Le Maire s’en sort bien

L’homme qui monte
(Photo AFP)

En recueillant 29,2 % des suffrages des militants de l’UMP, Bruno Le Maire a clairement fait une percée dont la conséquence immédiate est le relatif affaiblissement de Nicolas Sarkozy qui, malgré son score élevé, 64,5 %, n’a pas obtenu le plébiscite auquel il prétendait. Il devinait pourtant, en observant la qualité de la campagne de son jeune rival, qu’il devrait renoncer au césarisme. Dès l’annonce des résultats, l’ancien président s’est contenté de souligner sa victoire, qui est incontestable. Mais il sait déjà qu’il devra, au sein de l’UMP, composer avec une tendance du parti, incarnée par MM. Juppé et Le Maire, qui représente une forte minorité.

M. SARKOZY sait exactement ce qu’il va faire de sa victoire. Elle lui sert de marche-pied vers ce second mandat que lui a arraché François Hollande, mais sur le chemin duquel il commence à trouver de multiples dissidents dans son propre camp. Quant à M. Le Maire, il vient de prendre date : le nouveau président de l’UMP devra tenir compte de ce qu’il a à dire. Il est d’ailleurs probable que la convergence d’idées entre MM. Juppé et Le Maire produira une alliance, toute vouée à barrer la route à un homme qui ne fait plus l’unanimité de la droite classique.

Bernadette le lui avait dit.

Alors que, au Front national, Marine Le Pen vient de se faire réélire présidente avec 100 % des voix, la comparaison n’est pas à l’avantage de M. Sarkozy, et pas seulement pour des raisons numériques : le sentiment national sera, dès aujourd’hui, que, décidément, M. Sarkozy n’est plus ce qu’il était. Bernadette Chirac le lui avait bien dit : un ex-président ne va pas dans cette galère partisane, mais M. Sarkozy avait-il le choix ? S’il n’était pas sorti de sa tanière pendant encore dix-huit mois ou deux ans, il aurait vu la France changer, des talents émerger et la remise en cause de son action passée, et, plus encore, de son bilan enfler comme un ballon à l’instant d’exploser, sans qu’il eût la possibilité de trouver la parade à de telles agressions. Dimanche, il a vaincu ses deux adversaires, (M. Mariton a obtenu 6,3 % des voix), mais il a aussi confirmé l’existence au sein de l’UMP d’un fort courant en faveur d’une stratégie diamétralement opposée à la sienne au sujet du rassemblement des forces de droite.

Là où le courant est le plus rapide.

Rien n’empêche Nicolas Sarkozy, sinon son tempérament, de faire la part des choses, de comprendre les concessions à faire, de rejoindre au moins partiellement les idées présentées par Alain Juppé. Mais ce n’est pas ce que veulent ceux qui l’ont forcé à prononcer le mot d’abrogation (de la loi Taubira sur le mariage homosexuel) lors d’une réunion  de Sens commun. Son instinct est d’aller là où le courant semble plus rapide. M. Sarkozy est tellement obsédé par l’objectif qu’il en a oublié de préparer sa campagne et d’élaborer un programme un peu plus substantiel que celui qu’il a présenté. On dira, devant tant de réflexions négatives, que je ne ménage guère M. Sarkozy. Après tout, c’est lui qui a gagné, n’est-ce pas ? Après tout, il a fait deux fois le score de M. Le Maire. Mais je n’encense pas M. Le Maire, bien qu’il n’ait pas du tout démérité. Je devine, comme tout le monde d’ailleurs, les fragilités de la victoire incontestable de M. Sarkozy.

Son plus grand ennemi, c’est le temps. Il a perdu une partie de ce charisme qui lui a permis de triompher en 2007. Il a laissé le temps aux gens de se demander s’il mérite son second mandat. Il a été banalisé par la multiplication des candidatures, trois à la présidence de l’UMP, on ne sait combien à l’investiture du parti pour la présidence de la République. Son vrai problème, c’est que s’il y a eu dans sa victoire de 2007 quelque chose de ressenti comme inévitable par de très nombreux électeurs, aujourd’hui ils sont aussi nombreux à se demander : mais pourquoi faudrait-il l’élire ? Qu’est-ce qu’il a de plus qu’un autre, lui qui, au fond, nous a déçus ? En somme tout lasse, tout passe. Observez Marine Le Pen et son triomphe. Oui, mais ne doit-elle pas s’inquiéter de l’irrésistible ascension de Marion Maréchal-Le Pen, encore plus à droite qu’elle si c’est possible ?  Le peuple dévore ses leaders, dont la longévité politique est courte.

RICHARD LISCIA

 

 

 

 

 

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