Retraites : un seul remède

Laurence Parisot
(Photo AFP)

Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, consulte aujourd’hui les partenaires sociaux dans le cadre de la préparation de la grande conférence sociale de juillet prochain. Le principal sujet de la concertation porte sur les retraites dont le déficit, tous régimes confondus, pourrait, si rien n’est fait, se monter à 200 milliards à l’horizon 2020, selon Laurence Parisot, présidente du Medef.

LE GOUVERNEMENT est décidé à procéder à une nouvelle réforme des retraites. Quand celle de Nicolas Sarkozy a été adoptée il y a deux ans, son Premier ministre, François Fillon, avait annoncé que la réforme serait réexaminée les années suivantes pour que les déficits, qui ont la vie dure, fussent résorbés.  Effectivement, les régimes sont de nouveau déficitaires, notamment ceux des cadres. Une réforme profonde, dont les effets seraient durables, devient indispensable. François Hollande, pour le moment, refuse de différer d’un an ou deux l’âge de la retraite qui reste fixé à 62 ans depuis la réforme Fillon-Sarkozy. Il s’oriente plutôt vers une hausse des cotisations des actifs et un gel des pensions déjà entré en vigueur (mais qui peut se transformer en une diminution). Il a deux raisons pour ne pas prolonger les carrières professionnelles : la méthode ressemblerait à celle de son prédécesseur et les syndicats, pratiquement opposés à toute réforme, protesteraient dans la rue.

Une question démographique.

Rien de tout cela n’est nouveau. La droite au pouvoir a parfois reculé devant le refus populaire des carrières plus longues. On compte certes nombre de métiers qu’il est physiquement difficile d’exercer au-delà de 40 ans de travail. Mais il faut que le pays se rende à une évidence : les Français vivent plus longtemps, ils doivent travailler plus longtemps. Qu’une retraite puisse durer vingt ans par exemple suffit à démontrer qu’il faut travailler au-delà de 62 ans. Jean-Claude Mailly, leader de Force ouvrière, a affirmé ce matin que la qualité de vie des seniors commence à se dégrader à partir de 62 ans. On ne sait pas à quelle statistique il se réfère, mais elle est très surprenante, la plupart des démographes affirmant que les gens survivent plus longtemps à leur départ à la retraite et qu’ils restent longtemps en bonne forme.

On peut certes admettre des exceptions à la réforme. Il demeure que nous n’avons pas le choix. S’il faut prolonger les carrières, soit par l’augmentation de la période des cotisations, soit en repoussant à un âge plus avancé la fin de l’activité professionnelle, c’est pour sauver les retraites. Et on peut y parvenir par des moyens qui ne coûtent pas un centime à l’État et jouent en faveur du pouvoir d’achat des gens âgés. Une réforme profonde enverrait à nos partenaires européens un signal explicite sur le sérieux des intentions du gouvernement français au sujet du redressement des comptes publics.

L’orage couve.

Si la réforme Sarkozy a été insuffisante, c’est parce qu’aucun gouvernement à ce jour n’a pris des mesures à la hauteur des déficits. En 1995, quand le Premier ministre, Alain Juppé, a proposé un vaste projet d’assainissement des comptes en s’attaquant aux déficits de l’assurance-maladie et aux régimes de retraite, il a été acclamé par les députés debout. Quelques mois plus tard, le pays était paralysé par une grève nationale et le président Chirac retira le projet. François Hollande affronte une situation encore calme mais où couve un très gros orage. Il doit affronter à la fois des syndicats qui ne veulent rien savoir des dures nécessités financières et une gauche qui claironne partout que la résorption des déficits n’est pas indispensable. La semaine dernière, on a pu assister, dans l’émission « C’est dans l’air » à un débat hallucinant où un économiste habituellement mesuré défendait l’idée que nous ne rembourserons jamais la dette publique, que l’argent était dû à des « créanciers », apparemment des gens de peu (merci pour les détenteurs de livrets d’épargne et d’assurances vie) et qu’une inflation élevée et durable suffirait à diminuer la dette.

Dans ces conditions, effectivement,  il ne nous resterait plus qu’à emprunter encore et encore pour payer les retraites. Mais comment ne pas voir que, à un moment donné qui n’est pas du tout lointain, personne n’acceptera plus de nous prêter de l’argent ? Tout notre beau système de protection sociale s’effondrera alors. On peut acheter du temps pendant des années. On ne peut pas acheter du temps tout le temps.

RICHARD LISCIA

 

 

 

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