Cravate…ou pas

Éric Coquerel décidément sans cravate
(Photo AFP)

La nouvelle Assemblée nationale, avec ses nouveaux élus qui ont apporté un peu de vent frais à l’institution, ne risquait pas d’échapper à la polémique de la semaine, la tenue des élus et notamment le port de la cravate.

LE SUJET ne présenterait aucun intérêt s’il ne recouvrait pas un fonds idéologique. Comme on s’habille, on pense. Des exemples existent de personnages qui cherchent à attirer l’attention du public en venant avec des vêtements plus moins inspirés par le bon goût. Des cas contraires sont restés dans les mémoires, par exemple Cécile Duflot, alors ministre du Logement, vêtue d’une robe à pois et qui fut chahutée par ses collèges masculins.

Provocation.

En conséquence, l’aspect qu’un député se donne est souvent lié à une forme de provocation. Heureusement, le règlement de l’Assemblée ne prévoit pas l’uniforme et Yaël Braun-Pivet, présidente de l’institution, a fait savoir qu’elle n’entendait pas exercer une quelconque police vestimentaire. Elle, au moins, a compris, que riposter par la répression à une forme muette de provocation entacherait notre démocratie.

Un signal.

Il est curieux, et peut-être amusant, que tant de débats aient été consacrés à la tenue des députés. On pourrait y voir une crise de l’adolescence (professionnelle), mais c’est aussi une manière d’annoncer la couleur : la Nupes veut faire savoir qu’elle est à gauche, ce dont personne ne doute, et le RN, dont l’élégance discrète a été décidée par Marine Le Pen, tient à rappeler qu’il est dé-diabolisé. Mais il faut plus qu’une cravate pour changer de réputation. La vraie question concerne les raisons pour lesquelles une allure débraillée a été choisie par un certain nombre de députés.

Les raisons de fond.

Ces raisons sont de l’ordre psychologique mais aussi idéologiques. Bien que la Nupes réunisse 150 députés, elle n’est pas à l’aise dans le carcan des règlements de l’Assemblée et elle tient à indiquer qu’elle ne fait qu’un passage distrait dans les institutions de la Vè République, qu’elle veut abattre. Les tenues bigarrées sont donc un moyen de contestation.  C’est ce qui est inadmissible. En attendant le passage à la VIe République, les Insoumis devraient se plier aux traditions de la Vè. Ce n’est pas en ôtant leur cravate qu’ils y parviendront mais par la force de persuasion à laquelle les Français, dans leur majorité, ne sont pas encore sensibles.

Du smoking à l’uniforme.

On rejoint là le rapport existant entre les vêtements et la discipline. L’uniforme à l’école, dans quelques pays, est le signe d’une obéissance absolue des enfants aux adultes. Dans ce cas de figure, on n’est pas loin d’enrégimenter une enfance qui a besoin de liberté pour s’épanouir. À l’autre bout du spectre, on verrait mal des militaires se promener en smoking ou en habitués des réceptions mondaines. Preuve qu’il y a une limites aux meilleures idées et que, à force de vouloir se distinguer, on finit pas tomber dans une forme de déclassement.

Calvaire ?

C’est d’ailleurs une sorte de marginalisation délibérée. On défend les pauvres, donc on leur ressemble ; ce serait plus généreux de partager son salaire avec eux. On est mandaté pour leur obtenir quelques avantages supplémentaires, alors on joue au pauvre. Un piquet de grève devant les portes fermées d’une usine est bien plus convaincant. Je lis qu’Éric Coquerel, membre de LFI, a tenté de mettre une cravate un jour et l’a ôtée le lendemain. Cela signifie qu’il est habitué depuis longtemps à son statut et que la cravate lui est franchement intolérable. Il ne faut pas non plus que la recherche de la respectabilité devienne un calvaire.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Cravate…ou pas

  1. Doriel Pebin dit :

    Merci de rappeler que chez certains (notamment LFI et RN), la forme peut prédominer sur le fond. Cela augure bien de leur 6e république tant souhaitée ! Curieux de constater que cette 5e république abhorrée et soi-disant antidémocratique leur ait permis d’avoir des groupes parlementaires significatifs. Il est vrai qu’ils voient « leur » réalité et non pas telle qu’elle l’est ! Il faut savoir penser contre soi-même.

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