Sur le racisme ordinaire

Gilles Bourdouleix
(AFP)

Confronté à une invasion de gens du voyage, le député -maire de Cholet, Gilles Bourdouleix (UDI), s’est demandé à haute voix si « Hitler n’en a pas tué assez ». Son propos a été enregistré par un journaliste du « Courrier de l’Ouest », mais il affirme qu’il a été cité hors du contexte. Piètre défense qui conduit l’UDI, le parti de Jean-Louis Borloo, à le suspendre, sinon à l’exclure.

CE N’EST PAS  la première fois que Tziganes, Roms ou gens du voyage s’affrontent à des maires exaspérés par leur indifférence aux lois et règlements. Au début du mois, le maire de Nice, Christian Estrosi, voulait les « mater ». À Cholet, M. Bourdouleix a la nostalgie des méthodes nazies. Le problème n’est ni simple ni négligeable : on peut comprendre qu’un maire qui voit débouler 150 caravanes sur un terrain protégé finisse par se fâcher. Mais, d’une part, les gens du voyage ne sont restés à Cholet qu’une journée, de sorte qu’un peu de patience eût suffi à éviter un incident qui se transforme en scandale national ; et, d’autre part, les propos qu’il a tenus, même s’ils sont sortis de leur contexte, ce qui n’est guère prouvé, témoignent d’une mentalité inquiétante.

Idéologie morbide.

Car il y a des mots qui tuent. Des mots qui, s’ils sortent d’une bouche, expriment des pensées soigneusement cachées jusque là par respect pour le politiquement correct. Ils ne peuvent être prononcées, sous le coup de l’émotion, que si la digue de la bienséance cède, révélant une idéologie morbide. Bref, les mots ne sont jamais neutres. Certains les disent, d’autres pas, parce qu’ils sont incapables d’avoir les idées qui correspondent à ces mots. En ce sens, M. Bourdouleix, qui menace d’entraîner avec lui le CNIP, le parti auquel il appartient, s’il est exclu de l’UDI, semble incorrigible : il n’entend pas faire amende honorable.

Il est facile de comparer l’affaire de Cholet à celle de Trappes : dans les deux cas, c’est la loi républicaine qui est battue en brèche, ici par le port du voile intégral, rigoureusement interdit par la loi, là par des déclarations nostalgiques du nazisme, tout aussi illégales. D’aucuns seront perplexes : on accuse une minorité à Trappes, on en défend une autre à Cholet. Non, on ne nie pas le problème posé par le nomadisme dans un pays où toute la population est sédentaire. Mais la loi est la meilleure des boussoles, une loi votée par une majorité parlementaire, non la loi scélérate d’un régime monstrueux livré au génocide. M. Bourdouleix s’est contenté d’annoncer tout haut, sous l’effet de l’exaspération, ce secret misérable que sa mauvaise conscience n’a cessé d’entretenir et dont il se serait protégé s’il avait réfléchi un peu. S’il avait réprimé sa petite dérive personnelle pour ne pas courir le risque qu’elle jaillisse subitement de sa bouche, détruisant du même coup sa carrière d’élu.

RICHARD LISCIA

 

 

 

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3 réponses à Sur le racisme ordinaire

  1. A3ro dit :

    Ayant entendu l’enregistrement en question, il semble que ces propos relèvent plus de la tentative d’humour de mauvais goût en aparté que du lapsus révélateur. Ce d’autant que ce maire avait été apparemment copieusement comparé à Hitler par les gens du voyage qui lui faisaient face. Cela ressemble finalement assez au « Quand il y en a un, ça va, c’est quand il y en a plusieurs que ça pose problème » de Brice Hortefeux, point Godwin en moins.
    Après, il est sûr qu’entendre de tels propos dans la bouche d’un élu de la République est inacceptable, d’autant plus qu’il refuse de s’en excuser platement. Mais ne nous servons pas de cette histoire pour faire diversion et oublier les problèmes que peuvent poser les Roms.

  2. LESOEURS dit :

    Dans nos pays pas encore républiques bananières (mais il s’en faut parfois de peu sur certains sujets) ou islamistes la loi doit être appliquée aussi bien pour le port du niqab à Trappes (certaines converties à l’Islam se gaussent d’avoir 20 contraventions) que pour l’occupation illégale de terrains. Dura lex sed lex. Le rappel du cadre et de la règle sociale devrait suffire au delà de toute autre considération. Si la loi oblige les maires à aménager des aires pour les nomades, elle doit être respectée et les nomades doivent respecter les terrains, payer leurs charges et laisser les lieux propres. La loi et du bon sens civique : cela évitera les mots déplacés.

  3. Philharmonic dit :

    Un élu exaspéré par les provocations de ces « pauvres » déshérités qui ont choisi une vie qui leur convient au volant, entre autres, de voitures que beaucoup ne pourraient se payer, narguant, cherchant les histoires, dévastant sur leur passage, assénant des « Heil Hitler » et des saluts nazis (vu sur les vidéos et enregistrements), et ne se préoccupant absolument pas une seconde des pékins qui ne vivent pas comme eux aux crochets d’une société qui rame pour leur payer leurs « droits », un élu donc lâche une mauvaise plaisanterie face à ces provocateurs qui savent bien où appuyer pour que les bien pensants et amateurs de langue de bois s’offusquent.
    Et le pays s’indigne…
    Quelle pauvre époque et pauvre société noyée dans la langue de bois. Ils l’ont bien compris ces nomades. Il fut un temps où on se contentait de rentrer les poules et de leur laisser rempailler les chaises.

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