La rentrée de tous les désordres

Arnaud Montebourg
(Photo AFP)

En cette période de fin de vacances, les Français souhaitent peut-être ne pas entrer trop vite dans les soucis d’une année qui s’annonce très difficile. Ils observent avec incrédulité l’agitation d’une classe politique qui semble agir comme si elle se croyait encore en campagne.

ARNAUD MONTEBOURG, ministre du Redressement productif, a déclaré dimanche sur BFM-TV que « la filière nucléaire est une filière d’avenir ». Ses propos sont en contradiction avec les engagements de François Hollande qui prévoient à long terme une réduction de la production d’électricité d’origine nucléaire au profit du développement des filières respectueuses de l’environnement comme l’éolien ou le solaire. On ne sait pas si le ministre exprimait un point de vue personnel ou s’il amorçait un virage voulu par le président de la République. On sait en revanche que ses propos ont déclenché une très vive polémique avec les Verts.

Il y a deux choses à dire à ce sujet : la première est que la France a besoin d’une politique de l’énergie claire et ferme et que, pour le moment, elle en est privée. Non seulement il est temps de savoir si nous pouvons nous passer du nucléaire, mais nous devons réexaminer la question des gaz de schistes, balayée d’un trait de plume par le gouvernement précédent. Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a confirmé que la méthode de la fracturation hydraulique de la roche pour en extirper le gaz est abandonnée. Ce qui laisse entendre que, si une autre méthode est applicable, il ne ferait pas la sourde oreille. Les objections des écologistes ne sont, n’ont jamais été, dérisoires ou négligeables. Ils ont raison dans l’absolu, mais pendant que nous nous privons de nos sources d’énergie, des pays comme le Canada ou les États-Unis en font baisser le prix, deviennent autosuffisants en gaz et même exportateurs. Alors que le prix du pétrole ne cesse d’augmenter et que, face aux pays producteurs, nos demeurons pieds et poings liés.

À feu nourri.

Le deuxième élément de réflexion, c’est la relation que le pouvoir entretient avec la gauche de la gauche et les Verts. Les dissensions apparaissent clairement depuis quelques jours. Ceux qui ne participent pas au gouvernement, comme Jean-Luc Mélenchon, tirent à feu nourri contre lui ; ceux qui y participent, comme les écologistes et l’aile gauche du PS, feignent d’appliquer la discipline gouvernementale sans cacher leur très vive mauvaise humeur. Le Premier ministre ne peut pas accepter, par exemple, que Benoît Hamon et ses amis, votent contre le traité européen ; et il l’a fait savoir. Jusqu’où la dissidence peut-elle aller ?  On serait tenté de dire que les trublions seront en définitive ramenés au pas, mais leurs critiques sont nourries par des convictions qu’ils ne sauraient mettre sous le boisseau. Dans le feu de l’action, dans le maelström de la crise, les tensions entre les différentes composantes de la gauche au pouvoir se sont aggravées.

Elles risquent de compliquer la tâche de François Hollande alors que ses réflexes sont lents. Il a d’autant plus de mal à trancher que « les terribles pépins de la réalité » le conduisent, peu à peu, à modifier ses engagements. Qui peut dire aujourd’hui quelle politique de l’énergie le chef de l’État va mettre en oeuvre ? Qui se contentera de la baisse de quelques centimes sur le prix de l’essence ? Qui peut dire comment il va boucler le budget de 2013 ? Qui a compris ce qu’il entend faire pour les Roms dont Manuel Valls continue à démolir les bicoques pendant que le gouvernement prévoit de leur donner accès au travail et au logement ? Qui croit que le pacte européen de croissance va créer beaucoup d’emplois ? Qui n’est agacé par un discours uniquement axé sur l’héritage sarkozyste censé expliquer ou excuser l’impuissance gouvernementale ?

Ce qui ne signifie pas que l’opposition soit dans un meilleur état, qui se divise entre partisans de Copé et de Fillon, mais montre que les tenants de la « République exemplaire », naguère portés par un enthousiasme électoral peu conforme à la difficulté de la tâche à accomplir, commencent enfin à se poser la bonne question : la résolution des problèmes nationaux ne passe pas forcément par le démantèlement des réformes de M. Sarkozy, mais plutôt par des choix pragmatiques, adaptés à la dureté des temps nouveaux.

RICHARD LISCIA

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