La politique du dépit

Mahmoud Abbas à Berlin
(Photo AFP)

Âgé de 87 ans, le président de l’Autorité palestinienne, qui est en ce moment à Berlin, a dénoncé « l’holocauste » commis par les Israéliens dans les territoires occupés, la politique d' »apartheid » menée par le gouvernement israélien et les massacres dont sont victimes les Palestiniens.

ON SERAIT surpris par de tels propos si le président de l’Autorité palestinienne ne les avait déjà exprimés. Considéré comme le seul représentant du peuple palestinien avec qui un accord de paix serait possible, il a préféré indiquer son dépit extrême et rallier les irrédentistes qui pullulent dans son camp. Du coup, voilà qu’il se livre au révisionnisme historique et à une dénonciation calomnieuse d’Israël comme s’il voulait refermer la porte, toujours ouverte mais jamais franchie, des négociations avec Jérusalem.

Surenchère.

On devine que le président palestinien entend ne pas céder un pouce aux factions palestiniennes qui font de la surenchère ; il est habitué depuis plusieurs années à la stagnation politique. Il n’a pas organisé d’élections et exerce donc son mandat dans l’illégalité. Il est révolté par la politique américaine, par les méthodes israéliennes et, bien sûr, il comprend mal le rapprochement d’Israël avec un certain nombre de pays arabes. Le choix des mots qu’il utilise n’est pas innocent. Il se contente de rejoindre les extrémistes, même s’il sait que sa démarche enterre tout espoir de paix négociée.

Immobilisme israélien.

Mahmoud Abbas a donc de bonnes raisons de se plaindre. Il n’est pas responsable de l’immobilisme israélien. Il voit la portion de territoire qui lui a été confiée rétrécir comme une peau de chagrin, l’absence de progrès diplomatique n’empêchant nullement la progression des colons dans les zones censées dépendre de l’Autorité palestinienne. Il lui suffisait de dénoncer un grave déséquilibre entre l’esprit de conquête des Israéliens et la portion chaque année plus congrue dont disposent les Palestiniens.

Un roitelet intolérant.

De sorte que les propos prononcés à Berlin signent le désespoir d’un homme politique capable de faire la paix avec Israël mais qui, n’y croyant plus, se transforme, au moins au niveau verbal, en roitelet intolérant. Non content d’oublier toutes les règles, il veut qu’on le compte désormais parmi les pires extrémistes du Hamas ou du Djihad islamique. Il est vrai qu’il abandonne un  créneau où personne ne souhaite le remplacer. Il est vrai que, de leur côté, les Israéliens sont incapables, depuis vingt ans, de relancer les négociations. Il est vrai que le peuple juif d’Israël semble avoir renoncé à la paix et estime désormais qu’il ne s’en porte pas plus mal, d’autant que l’État hébreu a renoué avec l’Egypte et le Maroc et a trouvé de nouveaux amis dans le Golfe.

Accords d’Abraham.

M. Abbas n’aurait pas été installé dans une voie de garage s’il avait continué à exiger une négociation avec Israël, sans rejoindre la faible cohorte des révisionnistes. Il lutte contre le Hamas en écrasant sa propre légitimité, rendue nulle par son incapacité à procéder à des élections générales. Certes, le sort qui lui a été fait pas les Occidentaux est injuste. Certes, Israël continue, malgré les sommations de l’ONU, sa politique expansionniste et refuse encore de faire une offre aux Palestiniens, en croyant résoudre une crise congénitale par les accords d’Abraham : voulus et obtenus par Donald Trump, ceux-ci consacrent la détente entre Israéliens et quelques États arabes, sans se prononcer pour autant sur le sort des Palestiniens.

Rien de bon ne sortira du statu quo ni des amalgames honteux de M. Abbas. La solution ne dépend pas que des Palestiniens, mais se poser en ennemi d’Israël rend impossible tout rapprochement. C’est à Mahmoud Abbas de décider enfin qu’il a fait son temps et que les Palestiniens ont besoin d’un homme nouveau qui sera efficace s’il rassure Israël.

RICHARD LISCIA

 

 

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2 réponses à La politique du dépit

  1. Laurent Liscia dit :

    Ces amalgames sont honteux. L’immobilisme israélien, notamment face à l’irrédentisme des colons, ne l’est pas moins.

  2. Alan dit :

    Entre Abbas et le Hamas, l’accord de paix ne fait que s’éloigner. Qui dialoguerait dans ces conditions ? Il faudrait être fou. Et les Israéliens ne le sont pas, ils se défendent, car personne ne le fera à leur place.

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