Voter, ou agir contre l’abstention

A voté !
(Photo AFP)

Pour le premier tour de la présidentielle, qui a lieu dimanche, quelque 30 % des électeurs pourraient être tentés de ne pas se rendre aux urnes. Cette attitude, qui constitue un défi à la démocratie, risque de produire un résultat différent de la réalité du rapport de forces politique.

LES ÉLECTEURS qui préfèrent la pêche aux urnes n’ont jamais réfléchi en conscience. L’idée qu’une élection est jouée d’avance est fausse : la campagne a montré que, au dernier moment, un candidat inattendu peut percer. La paresse électorale est une insulte aux libertés dont nous bénéficions et auxquelles tant de peuples n’ont pas accès. La guerre en Ukraine témoigne de l’importance de la liberté pour n’importe quel peuple. Chez nous, en France, il ne faut faire aucun effort pour l’exercer, tout le monde y a accès. Enfin, quel que soit le ou la candidat(e) choisi(e) par les votants, il vaut mieux une élection parfaitement légitime qu’une élection contestée.

Un choix sacré.

Jusqu’à présent, l’élection présidentielle état l’axe de la politique nationale et, pour les Français, c’était presque un devoir sacré de se rendre aux urnes. Aujourd’hui, la participation, en chute libre dans les élections législatives, est devenue un choix laissé à la conscience de chacun. Certes, l’abstention dit quelque chose de la colère ou de la désaffection de l’électorat. Mais il ne faut jamais oublier ce que disait Churchill de la démocratie, « le moins mauvais des systèmes ». Partout dans le monde, des hommes et des femmes meurent pour avoir le droit de vote et pour que leur vote compte. Tous les dictateurs croient qu’il suffit de bien nourrir leurs administrés pour qu’ils se taisent. Tous les modèles montrent au contraire que le pain et les jeux ne suffisent pas aux peuples tant que ceux-ci n’ont pas la liberté.

Le droit de s’opposer.

Je n’essaie pas ici de donner une leçon d’éducation civique et morale.  Une forte participation ne joue pas en faveur d’un candidat particulier, elle leur profite à tous. On dit que Marine Le Pen craint l’abstention, elle a raison. Tout au plus peut-elle espérer que Macron soit victime de la désaffection du public. Mais l’intérêt de la participation est qu’elle est utile à tous les candidats. Le droit de vote fait sortir l’électeur de lui-même, lui accorde un pouvoir à la fois immense et minuscule, expose la vanité de la victoire et la relativité de la défaite. Le principe « un homme, une voix » est la première pierre d’une vaste cathédrale démocratique, il apporte tout à la fois justice, égalité, légitimité. Il soumet le candidat à des lois qui le dépassent. Celui qui tire son pouvoir d’un scrutin équitable acquiert le droit de gouverner et l’électeur, celui de s’opposer.

La démocratie, c’est l’urne.

Ces banalités doivent être rappelées dans un contexte qui a fini par les effacer dans la mémoire collective. Certes, les programmes sont incarnés par des hommes et par des femmes dont on doute, que l’on craint, à qui on ne fait pas, ou très peu, confiance. Mais les candidats sont tous enfermés dans le corset du droit. Il n’y a aucun privilège qu’ils s’arrogeraient une fois élus qui se ne serait pas d’abord voté par les élus. La démocratie, c’est le passage aux urnes répétitif et incessant. En même temps que la présidentielle aboutit au choix d’un homme ou d’une femme pour cinq ans, elle apporte, grâce aux législatives, la garantie que le nouveau président ne peut pas  n’en faire qu’à sa tête. Il y a eu une époque où les jours d’élection étaient une fête. On célébrait non seulement le pouvoir accordé au peuple, mais aussi la certitude que le bulletin dans l’urne était consacré par la liberté. Aujourd’hui, on ne fait plus de cette liberté, pourtant si rare dans le monde, une priorité.

Électeurs, rajeunissez, retrouvez vos âmes d’enfant. Votez pour exprimer la liberté et l’égalité ; votez parce qu’il y a dans le suffrage l’espoir qu’il n’y a pas dans l’abstention ; votez pour qui vous voulez, mais votez.

RICHARD LISCIA

 

 

 

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Une réponse à Voter, ou agir contre l’abstention

  1. Michel de Guibert dit :

    Une autre version de votre citation de Churchill lui fait dire « le pire des systèmes, à l’exclusion de tous les autres », je ne sais laquelle est la plus authentique ?
    Réponse
    Ce n’est pas, de ma part, une citation très originale. Votre version est la bonne, comme toujours, la mienne seulement approximative.
    R. L.

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