Lafayette, nous voici !

Deux couples en goguette
(Photo AFP)

Le voyage de Joe Biden en Europe a pour unique objectif de renouer les liens des États-Unis avec l’Europe et l’Otan à l’occasion de la réunion du G7, même si Boris Johnson essaie d’en faire un événement strictement bi-latéral.

LE PLUS important dans cette rencontre, c’est la personnalité même du président américain. Il a effacé, par son action politique, l’influence néfaste de Donald Trump qui considérait l’Europe comme « pire » que la Chine. Avant même de poser le pied en Grande-Bretagne, il a parlé d’une alliance des démocraties contre les régimes autoritaires. C’est le grand retour de l’Amérique dans le giron vertueux des démocraties parlementaires. Cela ne signifie pas que M. Biden pourrait sacrifier ses intérêts nationaux aux contrats commerciaux et militaires qui le lient à l’Europe et ce serait naïveté que manifester sa déception à ce propos. Le mouvement centrifuge qui, depuis Barack Obama, éloigne l’Amérique de ses alliés n’est pas seulement l’affaire de son président et de son tempérament. Il résulte de facteurs puissants, comme la lassitude à l’égard de conflits qui coûtent affreusement cher en hommes et en dollars. On constate l’irréversibilité de ce mouvement dans le départ des troupes américains de l’Afghanistan où un peuple de bonne volonté ne mérite pas d’ère sacrifié à la barbarie des Talibans.

Mollesse européenne.

Mais inversement, les Européens n’ont jamais vraiment voulu prendre leur destin en mains. L’Allemagne, notamment, immense puissance économique, mais nain politique et militaire. De son côté, la France, très engagée au Sahel, annonce qu’elle change en profondeur la nature de l’opération anti-terroriste Barkhane, qu’elle va retirer sans doute la majeure partie de ses troupes, lesquelles seront remplacées par des soldats des opérations spéciales. La ministre des Armées, Florence Parly, affirme que ce changement d’approche ne diminuera pas l’efficacité des opérations dans le Sahel, mais nul n’est dupe : ou bien les pays du Sahel prennent leur responsabilité et se battent avec la même rigueur que les Français, ou bien ils finiront par déposer les armes. Du coup, l’ambition d’Emmanuel Macron, éliminer les factions djihadistes du Sahel pour assurer la sécurité de la région mais aussi de l’Europe, est oubliée. Le projet d’un jour est remplacé par un autre, beaucoup moins ambitieux et, à terme, catastrophique.

Biden est une chance.

La célébration de l’amitié euro-américaine reste néanmoins un moment optimiste. Elle signale l’effacement du trumpisme, certes toujours vivace et prêt à rependre le pouvoir par tous les moyens, y compris la fraude.  Mais il faut tirer avantage du moment présent pour faire du bloc atlantique un bouclier contre la démagogie et la « réalité alternative ». Ce sera certes difficile, pour les Européens, d’adopter une ligne approuvée par les 27 pays représentés au sein de l’UE. Il demeure que la présence de Joe Biden au sommet du G7 contient sa propre énergie cinétique. Ce que nous célébrons, c’est ce miracle politique qui a remplacé Trump par Biden. Nous ne nous féliciterons jamais assez d’avoir pour interlocuteur non plus un adversaire  acharné, pétri de cynisme et de vulgarité, mais un président décent capable de se placer au-dessus de la mêlée et incapable de gouverner uniquement avec des tweets.

La fièvre retombe.

L’année 2021, marquée par la pandémie, n’aura pas été la plus heureuse. Mais l’humanité a produit en un temps record des vaccins efficaces et le virus recule, ce qui permet d’espérer une résorption du chômage et un rebond de la croissance. Dans les événements positifs qui se sont produits, il faut accorder une mention spéciale à la victoire électorale de Joe Biden, qui a permis au monde de pousser une soupir de soulagement. La folie qui habite les très nombreux partisans de Trump est un des facteurs de la violence qui règne aux États-Unis. La « bête immonde » n’est pas morte. Trump a perdu avec un record du nombre d’électeurs ayant voté pour lui. D’un autre côté, Biden est impavide. Il n’élève pas la voix, il a rendu la vie politique à la dignité, il n’est jamais perturbé par un ennemi grossier et tonitruant. Quoi qu’on en dise, la fièvre du monde retombe.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Lafayette, nous voici !

  1. Laurent Liscia dit :

    La fièvre en effet retombe. Quant à l’isolationnisme américain, il succède à un demi-siècle d’interventionnisme. La vague continuera à refluer, independamment des présidents en place. Sauf si le chantier du changement de climat prend toute l’importance qu’il mérite.

  2. Doriel Pebin dit :

    La crise du COVID nous a appris (enfin pour ceux qui sont dans l’analyse et le rationnel et non dans l’émotionnel ou la communication) l’humilité. Les pays ou responsables politiques qui ont pu se gargariser de leur succès (type Johnson, Modi …) sont actuellement dans la difficulté après s’être pavanés. Après avoir critiqué à boulets rouges l’Europe, on ne peut que constater que la campagne de vaccination se déroule correctement avec des populations beaucoup plus vaccinées que la Russie ou la Chine par exemple. C’est l’Europe qui va fournir à l’Afrique et au monde des vaccins de bonne qualité et en nombre. Il faut aussi souligner que la qualité des vaccins « occidentaux » » ne porte pas à discussion à l’inverse des vaccins chinois et russes. Les Russes aux mêmes se méfient de leur vaccin d’où un taux de 11 % de vaccinés. La majorité des vaccins se fabriquent en Occident malgré les campagnes de propagande chinoises et russes. Il serait temps que nos médias présentent cette vérité et fassent eux-mêmes preuve d’humilité et de pertinence. Les valeurs montantes autoritaires si chères à Mme Le Pen et au RN/FN mériteraient d’être mieux analysées. Il est curieux de constater l’absence quasi-totale de critiques les visant, les tirs se concentrant pratiquement exclusivement sur M. macron.

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