Xavier Bertrand candidat

Xavier Bertrand
(Photo AFP)

Dans un entretien avec « le Point », Xavier Bertrand, ancien ministre de la Santé de Jacques Chirac,  et président de la région Hauts-de-France, a officialisé sa candidature à la présidentielle.

CE N’EST PAS une surprise dans la mesure où c’est la quatrième fois que M. Bertrand se déclare candidat. N’étant plus chez les Républicains, il récuse à l’avance toute primaire et veut se présenter en tant que candidat libre qui s’intéresse aux autres couleurs du spectre idéologique.

Il a pour lui plusieurs atouts : c’est un modéré, un homme qui a su prendre ses distances avec l’exagération et la boursouflure, ces nouveaux modes de l’expression politique ; il a peaufiné son discours et apparaît comme une alternative crédible aux offres politiques actuelles. Cependant, il n’a pas de martingale, pas de recette pour combattre les maux de la société française, depuis la pandémie jusqu’aux inégalités. Il se situe dans une zone qui n’est délibérément ni à gauche ni à droite. De fait, il ressemble à un Macron-bis, c’est-à-dire un homme qui compte plus sur son talent personnel et sur son pouvoir de persuasion que sur la définition du cap idéologique.

Un caméléon de la politique.

Un homme pour toutes les saisons, en quelque sorte, un caméléon de la politique. Sa candidature a été accueillie par les quolibets de l’extrême droite et de l’extrême gauche, sans compter ceux de la gauche, qui rappellent opportunément que M. Bertrand est candidat aussi aux régionales et que,  en se déclarant disponible pour la présidentielle, il livre un message à l’électeur des Hauts-de-France, région dont il est président. Le message suivant : « Je ne ferai que passer ».

Sa double candidature correspond en réalité à une forme de courage et Xavier Bertrand n’en manque pas, lui qui a choisi de se battre en solo. Il a lui-même conditionné sa campagne présidentielle au renouvellement de son mandat dans les Hauts-de-France. S’il perdait cette première bataille, il ne livrerait pas la seconde. Les modérés du pays seraient donc vaincus deux fois, la première avec la victoire du Rassemblement national dans les Hauts-de-France, la seconde avec le retrait d’un candidat peut-être capable d’offrir, au cas où Emmanuel Macron ne franchissait pas le cap du premier tour, l’indispensable alternative à Marine Le Pen. Enfin, le sénateur Bruno Retailleau, a annoncé aujourd’hui que la primaire des Républicains aurait bien lieu, « même si M. Bertrand n’en veut pas ».

Une tâche herculéenne.

Il y a loin entre le projet et sa réalisation et, d’une certaine manière, les choix successifs de Xavier Bertrand compliquent une tâche qui, de toute façon, aurait été herculéenne. Pour le moment, les sondages ne lui accordent guère le crédit, en nombre de primo-électeurs, qui lui assurerait de reléguer Macron à la troisième place. Il ne veut pas rentrer dans le rang de la droite, mais il durcit ses intentions sur la sécurité et le terrorisme, s’adressant de la sorte à la droite mais aussi aux réactionnaires.

La mauvaise humeur de son parti d’origine, figé dans la frustration et les manœuvres d’appareil, le prive du soutien immédiat d’un cinquième de l’électorat, celui qui a voté pour François Fillon au premier tour en 2017 et qu’il ne récupèrera pas dès lors que LR  proposera un autre candidat. Après quoi, M. Bertrand, soumis au syndrome général qui affecte les partis d’opposition, minimise les capacités du président sortant, celui-là même dont il imite les méthodes, en se présentant hors du parti et en comptant sur son seul pouvoir d’attraction. Et c’est lui qu’il veut battre ?

Méthode Coué. 

Xavier Bertrand est assez intelligent pour comprendre que sa candidature en 2022 ne lui permet pas d’être désigné, mais qu’elle lui donnera une stature pour le tournoi suivant. Cependant, le nombre de candidats de la droite en 2027, avec Bruno Le Maire, Édouard Philippe et d’autres, sera pléthorique et comptera surtout des hommes avec une expérience de gouvernement largement supérieure à la sienne. Je crois qu’il y a, dans cette manière généralisée de négliger Macron, une forme de désespoir et de méthode Coué. Macron ne saurait être exclu, alors on fait comme s’il l’était, comme s’il avait eu un mandat si catastrophique qu’il en deviendrait inéligible.

Ceux qui ne veulent pas d’un troisième match entre la droite et l’extrême droite et sont prêts, pour l’empêcher, de voter pour un « perdant naturel », commettent l’erreur d’oublier la formidable élasticité du président sortant. Personne ne se pose la question : si Macron a, malgré ses déboires, une cote de popularité que n’avaient pas ses prédécesseurs à la même époque, que se passera–t-il si la campagne vaccinale se termine avant la fin de l’année par l’immunisation collective et un rebond de la croissance ? Il n’est pas si périlleux de faire cette prédiction. En tout cas, les jeux ne sont pas faits.

RICHARD LISCIA 

 

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Une réponse à Xavier Bertrand candidat

  1. Doriel Pebin dit :

    Merci pour cette bonne analyse. Si les intentions de vote montrent à nouveau Le Pen versus Macron, c’est que c’est le souhait actuel et répété d’une majorité. Ce sont les autres (les moins bien classés) qui trouvent cela affligeant. Au lieu de concentrer leurs tirs sur le seul Macron (et curieusement très rarement sur Le Pen), ils feraient mieux de proposer un programme qui tienne la route, pragmatique et non dogmatique et en tenant compte que la France est majoritairement à droite. Continuez à analyser.

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