La droite se cherche

Éric Ciotti
(Photo AFP)

Au cours du week end dernier, trois partis se sont donné un  nouveau chef : Marine Tondelier pour les Verts, Manuel Bompard pour LFI et Éric Ciotti pour les Républicains. Ces trois élections ne modifient guère l’aspect du paysage politique.

ÂGÉS tous les deux de 36 ans, Mme Tondelier et M. Bompard apportent au moins leur jeunesse à leurs partis. S’ils ont été élus sans difficultés, ils ne mettent pas un terme aux déchirements de leurs deux formations. M. Bompard, en particulier, a obtenu son poste dans le contexte de l’affaire Quatennens, du nom du député LFI poursuivi pour avoir giflé son épouse et, comme alternative à M. Quatennens, il n’a guère convaincu Clémentine Autain et d’autres membres influents de la France insoumise.

L’élection d’Éric Ciotti.

L’élection la plus politique est celle d’Éric Ciotti qui l’a emporté au second tour contre Bruno Retailleau, qui vient du Sénat, où LR occupe une position dominante. M. Ciotti ne fait mystère ni de ses intentions ni de ses convictions. Défait, avant les élections par Valérie Pécresse, il peut exciper de la lourde déroute de sa rivale. Au sein de LR, sa victoire du week end apparaît comme le triomphe de la droite de la droite. M. Ciotti, en outre, ne cache pas qu’il roule pour Laurent Wauquiez, président de la région Rhône-Auvergne. Comme le dit un Républicain, « nous avons élu le directeur de campagne de Laurent Wauquiez ».

L’influence de François Fillon.

Ce n’est pas suffisant pour que LR se garantisse un avenir. M. Ciotti représente la tendance la plus à droite du parti. Il a dit avant le second tour de la présidentielle qu’il voterait pour Éric Zemmour s’il ne trouvait pas de meilleur choix. Il fait partie de la meute qui aboie en permanence contre la caravane gouvernementale. Il prétend apporter, en matière de sécurité et d’immigration, des solutions radicales mais peut-être pas fondées sur l’humanisme. Il appartient à ce groupe de LR qui continue à s’inspirer de l’ancien Premier ministre François Fillon, qui croit dur comme fer que Macron a volé ses suffrages à LR et que la seule chose qui compte, c’est une victoire contre le président de la République.

On ne « vole » pas des électeurs.

Il n’est pas du tout certain que les électeurs qui ont déserté LR pour rejoindre soit Macron soit l’extrême droite souhaitent aujourd’hui le retour du fillonisme. D’abord, on ne s’appuie pas sur le souvenir d’un homme politique qui a eu des démêlés avec la justice, qui a fait son temps et aurait engagé, s’il avait pu, une réforme des retraites encore plus  drastique que celle du chef de l’État. Il est cncore moins certain que la meilleure façon de lutter contre l’extrême droite soit d’appliquer son programme. Les électeurs n’appartenant à personne, personne n’est en mesure de les « voler ». Voilà pourquoi la victoire de M. Ciotti représente une désastre pour la droite. Il tire un plan sur la comète, avec un contenu fort imprécis et comme si, en quatre ans, il n’y aura pas des événements susceptibles de contrecarrer son projet.

Un canard boiteux.

Tout au plus peut-on le louer pour sa modestie puisqu’il a décidé de ne pas se présenter à la présidentielle en 2027. Mais le principal reproche qu’on peut lui faire, c’est de s’inscrire dans une ligne qui a déjà produit quelques échecs parce que LR imite l’extrême droite au lieu d’écrire une feuille de route réaliste. La défaite de Valérie Pécresse ne dit qu’une chose : les électeurs de droite ont vu quelque chose de plus rassurant en Macron que dans la personnalité de la présidente de la région Île-de-France, bousculée par les surenchères internes. On est dans un univers où, décidément, aucun parti, sauf celui de Macron, ne commet de bévues. À gauche ou à droite, ils ont tous le triomphalisme facile : ils n’ont pas le pouvoir, ils n’empêchent pas le gouvernement de gouverner, mais ils présentent le président de la République comme un canard boiteux. Pourquoi ? Parce qu’il a été réélu !

RICHARD LISCIA

 

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6 réponses à La droite se cherche

  1. Jean Vilanova dit :

    A l’instar du PS, LR est un parti en perdition. Aucune idée, aucun talent, aucun souffle. Ce pauvre parti va, pantelant, à son implosion. Le centre macroniste et l’extrême droite se partageront – se partagent déjà – ses restes.
    Faut-il le pleurer ?
    Au cours des dernières présidentielles, Valérie Pécresse a été le bien triste révélateur de la débâcle après Bismuth, Fillon et tant d’autres avant eux. La pauvre ne savait plus où elle habitait, candidate lamentable d’une campagne lamentable (ici encore, comme son alter ego de gauche, Anne Hidalgo), quasiment obligée de faire la manche après son résultat calamiteux.
    Et pour Wauquiez, on repassera. Le père Noël avec sa hotte pleine de cadeaux n’existe que pour les enfants.
    Voir et entendre ces pauvres gens se revendiquer du général de Gaulle me navre. Ils sont au gaullisme ce que chanter sous sa douche est à un opéra de Mozart.
    Pour ma part, j’ai toujours perçu le gaullisme, d’abord comme une attitude, une fierté, une exigence avec ce qui peut aussi être perçu par ses adversaires comme une forme d’arrogance. J’accepte la critique.
    Mais j’ai profondément aimé Charles de Gaulle, un peu comme Romain Gary l’aimait aussi. Et je sais que le gaullisme est mort avec lui, un après-midi de novembre 1970.

    • Dominique S. dit :

      Merci pour cet excellent pamphlet. J’ai toujours pensé qu’avant les idées politiques, il y avait les hommes, leurs personnalité et leurs charisme. Le seul coupable de la descente aux enfers de LR et du PS, c’est Macron ! A partir de 2027, on rebat les cartes et on repart à zéro.
      Réponse
      L’excellent pamphlet dit autre chose que ce que vous avez compris.
      R. L.

  2. Dominique S dit :

    Merci de votre réponse, mais je maintiens mon interprétation. Sans Macron, le président de la république actuel serait LR. Je n’ai aucune idée de qui cela pourrait être, mais je suis sûr qu’il ne serait ni RN, ni PS, et encore moins LFI. On peut continuer à jouer aux hypothèses non réalisées. Sans Macron, Fillon serait passé, malgré ses casseroles et encore plus facilement sans ses casseroles. Et il aurait eu de bonnes chances d’être réélu, surtout sans ses casseroles.
    Réponse
    Mais les casseroles ont bien existé et c’est pourquoi il ne sera jamais président. Je ne soulève aucune hypothèse : le président prochain ne sera pas LR, à cause de Fillon. LR ne l’emportera un jour que si ce parti rejoint Macron.
    R. L.

  3. Dominique S. dit :

    J’ai repensé cette nuit à notre petit jeu de politique fiction. Soyons clair: sans Macron, Fillon aurait bien été élu en 2017, malgré le Pénélope Gate. Et connaissant la ténacité dont il a fait preuve, un dissident LR aurait eu beaucoup de mal à prendre sa place en 2022. Même Edouard Philippe et Bruno Lemaire n’auraient pas, sans Macron, la stature qu’ils ont aujourd’hui. Et si son quinquennat s’était passé aussi bien (ou aussi mal) que celui de Macron, Fillon avait toutes ses chances d’être réélu. Il aurait bien sûr rendu des comptes à la justice plus tard, quand son immunité aurait pris fin. Mais sans Macron, vous n’auriez pas écrit aujourd’hui « La droite se cherche ».

    Réponse
    Macron n’a été élu en 2017 qu’à cause du Pénélope-gate.
    R. L.

  4. mathieu dit :

    Il y avait bien, en 2016/2017, un amalgame des deux candidats opposés tout au long de ce ping pong de politique fiction; c’était du 80 % Macron/20 % Fillon: il s’appelait Alain Juppé! Au 5 mars 2017, fort de 800 signatures de maires… qu’il n’avait jamais sollicitées, le sondage express réalisé le jour du meeting Fillon « du Trocadéro », donnait un Juppé largement en tête au 1er tour (27% d’intentions de vote)… le lendemain pourtant, depuis l’Hôtel de Ville de Bordeaux, le « non-candidat », personnalité politique préférée des Français deux années durant, jetait définitivement l’éponge. Un certain Macron a repris – avec talent – son programme, son positionnement (majoritaire dans le pays après l’échec de Hollande), et son grand réservoir de voix, si patiemment accumulé. Le vrai héritage gaulliste, s’il y en a un, est aujourd’hui à l’Elysée!

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