La menace du remaniement

Un Hollande agacé
(Photo AFP)

François Hollande ne sait pas quand il procèdera à un remaniement gouvernemental, mais, pour la première fois, il en annonce l’éventualité dans un entretien avec Paris-Match. Il s’est hâté, dans la journée d’hier, de corriger le tir en déclarant que le remaniement n’était pas d’actualité. Ce n’est pas un jeu à somme nulle. Il a évoqué le sujet, semble-t-il, pour lancer un avertissement aux ministres qui l’agacent le plus et parce que, de toutes façons, un remaniement se produira tôt ou tard.

IL Y A quelque chose d’un peu incohérent à mentionner un sujet pour dire, un peu après, qu’il n’est pas d’actualité. C’est le président lui-même qui a donné une sorte de coup d’envoi au remaniement gouvernemental, lequel n’était plus évoqué par les médias. On voudrait dire qu’il n’est pas imminent, qu’il est utile seulement s’il correspond à une nouvelle ligne politique, que tout dépend du maintien ou non de Jean-Marc Ayrault à Matignon.  M. Hollande devra mettre un terme à une cacophonie de déclarations contradictoires qu’il a lui-même encouragée dès lors qu’il n’a jamais voulu la sanctionner. Mais en même temps, on se demande si une allusion vaguement menaçante (« aucun ministre n’est protégé ou immunisé ») vaut une analyse aussi méticuleuse. Pour notre part, nous estimons que le chef de l’État qui, conformément à son caractère, n’a pas vraiment envie de changer de gouvernement dans une période aussi critique, exige surtout que ses ministres rentrent dans le rang.

Montebourg au centre du débat.

Cela ne veut pas dire qu’il condamne certaines déclarations et pas d’autres. Il est possible qu’Arnaud Montebourg lui porte sur les nerfs, mais il ne l’a pas désavoué. Lors de l’affaire de Dailymotion, le président semble surtout en avoir voulu à Pierre Moscovici parce que celui-ci s’est hâté de dire que M. Montebourg avait agi seul, sans concertation avec lui. Les discordances sonores du gouvernement expriment surtout la cohabitation d’idéologies incompatibles. M. Hollande a sa propre ligne, mais il essaie de faire croire qu’il n’est pas moins à gauche que M. Mélenchon. C’est pourquoi il n’a pas limogé M. Montebourg.

Un remaniement, au contraire, servirait à imposer la discipline à tous les ministres, ce qui implique qu’une voie claire serait tracée et qu’aucun membre du gouvernement ne pourrait s’en écarter. Il n’y aurait plus de ministre-alibi. Pour cela, il faudra d’abord avoir choisi entre le socialisme, le social-libéralisme ou le libéralisme. De quoi se créer des inimitiés irréversibles et de fracturer la gauche. On n’est pas certain que le président Hollande soit décidé à procéder à cette clarification, à faire un choix courageux qui aggraverait les tensions au sein de son camp ; ou au contraire les atténuerait au prix d’une orientation socio-économique dangereuse pour l’indispensable redressement. Mais, bien entendu, le chef de l’État peut nous surprendre, comme il l’a fait au sujet du Mali, et s’engager dans une action pragmatique qui serait viable seulement si elle est accompagnée d’une forte dose d’autoritarisme. Car il lui faudra alors se dresser contre les menées de la gauche du PS, des Verts, des communistes et, surtout, de Jean-Luc Mélenchon.

Un fusil à un coup.

Enfin, le remaniement est un fusil à un coup. S’il est tiré avant les municipales, il ne pourra pas servir après. Comme il est peu probable, en outre, que M. Ayrault s’en aille dans l’immédiat, il prendrait la forme d’un resserrement de l’équipe gouvernementale, actuellement pléthorique et caractérisée par la présence de ministres qui font parler d’eux tout le temps et de ministres que personne ne connaît et dont on se demande ce qu’ils font. En diminuant les effectifs, on réduira les propos dissonants. Mais, encore une fois, il faut que toutes les actions soient convergentes, afin d’éviter le fiasco de Florange ou l’affaire de Dailymotion. M. Hollande doit soigneusement distinguer entre le remaniement cosmétique et le renforcement de sa politique.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à La menace du remaniement

  1. Chambouleyron dit :

    Cher Monsieur Liscia,
    Merci de vos explications sur l’homo politicus hollande. C’est un jeu de rôle en sommes. Mais vous le précédez et j’ai peur d’un changement de pied ou d’un croc en jambe.

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