Comptes : tout va bien

Un tableau idyllique (Photo AFP)

Un tableau idyllique
(Photo AFP)

La ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, a présenté ce matin un tableau idyllique des comptes de la Sécurité sociale. Elle affirme avoir réduit les déficits de 40 % en trois ans et entend ramener à 10 milliards en 2016 le déficit de l’ensemble des régimes.

ON A DU MAL à comprendre un optimisme que les analyses de la Cour des comptes ne partagent guère. Des mesures ont certes été prises pour réduire le déficit du régime des allocations familiales, passé de 1,6 milliard en 2014 à 1 milliard cette année (au prix d’une réduction des versements). L’assurance-maladie, pour sa part, a fait une rechute : son déficit a augmenté de près d’un milliard d’une année sur l’autre. Il y a, il est vrai, une embellie pour le fonds social vieillesse, qui sera, nous dit la ministre, en léger excédent en 2016, pour la première fois en quinze ans. Mais elle ne tient pas compte du très fort déficit des caisses complémentaires de retraite, pour lequel aucune solution n’a été trouvée à ce jour alors qu’il faut plusieurs milliards d’euros pour le renflouer.

Une communication radieuse.

Le gouvernement tient à nous faire savoir qu’il agit sur tous les fronts et qu’il continue à réduire la dépense publique tout en diminuant les impôts. Des informations, diffusées ce matin, par France Info, font état d’une reprise de l’embauche pour les emplois par intérim. Le chiffre du chômage pour août sera publié ce soir, il pourrait être moins défavorable que d’habitude. Toutes les éléments d’appréciation livrés par les pouvoirs publics sont assortis d’une communication radieuse, y compris la vente des fameux Mistral à l’Égypte qui permettrait à l’État de se sortir de ce guêpier sans qu’il lui en coûte un centime, ce qui reste à vérifier.
La réforme Ayrault des retraites a certes donné des résultats en donnant un coup d’arrêt à une dérive des comptes inquiétante avec l’obligation, pour la plupart des salariés, de cotiser pendant quarante ans, ce qui, objectivement, retarde le départ à la retraite dans de nombreux cas. Pour renforcer durablement le régime vieillesse, il eût été préférable d’adopter franchement un départ à 63 ans au moins. L’amélioration des comptes citée par Mme Touraine n’est que temporaire. Pour les cadres, le patronat demande une hausse des cotisations des actifs, exigence vivement rejetée par les syndicats. Il demeure que, même si le déficit des régimes complémentaires n’entre pas dans celui de l’État, il est très préoccupant, alors qu’une réforme des retraites plus profonde aurait soulagé les caisses des régimes privés.

Un climat plutôt lourd.

Pour l’assurance maladie, la perspective d’une économie supplémentaire de 3 milliards nous semble hors de portée. La ministre est déjà en conflit avec les professions de santé et elle ne peut atteindre son objectif qu’au prix d’une crise sociale. Enfin, le gouvernement n’a pas fait, dans le vaste domaine des dépenses sociales, un effort comparable à celui qu’il réclame aux collectivités locales, dont les élus s’insurgent contre la réduction des dotations. Privés de ressources, déjà engagés dans des coupes budgétaires qui affaiblissent les économies locales, ils s’indignent de ce que la charge de la réduction de la dépense publique soit proportionnellement plus lourde pour eux que pour la sécurité sociale. On trouve donc, dans l’exposé de Mme Touraine, quelques vérités relatives aux chiffres, mais le contexte général des économies crée un climat social et politique plutôt lourd que le gouvernement ne parvient guère à dissiper.

RICHARD LISCIA

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