Sur la semaine de 32 heures

Martinez au congrès de la CGT (Photo AFP)

Martinez au congrès de la CGT
(Photo AFP)

L’indignation populaire contre la réforme du code du travail a non seulement coûté au gouvernement ce qu’il lui restait de crédibilité mais a donné lieu à des idées de plus en plus radicales qui représentent autant d’instruments pour couler l’économie. Parmi ces idées, celle de raccourcir un peu plus la semaine de travail. La CGT, réunie en congrès, propose une vieille rengaine, portée par quelques intellectuels et économistes, la semaine de 32 heures.

PERSONNE n’a voulu comprendre que les créations d’emplois liées à la réduction du temps de travail, quelque 350 000 immédiatement après l’adoption des 35 heures, sont un phénomène éphémère. Après quoi, l’économie française a pratiquement cessé de produire des emplois pendant une quinzaine d’années. Pour une raison simple : si vous diminuez le temps de travail de 10% sans réduire les salaires et les charges du même montant, vous obligez les entreprises à licencier pour récupérer l’augmentation de leurs charges. La semaine de 35 heures aurait été viable si les salariés avaient consenti à faire cet énorme sacrifice. Aujourd’hui, vouloir réduire de nouveau la semaine de travail revient à poser la même question : qui va payer ? Il y a seize ans, l’État est intervenu financièrement pour que les entreprises ne coulent pas. A-t-il les moyens de jouer de nouveau ce scénario ?

Un seul moyen, la baisse des coûts.

En outre, même si les salaires avaient diminué en même temps que le temps de travail, on aurait certes assisté à un transfert financier des salariés aux chômeurs nouvellement engagés, on n’aurait rien fait pour stimuler la croissance, puisque le pouvoir d’achat global n’aurait pas augmenté. Le seul moyen sérieux de créer des emplois consiste à baisser le coût du travail pour que les entreprises réembauchent après avoir amélioré leurs profits. C’est un processus plus long, mais infiniment plus efficace. Le plus extraordinaire, c’est que tout le monde le sait, que des expériences de ce genre ont été lancées avec succès dans une foule de pays étrangers et notamment européens. Pourquoi, dans ces conditions, ne pas appliquer cette méthode ? Bien entendu, la première raison du renoncement est de nature sociale. Elle fait peser l’effort sur les employés, non sur les entreprises. L’autre raison, c’est qu’il y a autant d’experts pour réclamer la réduction du temps de travail que d’économistes pour dire le contraire. Enfin, c’est une question idéologique. Augmenter le temps de travail n’est pas une idée de gauche, dans un pays où les bonnes idées ne peuvent venir que de la gauche.

Un mystère non élucidé.

Encore plus surprenant : jamais un bilan des 35 heures n’a été établi officiellement en France. Les uns affirment qu’elles ont détruit l’emploi, ce qui, tout de même semble vérifié par un marasme spécifique à la France, les autres jurent que toute la faute revient aux patrons qui refusent de jouer le jeu et de prendre des risques. Pourquoi un pays confronté à un chômage irréductible de plus de 10 % n’a pas décidé de recourir aux méthodes qui ont produit des résultats ailleurs et s’en tient à celles qui ont fait plonger notre économie, est un mystère sociologique sur lequel les historiens se pencheront un jour, mais qui, pour le moment n’a pas été élucidé.
Notre gouvernement actuel ne nous a pas épatés par son efficacité. Il n’empêche que réformer en France relève de l’imaginaire. La tentative de l’exécutif de modifier le code du travail pour en finir avec cet injuste clivage qui sépare les salariés enfermés dans un bastion où ils jouissent de tous les droits et les chômeurs en fin de droits ou trop jeunes pour toucher les minima sociaux a eu pour effet le mouvement « Nuit debout », qui, en somme, s’en tient aux prescriptions archaïques et à la revendication des 32 heures portée par la CGT. C’est une question de mentalité populaire et pas seulement de mauvaise gestion politique.

RICHARD LISCIA

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