Le prix de la résistance

Zelensky en action
(Photo AFP)

Les Ukrainiens paient chaque jour, depuis un mois, le prix affreusement élevé de leurs actes de résistance. Ce qui conduit un Poutine frustré à augmenter constamment la force des coups qu’il porte à un pays dévasté.

DE SON CÔTÉ, l’armée russe a perdu 10 000 soldats, dont cinq généraux et un amiral, et en a vu 15 000 mis hors d’état de combattre. Les pertes ukrainiennes n’ont pas été chiffrées, mais il est clair que, dans un tel chaos, elles sont très lourdes. Le président Volodymyr Zelensky, transformé en héros historique de la liberté, refuse toute idée de reddition, alors que sa vie personnelle et pis encore, celle de sa femme et de ses enfants, sont en jeu. Tant qu’il aura un souffle, il continuera à s’adresser aux chefs d’État ou de gouvernement occidentaux pour leur demander une aide plus active, en apportant à chacun de ses discours les nuances susceptibles de convaincre ses interlocuteurs. Depuis Churchill, on n’a pas vu un leader national plus courageux, plus habile aussi, plus prêt à faire le sacrifice de sa vie.

Cause sacrée.

Vladimir Poutine a déjà perdu deux fois. Il perd sur le terrain parce que l’Ukraine est trop vaste, apparemment, pour être conquise par l’armée russe, qui rencontre des problèmes d’approvisionnement et de renforts. Il perd parce que, loin de provoquer un recul de l’OTAN et la division de l’Union européenne, il a soudé ces deux grandes organisations internationales comme jamais auparavant. L’OTAN, notamment, est sortie de sa léthargie. Aujourd’hui un sommet atlantique aura lieu en Europe. L’Ukraine est la priorité, l’urgence, la cause sacrée. Destructions et crimes de guerre renforcent les Ukrainiens au lieu de les décourager. Leurs capacités militaires fait sortir Poutine de ses gonds. Il a brandi toutes les menaces possibles, l’arrivée sur le terrain de Tchétchènes et de Syriens, les armes chimiques et biologiques, l’arme nucléaire. Mais les experts indiquent qu’il n’y aucune trace d’armes chimiques sur le terrain.

La défaite de Poutine contient un risque.

Poutine a cru qu’il pouvait s’emparer de la totalité de l’Ukraine comme il a annexé la Crimée : sans coup férir. Il s’est trompé, il paie donc pour son erreur stratégique, mais les Ukrainiens, eux aussi, paient pour sa haine, ses frustrations, ses revers. Il n’est plus question pour lui « d’occuper » l’Ukraine, il n’en a pas les moyens logistiques et, au rythme où les Russes sont tués et blessés, il serait pratiquement privé de son armée. Il ne lui resterait plus alors que ses armes atomiques et, pour éviter une déroute encore plus large, il sera tenté de les utiliser. Il nous plongerait tous dans une nuit nucléaire, ce que le président Zelensky ne veut pas voir, lui qui est si lucide, mais mobilisé uniquement autour de la cause ukrainienne. Et c’est pourquoi, les critiques adressées à la diplomatie macronienne sont à la fois stupides et mesquines : il appartient aux Occidentaux d’empêcher une dérive qui nous conduirait directement vers un conflit atomique sur le sol européen.

Une campagne de mauvaise qualité.

Les Français ne sont pas encore conscients des enjeux de cette guerre entre Slaves. Ils sont plus préoccupés par leur pouvoir d’achat que par les risques immenses d’un affrontement nucléaire. Dans quelques jours, nous allons procéder à des élections générales à quatre tours dans un contexte géopolitique qui n’a jamais été aussi alarmant depuis la Deuxième Guerre mondiale. Il nous faut un pouvoir ferme qui tienne la barre sans trembler et qui assure sans frémir la continuité de l’État français. La guerre en Ukraine place au second rang nos préoccupations électorales, une campagne de mauvaise qualité, des ambitions que la peur générale rend nulles ou sordides. C’est une hallucination collective : chacun des candidats moud son grain comme s’il n’y avait pas autre chose à faire.

Ecoutons notre conscience.

Si Zelensky obsède Poutine, il n’en est pas moins dans toutes têtes occidentales. La façon qu’il a de nous remercier et de nous interpeller à la fois, miroir qui nous renvoie une image dégradée par les arrière-pensées, notamment sur nos intérêts économiques et financiers en Russie, c’est la conscience que nous n’écoutons pas. Il a raison dans l’absolu, quand la mort les menace, lui et son pays. Il nous irrite parce qu’il n’excuse aucun des compromis que souhaiterions faire avec le mal. Il nous rappelle aux vertus que nous sommes en train de perdre, aux principes qui nous régissent, bref à la démocratie qu’il cherche à imiter quand un tzar veut le placer sous son joug. Nous le trouvons terriblement exigeant. C’est pourtant lui qui a raison.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Le prix de la résistance

  1. Laurent Liscia dit :

    Oui, Zelensky a raison.

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