Le masque philosémite

Sans masque
(Photo AFP)

La mairie écologiste de Strasbourg a adopté dans la nuit de lundi à mardi un texte qui n’applique qu’en partie celui de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’holocauste (IHRA) sous le prétexte qu’il demeure essentiel de protéger la liberté d’expression  et donc celle de critiquer la politique du gouvernement israélien.

ADOPTÉ après des débats houleux par une majorité de 46 sur 65 sièges, le texte est un modèle d’hypocrisie. Il ne tient pas compte de la croissance des violences et des insultes antisémites en France et tente de trouver une voie moyenne grâce à laquelle juifs et antisémites trouveraient leur zone de confort. Quoi de plus démocratique en effet que de pouvoir juger la politique d’un gouvernement, fût-ce celui d’Israël, si on estime qu’il ne fait pas la part belle aux Palestiniens ?

Il se trouve cependant que l’antisémitisme est une forme de racisme absolu qui ne peut être sincèrement combattue que par une riposte absolue. Or, dans cette affaire, on part de loin. La mairie de Strasbourg, en effet, avait accordé une subvention de 2,5 millions d’euros à la construction d’une nouvelle mosquée parrainée par une association turque, Milli Görüs, ce qui a produit un tollé suffisant pour qu’elle y renonce. Le 22 mars le refus de la maire, Jeanne Barseghian, d’adopter le texte de l’IHRA provoque la colère d’une partie de l’opinion strasbourgeoise qui se traduit par deux mois de discussions houleuses.

Un soupçon d’islamo-gauchisme.

On comprend donc que la conquête par les écologistes de la ville de Strasbourg n’a pas seulement bénéficié à l’environnement, mais que, comme dans le reste du pays, l’écologie abrite une forme d’extrême gauchisme et même d’islamo-gauchisme qui n’a rien à voir avec le réchauffement climatique mais tout à voir avec les manifestations où des éléments subversifs crient « Mort aux juifs ! » à proximité des synagogues. Si l’idéologie n’avait pas noyé la réflexion de Mme Barseghian et ses amis dans la défense, coûte que coûte, des droits, certes inaliénables, des Palestiniens, les Strasbourgeois n’en seraient pas à se demander si on ne les traîne pas dans un labyrinthe de concepts qui les conduit lentement vers l’antisémitisme. En tout cas, l’islamo-gauchisme voudrait avoir droit de cité, il pourrait aujourd’hui affirmer qu’il l’a conquis dans celle de Strasbourg.

Appeler un antisémite par son nom.

L’opposition REM et LR a tout fait pour atténuer les conséquences de la motion dont Jeanne Barseghian a avalisé le texte, lequel ne reprend donc pas celui de l’IHRA, mais écarte tout de même « le refus du droit à l’autodétermination des juifs en affirmant par exemple que l’existence d’Israël est le fruit d’une entreprise raciste ». Encore heureux ! Ainsi, la belle ville de Strasbourg aura mis 73 ans pour reconnaître l’État hébreu, mais au prix d’une liberté qui permet à n’importe quel antisémite de le traîner dans la boue et à n’importe quel islamiste de commettre des attentats. Mais pour être certaine de défendre les droits des Palestiniens, la majorité du conseil municipal a ajouté la nuance qu’elle croit indispensable : « La liberté d’expression et la critique politique de tout gouvernement, y compris Israël, sont des droits inaliénables ». 

Un parti de gouvernement ?

On se demandera, par parenthèses, si toutes les villes du monde sont tenues de prendre position sur le texte de l’IHRA, ce qui ne semble pas évident. On se demandera si appeler un chat un chat et un antisémite un antisémite requiert un effort surhumain. On se demandera pourquoi il fallait un conseil municipal à majorité Verte pour arriver à un résultat aussi minable. On suppose vaguement que la stratégie de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS) contre Israël n’est qu’une forme de lutte en faveur des droits des Palestiniens et non une forme d’exclusion qu’aucun démocrate ne peut accepter. Les Verts rétorqueront sans doute, mais pas tous heureusement, qu’ils forment un parti politique et même de gouvernement bientôt consacré par les urnes. On verra bien.

Une mascarade.

On ne manquera pas de se poser aussi la question des tâches que doit accomplir une mairie et si tant de jours et d’énergie étaient nécessaires à cette mascarade. Je dis mascarade parce que les Verts ont inventé le masque anti-antisémite que permet de l’être sans l’être tout en l’étant. La perceptible vérité qui ressort des affres strasbourgeoises, c’est que l’agenda des Verts va bien au-delà des préoccupations environnementales et qu’ils ne craignent pas de nous emmener dans un voyage souvent sans retour : celui de l’intolérance, celle-là même que Mme Barseghian préfère au simple slogan que serait : « Halte à l’antisémitisme ! ». Y compris sous la forme « noble » de l’anti-sionisme.

RICHARD LISCIA

 

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6 réponses à Le masque philosémite

  1. Michel de Guibert dit :

    Beaucoup de confusions…
    Relire Pierre-André Taguieff !

  2. Phban dit :

    Une fois de plus, les élus écologistes se montrent sectaires et aveugles, un pas de plus dans l’ignominie étant cette fois franchi, de l’antisémitisme pour satisfaire les islamo-gauchistes.

  3. Num dit :

    Et nos chers commentateurs de la vie politique (ainsi que notre ministre de l’Intérieur) nous expliquent à longueur de journée que le danger en France vient de l’extrême-droite. Il est temps de réviser le logiciel politique et de le mettre à jour avec la version XXIe siècle : le racisme, l’antisémitisme, la violence, le totalitaire sont passés du côté de l’extrême gauche. Ouvrons les yeux, on en a des exemples tous les jours.

    • Alain ANDREY dit :

      Si une partie de ceux qui se définissent à l' »extrème-gauche », voire simplement « à gauche » expriment violence, sectarisme, autoritarisme, antisémitisme, racisme (ce qui n’est pas vraiment neuf, et oui vraiment Staline est exemplaire), ces « opinions et attitudes » n’ont pour autant jamais déserté les rangs de l' »extrème-droite », voire de la « droite » tout court.

  4. tapas92 dit :

    Et pourtant, avec les origines de Mme la maire Barseghian, arménienne dont les grands parents ont été victimes des violences des Turcs (si j’en crois Wikipedia), on aurait pu croire que la tolérance aurait été de mise pour elle. Les génocides n’ont pas tous le même goôt ?

  5. BERCEZ dit :

    Israël est un État-Nation.
    C’est une démocratie. Comme toute nation elle s’est construite dans des luttes. C’est un pays qui est en guerre avec des fractions armées de type gouvernemental ou de type organisation terroriste.
    Est-ce le rôle d’une organisation en gestion d’une cité de prendre parti à des débats religieux ou de politiques extérieures voire de débats philosophiques en les soumettant au vote ? L’écologie est une science. Si elle devient un dogme, alors elle perd de son impartialité « laïque » en politique donc en « gestion des affaires de la cité ».

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