Une crise de l’État

Macron et Castex
(Photo AFP)

Loin d’avoir digéré l’escapade de Jean-Michel Blanquer à Ibiza, les partis d’opposition sont décidés à transformer leur colère en blocage des institutions. C’était vraiment la crise dont le pays pouvait faire l’économie dès lors que la position d’Emmanuel Macron est forte et que le procès fait à M. Blanquer devient excessif.

QUAND on est soumis à l’hostilité générale, on s’efforce de prendre des mesures de type consensuel qui ne déclenchent pas des mini-révolutions à chaque instant. Les choix de M. Macron ne sont pas larges. Il ne peut pas limoger son ministre de l’Éducation nationale après en avoir fait le cœur d’une de ses réformes les plus importantes. Le président de la République peut garder M. Blanquer à son service parce qu’il agit et qu’il a déjà donné un sens à sa réforme. Tout le monde sait en outre que le ministre a un accès très aisé à Brigitte Macron.

Une guerre d’usure ?

De leur côté, les partis sont-ils disposés à livrer une guerre d’usure au ministre ? Rien ne montre encore qu’ils affaibliraient le candidat sortant, qui se situe à 25 % au premier tour et a encore des chances de l’emporter sur tous les autres. Il y a une difficulté à pousser cette crise jusqu’à l’hystérie, il y en a une autre pour  lui échapper. La tâche du pouvoir n’est pas simple : faire oublier Ibiza, poursuivre la réforme avec un homme contesté, parler d’autre chose. Les électeurs ne seront pas si complaisants. Les deux tactiques dilatoires en présence sont périlleuses.

Macron n’a plus le temps.

Ce qui joue contre Macron, c’est qu’il ne reste plus beaucoup de temps pour dissiper la colère liée à Ibiza. Le président était à l’aise chaque fois qu’il prononçait un mot de trop, il avait le temps de brouiller les pistes. Ce n’est plus le cas. Il y a des crises qui vous collent à la peau comme des sparadraps. Je remarque que certaines accusations ont plus de poids que d’autres. Prenez le cas de Boris Johnson : il pourrait bien démissionner dans les jours qui viennent, seulement parce qu’il  accumule les soirées de fêtes au point qu’on se demande quand il travaille. Personne ne lui demande des comptes sur ses multiples mensonges et sa gestion incohérente du Brexit. Son côté humoristique, qui lui a valu tant de succès, a fini par lasser ses troupes : c’est au sein de son propre parti qu’il est menacé.

Petits détails.

On ne saurait comparer les deux situations, celle de BoJo et celle de Macron. Mais c’est souvent à propos de petits détails que la colère populaire devient irrépressible. Il est vrai que la personnalité très spéciale de M. Johnson est fortement liée au Brexit et à la  volonté d’un peuple de choisir son destin, comme s’il n’avait de salut pour les Britanniques que s’ils recouvrent entièrement leur liberté. L’enjeu n’est pas aussi grand en France et il n’est pas impossible que l’électorat préfère rayer Ibiza de sa mémoire pour ne pas se laisser tenter par l’extrême droite ou par l’extrême gauche. Mais ce n’est pas sûr. Les conquêtes politiques sont fragiles et Emmanuel Macron pourrait se voir contraint de descendre du piédestal où il est juché depuis quelques mois.

RICHARD LISCIA

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Une réponse à Une crise de l’État

  1. Laurent Liscia dit :

    Quelques mois encore … Il y aura d’autres crises, et sans doute quelques casseroles qui surgiront dans l’entourage de Mme Pécresse.

Répondre à Laurent Liscia Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.