Et revoilà Benalla

Marine Le Pen
(Photo AFP)

Alexandre Benalla, dans la foulée de la rentrée politique, revient en force dans les médias. Il a tenté de refuser de se rendre à une convocation de la commission d’enquête du Sénat au sujet de l’affaire dont il est le lieu géométrique, puis il s’est ravisé.

EN VINGT-QUATRE heures, il a changé deux fois de position. La commission sénatoriale n’avait pas encore fait mine de le convoquer qu’il semblait se féliciter de pouvoir s’exprimer devant ses membres, dirigés par Philippe Bas. Puis, manifestement sous l’influence de son avocat, il a soulevé un point de droit important, à savoir qu’il ne pouvait pas témoigner devant une commission parlementaire pendant que se poursuivait l’information judiciaire. En réalité, il peut être convoqué et répondre aux questions des sénateurs, si ces questions ne portent pas sur l’état actuel de l’enquête. Dans l’affaire Cahuzac, les enquêtes parlementaire et judiciaire ont été menées de front.

Une affaire politisée.

On aurait cru l’épisode terminé, mais c’eût été négliger l’irritation du gouvernement. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a rappelé ce matin qu’il ne peut y avoir « d’interférence entre une commission d’enquête et une information judiciaire ». A quoi Philippe Bas a aussitôt répondu qu’il ignorait « que Mme Belloubet était le conseil de M. Benalla ». Non, a-t-elle riposté, « je ne suis pas le conseil de M. Benalla, je rappelle simplement des principes ». Bien entendu, ces deux personnages éminemment pacifiques que sont M. Bas et Mme Belloubet ont été jetés dans la bataille par la politisation de l’affaire. Le pouvoir, avec une impatience qui souligne une forme de nonchalance à propos du fonctionnement des institutions, est agacé par la poursuite de l’enquête sénatoriale alors que la commission de l’Assemblée a levé ses travaux. Le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a d’ailleurs regretté ce matin que la commission du Sénat fût uniquement composée d’élus de la droite, alors que celle de l’Assemblée était co-présidée par Yaël Braun-Pivet (LREM) et par Guillaume Larrivé (LR) . Il n’a pas rappelé que M. Larrivé, entretemps, avait claqué la porte de la commission, ce qui a permis à Mme Braun-Pivet de boucler l’enquête.

Le coup du respect.

Il est clair que l’exécutif est plus qu’énervé par la volonté de l’opposition de poursuivre une enquête parlementaire qui, de toute façon, ne changera rien au destin judiciaire de M. Benalla. Il s’agit, une fois de plus, d’exercer une pression permanente sur le président et le Premier ministre et de tenter de donner à l’affaire une dimension dommageable pour le pouvoir. Les sénateurs républicains ont d’ailleurs trouvé aujourd’hui un appui  chez Marine Le Pen qui, interrogée sur ses propres déboires judiciaires, a tenté de les dédramatiser en reprenant à son compte la thèse de « l’irrespect total (du pouvoir) pour les institutions ». Remarque d’autant plus drôle qu’elle a commencé elle-même par refuser de répondre aux convocations des juges, avant d’annoncer ce matin qu’elle irait les voir.
Il est vrai que Mme Le Pen parle du haut de son immense compétence en matière judiciaire au moment où 15 personnes du Rassemblement national sont poursuivies par les juges Claire Thépaut et Renaud Van Ruymbeke pour avoir payé des membres permanents de leur parti avec les fonds alloués par l’Union européenne aux assistants des députés européens. Le 28 juin dernier, les juges ont saisi deux millions d’euros dans les caisses du RN, ce qui a privé Mme Le Pen de la rentrée bruyante qu’elle souhaitait faire sur les tréteaux. Comment mieux se défendre qu’en attaquant et en comparant ses travers à ceux du parti d’en face ? Hélas pour elle, l’affaire Benalla n’efface pas ses  propres soucis : les juges menacent de requalifier l’accusation d’abus de confiance en détournement de fonds publics, passible d’un an de prison et d’un million  d’amende. Multipliés par quinze ?

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Et revoilà Benalla

  1. Michel de Guibert dit :

    La commission d’enquête du Sénat poursuit les travaux que celle de l’Assemblée a interrompus sans les mener à bien.

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