Migrants : le non-choix

Merkel  : tort et raison (Photo AFP)

Merkel : tort et raison
(Photo AFP)

L’Europe va mal. Elle est divisée, incapable de trouver un accord susceptible de normaliser la crise de l’immigration. Même l’Allemagne semble désorientée, qui a annoncé qu’elle accueillerait 800 000 migrants pour fermer ses portes quelques jours plus tard.

BIEN ENTENDU, le désordre, la confusion, les querelles que soulève la crise profitent aux partis politiques extrêmes, qui voient dans l’affaiblissement d’une Union déjà très endommagée par la crise grecque la justification de leurs mises en garde : tous nos maux viendraient d’un projet européen qui se disloque. Ils préconisent la fermeture de nos frontières, la suppression des accords de Schengen et le retour aux souverainetés nationales. Ce ne sont pas des remèdes. Supposons que les Européens tombent à ce niveau d’ignominie face à la détresse humaine : ils n’empêcheraient pas les immigrés de venir par centaines de milliers sur nos côtes. Il est absurde de croire que cet exode puisse être interrompu par des mesures coercitives, quand on voit ces foules qui attaquent les barrages hongrois, ces Africains qui font crouler sous leur poids les barrières de Ceuta et Melilla, leur recherche de routes nouvelles vers le nord, ces hommes, femmes et enfants qui ont donné leur dernier sou pour faire le voyage. Le cynisme n’est pas la solution, l’égoïsme ne résoudra pas le problème, l’indifférence n’empêchera pas ces masses humaines d’enfoncer nos portes.

L’idée de Merkel.

On peut certes reprocher à Angela Merkel d’avoir changé d’avis après avoir ouvert les frontières de son pays aux réfugiés. Mais, face à l’obstination cruelle de ces pays européens qui ont rejoint l’Union pour en partager les avantages, mais pas les contraintes, elle a d’abord voulu donner l’exemple, rappeler le socle de principes sur lequel l’UE est bâtie, souligné que l’Europe n’est pas seulement une zone de libre-échange. Elle n’a jamais dit que l’absorption des migrants serait instantanée et a dû prendre des mesures pour tarir un flot qui débordait les services d’accueil allemands. L’expérience montre donc que nous devons, par tous les moyens dont nous disposons, recevoir ceux qui sont à nos portes et, tout en même temps, décourager ceux qui veulent quitter leur pays. La suspension ou la révision des accords de Schengen semblent des idées en contradiction avec ces principes. Ce ne sont pourtant que des voies réalistes. La politique ne sera jamais que l’art du possible. Nous prendrons notre part de la misère du monde, mais pas plus.

Mésaventure allemande.

Peut-être ne fallait-il pas porter Angela Merkel aux nues, comme l’a fait la presse mondiale, pour ensuite la critiquer. La chancelière peut commettre des erreurs. Elle en a commis une énorme quand elle a décidé de mettre un terme à son énergie nucléaire au lendemain de Fukushima, pour aussitôt se lancer dans les centrales à charbon, tout simplement parce que les énergies renouvelables n’étaient pas prêtes à prendre le relais des centrales atomiques qu’elle voulait fermer à toute vitesse. Ce qui est incroyable, dans cette gestion des affaires européennes, c’est l’absence constante de pragmatisme. L’Allemagne, qui a su si bien adapter son économie à la mondialisation et nous donne tous les jours des leçons à ce sujet, s’est lancée dans une terrible mésaventure énergétique. De la même manière, on continue, dans la France des partis, à préconiser des solutions radicales pour la crise migratoire qui n’ont rien à voir avec la réalité.
Le jeu politique a conduit les socialistes à montrer que, à l’occasion de la crise, Marine Le Pen nous a démontré qu’elle n’était guère différente de son père, celui-la même qu’elle veut expulser du Front national. C’est vrai. Et nous sommes nombreux à ne pas être dupes des palinodies du Front, de l’eau qu’il aurait mis dans son vin sous l’influence de Florian Philippot, et nous ne le croyons pas plus fréquentable aujourd’hui qu’il le fut naguère. Mais le pire, en l’occurrence, c’est que lorsque des centaines de milliers de migrants arrivent par milliers, la solution du Front, l’expulsion, est impraticable. Mme Le Pen serait au pouvoir qu’elle serait bien impuissante. Elle fermerait nos frontières, mais elles sont des passoires. Elle recruterait des policiers et des gardes-frontières, ce ne serait pas suffisant. Elle n’aurait plus le choix qu’entre les laisser mourir et quitter le pouvoir ou les accueillir, comme un vulgaire gouvernement de droite ou de gauche.

RICHARD LISCIA

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