Des municipales présidentialisées

Olivier Véran
(Photo AFP)

Les élections municipales ont l’importance que les électeurs accordent à leur maire et à leurs conseillers municipaux, élus de proximité immédiate. Cette année, elles se présentent comme un tour de chauffe avant les présidentielles, ce qui vaudra sans doute pour les régionales et les sénatoriales.

PERSONNE ne le crie sur les toits, mais le mot d’ordre, dans les partis d’opposition, est : tout, sauf Macron ! La République en marche (REM) était déjà handicapée par sa jeunesse et un passage au pouvoir trop court pour qu’elle s’installât en province. À quoi il faut ajouter deux phénomènes qui aggravent son isolement : le redressement incontestable de la droite, étonnamment incarné par Rachida Dati, et la poussée non moins indéniable des Verts. Les plus récents sondages d’opinion indiquent la suprématie d’Anne Hidalgo au premier tour, suivie par une Dati tenace et par Agnès Buzyn, laquelle ne peut être sauvée que par une alliance miraculeuse avec Cédric Villani, le traître de la REM, mais sans grand espoir (comme quoi la médaille Fields ne protège pas contre les statistiques sondagières) ou avec les Verts. Cependant, comme d’autres alliances sont possibles au second tour, tout laisse penser que le match final opposera Anne Hidalgo à Rachida Dati. Un match dont il est impossible de prévoir l’issue.

Un (durable) feu de paille.

Sans parler de descente aux enfers pour la REM, on devine fort bien qu’elle est sur le versant descendant de son expérience. Lorsque Emmanuel Macron  est apparu dans le paysage politique, tout le monde s’est écrié : « C’est un feu de paille ! ». Un feu de paille qui aura duré cinq ans, mais ne s’est pas transformé en incendie. Le président de la République est aujourd’hui considérablement affaibli non seulement par des agressions intempestives ou ses sérieuses erreurs de communication, mais par un climat où il fait l’objet d’un ressentiment très répandu qui a déclenché la progression de LR et des Verts. Rien ne dit, bien sûr, qu’ils prendront le pouvoir en 2022, car le chef de l’État ne se laissera pas faire. Il mettra à profit les deux dernières années de son mandat pour redorer son blason et l’éparpillement des suffrages dans l’abondance de l’offre électorale pourrait transformer en nains ceux qui voient le pouvoir à leur porte. Ce qui est certain, en revanche, c’est que la République en marche avait, avec les municipales, une occasion unique de sanctifier ses réformes par un succès électoral. Cette occasion nous semble bel et bien perdue, à cause de l’affaire Griveaux. Le courage et l’élégance d’Agnès Buzyn n’ont pas suffi pour remonter la pente,  à cause, notamment, du climat engendré par les réformes, gilets jaunes, syndicats irréductibles, oppositions qui ne pouvaient croître qu’en assommant la majorité de leurs accusations vraies ou infondées.

Un mandat trop court.

Ce bilan négatif ne sera crédible que le soir du 22 mars, s’il est confirmé par une victoire de la droite ou des Verts. Cela signifie qu’il appartient à la REM, qui a perdu bon nombre de députés hostiles aux décisions de l’exécutif qu’ils considèrent comme autoritaires, de reconstituer ses forces aussi vite que possible. Ramené de sept à cinq ans, le mandat présidentiel est trop court pour qu’un président fasse ses preuves et impose les réformes au peuple. Le soulèvement, l’insurrection même, des gilets jaunes, black blocs et camarades syndiqués ne disaient rien de l’aptitude des Français à prendre l’habitude des mesures qu’ils jugent désagréables ou même iniques. M. Macron est tout à fait capable de rouler en roue libre après une dynamique réformiste qui a accumulé pas mal d’énergie cinétique. Autant en emporte le vent. De ce point de vue, la lutte exemplaire de l’État contre le coronavirus (à comparer avec celle de l’administration américaine, qui attend le printemps pour que le virus disparaisse) jouera en faveur de Macron. Le gouvernement à ce jour, n’a commis aucune erreur. Il travaille dans une transparence absolue. Il ne dramatise ni ne rassure. L’épidémie a fait chez nous moins de dégâts qu’ailleurs. Nous avons cru perdre une excellente ministre de la Santé, nous en avons touché un, le Dr Olivier Véran, qui dit la vérité et travaille dur, avec des conseillers médicaux hors pair.

C’est tout le sens de cette chronique. Car ce qui est valable pour le Covid-19, l’est aussi pour le paysage politique. On n’est pas toujours sûr de gagner au change. Si « Macron, dégage ! » est un bon slogan, les alternatives proposées par une extrême droite triomphaliste et par une extrême gauche qui fera un mauvais score aux municipales ne sont nullement rassurantes. Reste la droite : elle entend choisir François Baroin comme candidat LR à la présidence. Il a l’âge, l’expérience, l’éloquence, le charme, l’amabilité qui font de lui un candidat crédible. Mais que ferait-il à l’Élysée ? Il s’empresserait d’appliquer les réformes de Macron. On disait que Sarkozy ne pouvait freiner l’ascension du Front national en l’imitant. On peut dire de Baroin qu’il serait un Macron-bis.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Des municipales présidentialisées

  1. Sphynge dit :

    « On peut dire de Baroin qu’il serait un Macron-bis. » C’est dire que cette option est à rejeter ! Aujourd’hui du moins, la solution serait l’union des droites comme Mitterrand fit sans complexe l’union de la gauche. Avec un parti communiste autrement plus archaïque et au passé récent autrement redoutable que celui du Rassemblement national dans sa version actuelle. Ce serait la seule possibilité offerte aux Français de sortir des impasses de la situation présente (immigration-islamisation, antisémitisme islamo-gauchiste, ultra-libéralisme mondialisé complètement dérégulé et financiarisé). Mais M. Macron a encore beaucoup de ressources (« progressistes ») pour éviter tout progrès !

    Réponse
    Votre analyse est totalement archaïque. Mon propos n’est certainement pas de disqualifier tout le monde comme vous le faites non sans hargne, mais de dire que le dégagisme systématique ne change pas forcément les choses.
    R. L.

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