Trump quitte l’Unesco

Irina Bukova
(Photo AFP)

Le secrétaire d’État américain, Rex Tillerson, a annoncé hier que les États-Unis quittaient l’Unesco. Leur départ en tant que membre à part entière ne sera effectif que le 31 décembre 2018. Ils y resteront en tant qu’observateur.

L’AFFAIRE est bien sûr politique, mais aussi financière. Les États-Unis, jugeant que l’Unesco prenait des décisions pro-palestiniennes ou, si l’on préfère, anti-israéliennes, avaient suspendu leurs cotisations au budget de fonctionnement de l’organisation internationale. À ce jour, ils ont accumulé 500 millions de dettes. M. Tillerson, avec le consentement de Donald Trump, a donc décidé de mettre un terme à l’hémorragie. Israël a aussitôt annoncé qu’il partait lui aussi. Il est facile de mettre cette décision au compte des foucades du président américain, mais l’histoire des relations entre Washington et l’Unesco est tourmentée depuis longtemps. Déjà, en 1984, Ronald Reagan, excédé par les manoeuvres de la majorité tiers-mondiste et communiste de l’assemblée générale de l’institution, en avait sorti son pays. C’est seulement en 2002, quand George W. Bush était président, que les États-Unis ont repris leur place (et le paiement de leurs cotisations, représentant 22 % du budget de l’Unesco). Mais, de nouveau en 2011, la pression du Congrès américain a obligé Barack Obama à annoncer un deuxième retrait de son pays.

Une tribune politique.

De fait, l’Unesco est devenue une seconde tribune politique de l’ONU, à cette différence près qu’elle n’a pas de conseil de sécurité pour rétablir les équilibres internationaux. Une majorité de pays s’acharne depuis des années à attiser les flammes du conflit israélo-palestinien. On peut ou non accepter cet état de fait, mais la réalité est que la culture et les droits de l’homme ont cédé le pas depuis longtemps à la politique à l’Unesco. Ses directeurs généraux successifs, et particulièrement la Bulgare Irina Bukova, dont le mandat se termine à la fin de l’année, ont assisté les bras ballants à l’évolution de l’institution vers l’acharnement systématique contre Israël. L’Unesco a surtout besoin d’une profonde réforme et elle doit réorienter ses activités vers la culture, son mandat depuis 1945, mais qui a été progressivement dévoyé à mesure que naissaient de nouvelles nations, issues de la décolonisation, et promptes à jouer l’URSS contre l’Amérique. Aujourd’hui, il s’agit plutôt d’une offensive contre Israël qui, jusqu’à présent, a réussi à maintenir le statu quo au sujet de la Palestine grâce au veto américain au conseil de sécurité.

À la dérive.

Le départ des États-Unis et d’Israël risque de renforcer le courant anti-israélien à l’Unesco, encore que ce courant ait beaucoup prospéré malgré la présence américaine et de très sérieux problèmes de financement. Il coïncide avec l’élection d’un nouveau secrétaire général. La Française Audrey Azoulay, ministre de la Culture du gouvernement de François Hollande est candidate. Elle est opposée au représentant du Qatar, Hamad bin Abdulaziz al-Kawari, qui tient la corde. L’élection du Qatari augmenterait encore l’agitation des pays membres hostiles à Israël, ce qui, loin de favoriser les solutions diplomatiques au Proche-Orient, ne ferait qu’augmenter les tensions. La question ne porte pas donc sur le bien fondé des positions politiques et diplomatiques des Israéliens et des Palestiniens. Elle porte sur une politique de force conçue par des États qui n’ont, pas plus que d’autres, la légitimité requise pour faire de la géopolitique et encore moins pour décider du sort de ce conflit, lequel doit être négocié entre les deux parties pour qu’elles aboutissent à une paix durable. Que l’Unesco se présente comme le bastion des droits de l’homme est par ailleurs un énorme paradoxe. Y siègent en effet des pays qui ont commis les pires atrocités, comme lorsque la Libye de Kadhafi présidait la commission des droits de l’homme. Le Qatar à la tête de l’Unesco ne garantirait ni l’humanisme ni l’équilibre des choix d’une organisation à la dérive.

RICHARD LISCIA

PS- Par 30 voix contre 28, Audrey Azoulay a été élue vendredi soir directrice générale de l’Unesco. Une belle victoire pour la France, mais une tâche accablante pour Mme Azoulay.

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Une réponse à Trump quitte l’Unesco

  1. admin dit :

    LL dit :
    Difficile pour une instance internationale, quelle que soit sa mission, de ne pas virer à la politique. Difficile aussi de ne pas changer sa culture de l’intérieur.

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