Drôle de budget

Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire

Tel qu’il a été présenté aujourd’hui par le gouvernement, le budget de 2018 ne diminue pas la dépense publique, il l’augmente. Au premier abord, on discerne mal où se situe l’objectif d’effacement, à terme, du déficit.

LE GOUVERNEMENT prévoit des dépenses de 386,3 milliards d’euros et des recettes de 302 milliards, soit un déficit de 82,9 milliards contre celui de 2017 qui s’élève à 76,5 milliards, soit une hausse de 6,4 milliards. Si les pouvoirs publics estiment que le déficit budgétaire sera inférieur l’an prochain par rapport à celui de cette année, déjà estimé au-dessous de 3 % de la production intérieure brute (PIB), c’est parce qu’une croissance plus forte augmentera les recettes de l’Etat. Quand il affirme qu’il fait une économie de 15 milliards, il s’agit d’une économie réalisée sur la tendance « mécanique » à la hausse du budget chaque année. Mais les chiffres donnent l’impression que, en matière de grands équilibres, nous sommes loin de la révolution annoncée. En revanche, les ministres de l’Economie et des Comptes publics ont procédé à un redéploiement des dépenses et des recettes qui correspondent bien aux objectifs de lutte contre le chômage et de relance des investissements. La mesure la plus spectaculaire est la fin de l’impôt sur la fortune remplacé par un impôt sur le patrimoine immobilier. De même que la suppression progressive de la taxe d’habitation est un instrument pour redonner du pouvoir d’achat aux ménages.

Critiques prévisibles.

Le porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner, a défendu bec et ongles le projet de budget pendant que la droite le jugeait insuffisant et que la gauche y voyait des dispositions pour les riches au détriment des pauvres. Autrement dit, les critiques étaient beaucoup plus prévisibles que le contenu des dépenses. Pourtant, il semble bien que, si le niveau de déficit reste élevé, c’est que le gouvernement, sans renoncer à des baisses d’impôt qui, selon lui, favorisent la croissance et donc l’emploi, a tenu à répondre par de nouvelles dépenses à ceux qui l’accusent d’indifférence pour les classes moyenne et pauvre.
Le débat sur le budget confirmera donc le schéma établi depuis le début du quinquennat : pendant que les oppositions de toutes chapelles se déchaînent contre les initiatives du président et du Premier ministre, M. Macron poursuit, non sans ténacité et combativité, les réformes qu’il a promises pendant la campagne et dont les effets ne deviendront apparents que beaucoup plus tard. Un exemple : le gouvernement ne supprime pas les emplois aidés, il en prévoit 200 000 en 2018, soit moitié moins qu’en 2017. Les emplois aidés de Macron seront plus coûteux car ceux qui en bénéficieront auront au préalable reçu une formation plus approfondie. Il s’agit de faire en sorte que l’emploi qu’ils décrochent soit durable ou leur permette de faire leur entrée dans le marché du travail. Tant qu’ils étaient créés, les emplois aidés cumulaient tous les jugements négatifs : ils coûtaient cher, ne servaient pas à grand-chose, ne duraient pas. Dès que le gouvernement a envisagé d’en diminuer le nombre, ce fut un tollé et on a vu partout des maires désespérés qui ne savaient plus à quel saint se vouer. Même si les pouvoirs publics se contentent d’en diminuer le nombre, l’hostilité des communes ne fléchira pas.

Les raisons de la complexité.

L’action du gouvernement Macron est complexe pour deux raisons : la première, c’est que résoudre les problèmes de gestion d’un pays exige un effort très intense ; la seconde, c’est que s’ajoute à cet effort l’ambition de changer le cours des choses et de tout faire pour que le pays maîtrise son destin. Le technicité d’un budget est suffisamment complexe pour écarter 99 % de la population du droit d’en juger. Mais même le 1 % restant ne peut émettre une critique qu’en fonction de ses convictions. M. Macron ne risque pas d’échouer parce qu’il aura mis en oeuvre une philosophie de gauche ou de droite. Il n’échouera que par rapport à ce qu’il a annoncé qu’il ferait. Il est beaucoup trop tôt pour avancer une opinion sur ce point.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Drôle de budget

  1. rouvera dit :

    Enfin des propos intelligemment sages,wait and see!

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