont à faire, c’est rejoindre les Républicains. Mais ce pourrait être l’inverse et, oui, une majorité présidentielle réunissant les marcheurs, LR,  le MoDem et l’UDI ferait un malheur. Sauf que LR considère Macron comme un imposteur, élu sur un programme et qui en aurait appliqué un autre, un homme de synthèse incapable de l’appliquer et qu’il est du niveau d’une personnalité politique amie des banques et des riches.

Lui d’abord, les autres le rejoindront.

Cette analyse est superficielle : elle ne tient aucun compte de ce qui a fait le sel des conservateurs depuis 60 ans, « la rencontre d’un peuple avec son chef ». M. Macron en est si convaincu qu’il envisage déjà d’aller à la bataille en se réclamant de son seul camp, celui qu’il a créé, qui est certes en désarroi, dont quelques troupes pensent à retourner au bercail écologiste ou socialiste ou gaulliste, mais qui se créera de nouveau entre les deux tours autour de son nom. En fait, il ne pense pas à faire autre chose l’an prochain que ce qu’il a fait en 2017 et qui lui a si bien réussi. Il a été élu président avant de trouver une forte majorité, qui lui eût suffi sans même l’appui du MoDem. Songera-t-il cependant, pour garder le soutien de François Bayrou et de ses affidés, à faire un geste en direction de la proportionnelle ? On verra bien. Mais une chose est sûre : il ne voit pas l’élection présidentielle comme le résultat d’une bataille d’appareils et il croit davantage à son magnétisme personnel. Se trompe-t-il ? Pas si l’on admet que sa cote de popularité, située à 50 %, la meilleure pour un président de la Vè République à ce moment de son premier mandat, confirme son point de vue.

Le mandat le plus difficile.

C’est un défi digne du personnage, même s’il résulte du mandat le plus difficile (réformes, grèves, pandémie, crise nationale) qu’un président ait dû accomplir. Nombre de ses revers sont dûs à une communication exécrable, à des choix malheureux, à l’ignorance de son prochain qui existe chez cet intellectuel de haut vol. Tôt ou tard, on fera le bilan de son mandat, mais si le travail est fait en toute objectivité, il montrera sans aucun doute qu’aucun des personnages qui briguent la présidence ne pourra dire qu’il aurait fait mieux que Macron en toute circonstance. Personne n’a vraiment prévu la crise des gilets jaunes et encore moins la pandémie. Mais peu de chefs d’État se seraient dressés contre elles avec la même vigueur. On sait d’ailleurs que des homologues étrangers du président français ont failli devant une tâche accablante. Et, au fond, que sait-on de la versatilité de l’électorat ? Ce n’est pas la première fois que je suis amené à écrire que Macron n’est riche que de la pluralité des candidatures, du scepticisme que la plupart inspirent, du manque de crédibilité de certaines propositions, de l’incompétence flagrante de l’extrême droite. Trop tôt pour un pronostic? Bien sûr…

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Majorité peau de chagrin

  1. D.S. dit :

    Si j’ai bien compris les gros titres de Libération, de nombreux électeurs de gauche, préfèreraient la victoire de Marine Le Pen à celle d’Emmanuel Macron. On préfère donc saborder le bateau plutôt que le céder à l’ennemi, ou alors casser le jouet plutôt qu’un autre s’en empare. Poutine et Trump ont peut être raison, la démocratie a ses limites…

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