Le verdict du GIEC

Cette année à Saintes
(Photo AFP)

Publié hier, le rapport du GIEC a fait l’effet d’une bombe : jamais le Groupe d’experts environnementaux sur le climat n’a été aussi alarmiste. Mais comment peut-on être surpris de ce message ? Il confirme ce que nous voyons tous les jours à la télévision.

LE RAPPORT ne peut être négligé par l’opinion mondiale ni sous le prétexte que les qualités des femmes et hommes qui l’ont rédigé seraient insuffisantes ni au nom d’un contenu qui sèmerait délibérément l’épouvante. Trois ans de travail, 234 auteurs, 66 pages d’un document qui n’est en fait que le premier des trois volets qu’il contiendra en définitive, à la veille de la réunion de la COP 26, laquelle se réunira à Glasgow dans trois mois. Il s’appuie en outre sur 14 000 références scientifiques.

Oui, disent les auteurs, les activités humaines sont à l’origine du réchauffement climatique, avec un recul généralisé des glaciers et une montée inéluctable des mers, dont la température augmente jusqu’à 700 mètres de profondeur. La chaleur planétaire a augmenté de 1,1 degré centigrade entre 1850-1900 et aujourd’hui. Oui, toutes les régions du monde sont concernées. Mais non, tout n’est pas complètement perdu si l’humanité parvient à réduire de 1,5 degré C le réchauffement d’ici à 2100.

Il suffit d’observer.

Pourquoi faut-il, comme pour la pandémie de Covid-19, réunir tous les arguments scientifiques, toutes les connaissances des spécialistes, toute la bonne volonté du monde pour persuader l’opinion qu’elle court un risque réel de disparition si elle ne prend pas son destin en main ? Il suffirait qu’elle regarde, dans les journaux télévisés, ces inondations subites qui arrachent les maisons de leurs fondations et emportent les automobiles comme fétus de paille ; ou ces incendies qui consomment des forêts entières et ce que les hommes y ont mis imprudemment ; qu’elle écoute les chiffres relatifs aux dégâts ainsi causés ; qu’elle observe la détresse de ceux qui ont tout perdu, leur habitation et leur travail ; qu’elle songe à ces millions d’habitants côtiers que la vague toujours plus haute va chasser de leurs habitations ; qu’elle observe ces éléments déchaînés, comme saisis par la colère divine qui ne se sont jamais  manifestés avant la révolution industrielle.

Une minute, Monsieur le bourreau.

Qu’est-ce que nous attendons ? Que les flammes ou l’eau parviennent jusqu’à la porte de notre demeure ? Que les agriculteurs ruinés ne puissent plus nous nourrir avec les fruits et légumes de leurs terres décapées ? Que nous continuions à réclamer au bourreau, malgré tous les avertissements, une dernière minute de vie ? Nous ne sommes pas les objets sans âme du malheur qui s’abat sur nous. Nous pouvons encore contribuer, par nos efforts, à la décarbonisation, au renoncement à l’énergie fossile, et par un mode de vie plus sobre, moins égoïste, plus ascétique, au freinage du réchauffement.

Mais comme pour l’épidémie, la pire des réactions, c’est le déni, c’est de croire les sirènes qui continuent à nous dire que les humains ne sont pour rien dans la chaleur croissante qui les étreint, qu’il s’agit d’un moment à passer, qu’il y a eu, dans l’histoire géologique du monde, des périodes de glaciation et de réchauffement, alors que la révolution industrielle n’avait pas commencé. Il ne faut pas que le simplisme ait raison du savoir. Et, comme pour la pandémie, le monde ne doit pas réagir en ordre dispersé, il doit s’unir. Il est même condamné à l’union par la gravité du problème, comme il l’a été déjà par la dissuasion nucléaire.

Une seule arme : la solidarité.

Nous appartenons tous à la génération qui a subi les effets du réchauffement. Nous ne pouvons pas les négliger sous le prétexte qu’on peut vivre encore sur cette planète. Nous ne pouvons pas laisser à nos successeurs une Terre-bouilloire, un monde liquéfié, une planète qui grille sous le soleil, nous ne pouvons pas laisser les flammes de l’enfer gagner les contrées du paradis. La planète que nous laisserons dépendra de nous. Nous ne pouvons avoir une progéniture sans lui laisser la moindre chance d’accéder au bonheur. Nous ne pouvons pas laisser naître des enfants d’hommes et de femmes pour les condamner à un tel destin. Contre la malédiction, une seule arme : la solidarité.

RICHARD LISCIA

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5 réponses à Le verdict du GIEC

  1. tapas92 dit :

    Malheureusement, pas de surprise. Depuis les années 80, les prévisions ont prévu ces chiffres. Par exemple pour la température : https://www.carbonbrief.org/analysis-how-well-have-climate-models-projected-global-warming . Et en plus, dans l’intervalle de confiance autour de la moyenne prévue, nous sommes sur les chiffres du haut (les pires). Et tout ça, à cause de notre égoïsme (dont le mien, en premier). Triste jour. Les évènements des 30 prochaines années sont déjà écrites. En revanche, ce que nous pouvons encore changer, c’est la deuxième moitié du siècle. Pour nos petits-enfants. Et c’est maintenant qu’il faut agir.

    • Laurent Liscia dit :

      Très bien vu, hélas … J’aurais même tendance a dire: pour nos enfants, même, car je ne sais pas trop à quoi la société va ressembler d’ici à trente ans.
      « Notre égoisme »: c’est vrai. Nous souhaitons continuer à (trop) bien vivre. Nous faisons partie du problème, certes, mais quels modèles nous propose-t-on? Il faut radicalement repenser les modes de production, fermer les centrales qui polluent le plus, freiner la consommation, etc. Aucun politicien n’aura le courage de remettre en question la création d’emplois, le style de vie et les acquis sociaux. Le salut ne viendra que de la solidarité mondiale autour d’un programme économique douloureux. Autant dire que l’espoir est minime.

  2. Sphynge dit :

    Bien plus alarmant qu’alarmiste !

  3. BUYCK Daniel dit :

    Tapas92 nous dit : « Les évènements des 30 prochaines années sont déjà écrits. En revanche, ce que nous pouvons encore changer, c’est la deuxième moitié du siècle. Pour nos petits-enfants. Et c’est maintenant qu’il faut agir ». Quel optimisme ! La chaudière Terre est lancée depuis des décennies, personne ne pourra l’arrêter en 30 ans, même si toutes les nations y consacraient dès aujourd’hui toutes leurs énergies, ce qui est largement utopique. Et que les écolos de tout poil arrêtent de nous dire « il faut sauver la planète », c’est l’espèce humaine qui est en péril. La planète en a connu d’autres, elle survivra ! A quand un gouvernement mondial ?

    • Honoré SABATIER dit :

      Quel intérêt? Il faudrait s’auto-flageller? Bien sûr que les « écologistes » (encore faudrait-il savoir ce que ce terme englobe) parlent de la planète contenant une humanité. En revanche, votre « prédication » d’une terre qui s’en remettra n’est pas démontré, c’est votre intuition, une planète étuve pourrait le rester pour toujours, et puis, comme le dit Aurélien Barrau, une terre sans humanité n’a aucun intérêt pour nous.

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