Un moment décisif

Macron et Bayrou : amis malgré tout
(Photo AFP)

Le problème posé à l’exécutif en pleine rentrée est à la fois sérieux et complexe et ne se résume pas du tout à l’application ou non de l’article 49/3 de la Constitution qui permettrait à Emmanuel Macron de faire adopter sans vote la réforme des retraites.

MÊME la majorité relative n’est pas l’obstacle le plus élevé. Le premier mandat du président n’a empêché ni une vive progression du Rassemblement national ni la formation d’une coalition de gauche qui, loin de souhaiter de collaborer avec l’exécutif, espère un séisme institutionnel susceptible de lui offrir une chance de gouverner. La seule question qui compte aujourd’hui, c’est la capacité du pouvoir de légiférer avec le concours des centristes ou, plus exactement, tous ceux, parmi les élus, qui ne reconnaissent ni dans l’extrême gauche ni dans l’extrême droite.

Une vision claire.

Il faut du courage pour faire ce choix et surtout une vision claire de l’avenir immédiat. M. Macron n’est indispensable que s’il continue fermement sur la voie qu’il a tracée. Il n’est pas irremplaçable, puisque l’on peut compter une bonne dizaine de prétendants valables. Mais il l’est dans la mesure où il a gagné les élections, y compris les législatives. On ne le voit pas reculer devant l’obstacle, dissoudre l’Assemblée et laisser un Édouard Philippe ou un Bruno Le Maire emporter la mise.

À la recherche de compromis.

Il va donc redoubler d’autorité et les hypothèses les plus hâtives ont été largement décrites, du recours au 49/3 à des élections anticipées. « Le Monde » daté de mercredi publie une vaste enquête où 12 000 de nos concitoyens répondaient aux questions d’Ipsos. Il ressort de ce sondage que les Français ont sincèrement souhaité que le président ouvre un dialogue au fond sur tous les sujets avec les syndicats et l’opposition, qu’il fasse des concessions et que des compromis soient conclus.

Le dialogue n’a pas fonctionné.

Ce sondage montre d’abord qu’Emmanuel Macron n’est pas rejeté par l’opinion, qui reste cohérente avec le vote du second tour de la présidentielle. Mais les mois écoulés depuis sa réélection indiquent largement que le dialogue ne fonctionne pas. Inutile de désigner le coupable. Le président veut lier son nom aux grandes réformes, les oppositions et les syndicats ne lui feront pas de cadeau. Or, dans le même sondage, les personnes interrogées veulent que Jean-Luc Mélenchon soit le premier à se réformer lui-même et abandonne son radicalisme systématique et vénéneux.

Guérilla stérile.

Cela veut dire sans doute qu’ils ne souhaitent pas changer la Constitution dont Macron est le rempart, par fonction et par volonté. La France insoumise et, à un degré moindre, le RN livrent à l’exécutif une guérilla permanente qui reste totalement stérile. Ce n’est pas qu’ils ne seraient pas réformistes, c’est qu’ils ne veulent pas des réformes proposées par Macron. Pourtant, on ne changera pas ce pays dans la joie et l’apaisement. Les accouchements sont en général douloureux. Et si on ne comprend pas pourquoi il faut travailler plus longtemps pour équilibrer les régimes de retraite, c’est qu’on ne veut pas d’un instrument unique pour faire ces économies dont nous avons tellement besoin.

La démarche de Bayrou.

Emmanuel Macron a pas mal de choses à se faire pardonner, son autorité quelque peu excessive, ses échecs, son tri des dossiers, les tâches qui l’exaltent et d’autres qu’il oublie, mais il travaille sans cacher ses intentions et agit sans masque. Je viens de rappeler qu’il n’a empêché ni l’ascension de l’extrême gauche ni celle du RN. Cependant,  dans la configuration qui nous est offerte, il est le seul à pouvoir les vaincre. Il est intéressant que François Bayrou (MoDem) se fasse le chevalier du dialogue tous azimuts, mais sa démarche semble ignorer les menaces qui pèsent sur la société française.

La France, ce refuge.

Plus que jamais, la France, dans cette Europe tourmentée, apparaît comme une sorte de refuge, de pays préservé et confortable, malgré les restrictions d’énergie et le risque d’une extension de la guerre en Ukraine. Il existe un fossé béant entre les interprétations des extrêmes et la réalité française d’aujourd’hui. Les Mélenchon et Marine Le Pen croient que Macron n’est plus ce qu’il fut, qu’il a perdu les élections alors qu’il les a gagnées brillamment, et que c’est un has been. C’est faux, bien sûr, et d’ici au début de l’année prochaine, on va assister à une bataille sans précédent.

Il importe de ne pas oublier les résultats des élections législatives et présidentielle de 2022 : Macron a battu tous ses adversaires, a été réélu, et il dispose d’une majorité, même si elle est relative. Il ne s’agit pas exactement d’une Berezina. Sa volonté de moderniser la France n’est pas différente de ce qu’ont fait les pays voisins. Dans tous les pays de l’OCDE, l’âge de la retraite a été repoussé. On ne voit pas au nom de quel privilège nous ne pouvons pas faire ce que font nos partenaires.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Un moment décisif

  1. Doriel Pebin dit :

    Bonjour, le moment est venu de vérifier si les Français se comporteront comme des « adulescents » centrés sur leur petit monde et leurs intérêts particuliers (individuels ou collectifs) ou comme des adultes conscients des nombreux enjeux et soucieux du bien-être et de l’avenir de leur descendance et de l’intérêt général. Il est encore temps. Continuez à le répéter inlassablement pour que les minoritaires n’imposent pas leur vision.

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