L’équation insoluble

Macron dépeint en monarque absolu
(Photo AFP)

Ou bien le gouvernement réussit, d’ici à jeudi, à réunir une majorité absolue avec l’aide des Républicains ; ou bien il n’y parvient pas et la seule issue pour lui est de dégainer le 49/3.

OR IL N’Y A aucune certitude quant à l’afflux des voix LR, alors qu’un vote majoritaire est  infiniment plus légitime que le recours à un article que le gouvernement a déjà beaucoup utilisé. La suite dépend de cet épisode. Dans le cas d’une majorité absolue, l’exécutif aura gagné en légitimité et mis en opposition la majorité de l’opinion et la majorité parlementaire. Dans le second, le résultat sera déclaré illégitime par la France entière, même si l’article 49/3 figure  bel et bien dans la loi fondamentale.  C’est un peu l’avenir de la macronie qui est en question. Avec les voix de LR, le gouvernement amorcerait une stratégie qu’il n’a jamais cachée depuis que sa majorité est seulement relative. Il a déclaré qu’il ferait des réformes avec des majorités de circonstance, selon que la gauche ou la droite veulent bien « prêter » leurs suffrages.

Le danger du 49/3.

Le recours au 49/3 semble même hors de portée de l’exécutif. Il serait suivi par un tel tollé dans l’opinion publique que l’opération se révèlerait désastreuse et encouragerait le mécontentement jusqu’à la violence. C’est d’ailleurs pourquoi hier les ténors du gouvernement n’ont cessé de déclarer qu’il n’était pas question du 49/3 et se disaient optimistes quant à la posibilité de trouver la cinquantaine de suffrages qui manquent à la majorité absolue. Ce qui signifie que, en réalité, ils ne disposent que d’une option, dont l’inconvénient majeur est l’importance qu’elle donne aux Républicains, qui sont toujours dans l’oppposition, malgré le bout de chemin qu’ils ont consenti à faire avec la macronie au sujet de la réforme des retraites.

Ma réforme !

Cependant,  LR s’est profondément impliqué dans le modelage de la réforme au point que Bruno Retailleau, chef des sénateurs LR, a pu déclarer fièrement qu’il s’agissait de SA réforme des retraites ! Voilà Renaissance habillée pour l’hiver et livrée à toutes les formes de démagogie, d’autant que LR, pour mieux se démarquer de la macronie aux yeux de l’opinion, continue, non sans un certain cynisme, à la bombarder de commentaires vénéneux.

Un facteur illogique.

La réélection d’Emmanuel Macron avec une majorité relative l’an dernier contenait donc une faiblesse structurelle dont la macronie ne s’est rendu compte qu’au moment du lancement de la réforme. Une faiblesse sérieuse puisqu’elle va jusqu’à la crise de régime. Aussi n’est-il pas exagéré d’imaginer une victoire à la Pyrhhus avec un vote majoritaire mais suivi d’une telle exaspération populaire que le président de la République se verra peut-être contraint de faire un geste important, par exemple la dissolution de l’Assemblée nationale et des élections anticipées qu’il risque de perdre. Il peut aussi les gagner car, contrairement aux supputations arithmétiques que nous avons exprimées plus haut, il y a un facteur illogique dans tout raisonnement politique.

Quand tout est perdu…

En effet, la perspective d’une bataille électorale accroît les tensions mais  elles montreront que, en dehors de Macron, il n’y a pas grand-monde pour briguer la présidence. Le tout-Paris pense que ce sera le tour de Marine Le Pen, mais rien n’est moins sûr. On a trouvé, ces dernières semaines, les ministres quelque peu fatigués,ou trop jeunes ou incompétents mais il y a encore des poids-lourds, Édouard Philippe, Bruno Le Maire, et d’autres qui sont capables de succéder à Macron et de poursuivre sa politique. Comme quoi, quand tout est perdu, le mot renaissance a une signification bien réelle.

RICHARD LISCIA

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4 réponses à L’équation insoluble

  1. Jean Vilanova dit :

    Depuis Mitterrand jusqu’à Macron, la France, gouvernée par des présidents chacun plus médiocre que le précédent est sur un toboggan dont la pente s’accélère. Comme beaucoup, j’ai cru en Emmanuel Macron. Mais avec lui, au fil du temps, je suis passé de l’espoir à la déception puis de la déception à la désolation. Aujourd’hui le roi est nu. Qui pour lui succéder et, peut-être, ralentir la course à l’abîme ? Certainement pas Edouard Philippe que vous citez comme l’un des possibles « poids lourds ». Juppéiste psycho-rigide (pléonasme), comme Premier ministre, il a tout raté ; peut-être le pire ministre de la Vème République. Un sacré palmarès en effet ! Son mépris du peuple (de la « France périphérique » comme on dit aujourd’hui) a, chacun le sait, largement contribué au déclenchement du mouvement des gilets jaunes (encore des taxes, les 80 km/h…), un mouvement qui a ébranlé les fondements mêmes de la République, il faut quand même le rappeler. Et que dire du projet de retraite de 2019, un projet systémique prometteur ayant, sur le principe, l’aval de la CFDT ? Accroché comme une moule à son rocher à l’âge pivot, Edouard Philippe a tout dévasté avec, à la clé, une des plus grandes grèves de ces dernières décennies avant que l’épidémie de Covid ne nous entraîne vers une nouvelle crise, inédite celle-ci. Notre pays est épuisé. Puissions-nous lui épargner ce docteur Diafoirus dont je ne comprends pas qu’il « caracole » en tête des sondages de popularité. Au fait qui a dit : « les Français sont des veaux… » ?

    Réponse
    Edouard Philippe est l’homme politique le plus populaire de France.
    R. L.

  2. Jean Vilanova dit :

    Hélas !

  3. Dominique S dit :

    Edouard Philippe m’a beaucoup déçu. Sa loyauté envers Macron n’a jamais été évidente depuis qu’il a quitté Matignon.. J’avais admis la trahison de Jacques Chirac par Edouard Balladur, car je n’aimais pas Chirac. Pourquoi? Parce qu’il avait trahi Giscard. C’est vrai que Chirac avait aussi trahi Chaban Delmas, que je n’aimais pas non plus. Bon, pour 2027, j’aurais bien vu Bruno Le Maire. Je l’avais trouvé très anonyme lors de la primaire de 2017. Mais depuis, je ne lui trouve que des qualités.

  4. Doriel Pebin dit :

    Bonjour. Il serait enfin temps et judicieux d’abandonner le terme « mépris » utilisé à tout bout de champ. Tout devient objet et sujet de « mépris ». Ce mot revient constamment dans la bouche des opposants de droite, de gauche et … des populistes de tous bords. Le « je me sens méprisé(e), il(s) me (nous) méprise(nt) » est un leitmotiv ancien du RN, de LFI, des gilets jaunes et compagnie. Malheureusement, les médecins s’y mettent aussi en se sentant « méprisés » par le gouvernement, par la CNAM, par etc.
    En clair, si je ne suis pas d’accord avec eux, je suis donc méprisable aussi !
    Cette façon de faire s’inscrit dans un esprit fascisant actuel (tendance wokisme) où l’on cherche à dénigrer les autres par de la posture et des mots, et non pas la discussion ou les arguments pour aller dans le fond. Cette attitude est sans conteste clairement méprisante pour… ceux qu’ils accusent de l’être.
    Les 6 millions de Français sans médecin traitant dont 700 000 en ALD ne pourraient ils pas dire qu’ils se sentent tout autant méprisés par les médecins. Quand les choses sont complexes, la France mérite autre chose que de se figer dans une posture sans réflexion (encore un exemple de l’adulescence contemporaine).

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