La meilleure défense, c’est l’attaque

Une plaidoirie argumentée
(Photo S. Toubon)

Nicolas Sarkozy est sorti de son silence en publiant dans « le Figaro » de ce matin une tribune dans laquelle il reprend point par point les accusations dont il fait l’objet pour tenter de les anéantir. Il a notamment comparé les méthodes d’écoutes ordonnées par les juges et utilisées par la police à celles de la Stasi, le service secret de l’ex-RDA. Cette seule référence lui a valu, à gauche, un torrent de condamnations virulentes.

MAIS, si le rappel des méthodes de la RDA est quelque peu excessif, d’autant que la loi permettant l’extension des écoutes a été voulue et votée par la droite, l’article de M. Sarkozy vaut la peine d’être lu. Il reprend point par point les dossiers où il est impliqué et s’efforce de démontrer que les accusations dont il fait l’objet ne tiennent pas, mais que la multiplicité des instructions engagées contre lui ont un objectif politique. Il n’est ni le seul ni le premier à le dire ou à poser la question de l’impartialité de la justice en ce qui le concerne. Et, dès lors que, à de multiples reprises, le secret de l’instruction et le secret professionnel ont été violés et que la présomption d’innocence a été bafouée, pourquoi ne se défendrait-il pas lui-même contre des actions judiciaires nombreuses et convergentes ?

Guerre ouverte.

À gauche, on s’est concentré sur le mot Stasi pour dénoncer la violence des propos de M. Sarkozy. François Hollande lui-même est sorti de sa réserve pour condamner ce qu’il considère comme une attaque sans précédent contre les institutions du pays. Une bataille feutrée par justice et police interposées se transforme en guerre politique ouverte à deux jours du premier tour des municipales. Si la droite se défend avec tous les moyens dont elle dispose, la majorité évite, par la virulence de ses commentaires, quelques interrogations relatives au traitement très particulier dont M. Sarkozy fait l’objet. L’ancien président se bat avec l’énergie qu’on lui connaît et peut-être en présentant une analyse trop favorable de son cas personnel, mais le nouveau président, censé prendre de la hauteur, n’a pas craint non plus de descendre dans l’arène.

La vraie question est : que se passe-t-il ? Pourquoi ce maelström politique, médiatique et judiciaire ? Pourquoi, non contents de trouver dans l’exercice de la justice de quoi les satisfaire, les chefs de la majorité croient-ils nécessaires de riposter mot pour mot, point par point, à un homme qui est passé du statut de magistrat suprême à celui de suspect ?  Il faudrait être aveugle pour ne pas voir qu’il existe, chez des personnes anonymes et manipulatrices,  une complaisance extrême envers des journalistes, toujours les mêmes, qui, avant tous les autres, savent ce qui se passe dans déroulement des enquêtes.  Il ne s’agit pas, dans notre esprit, de dénoncer des confrères qui ne font que leur métier et ne sauraient en aucun cas livrer leurs sources, mais d’exiger que soit protégé un fondement du droit, le secret de l’instruction. Car une révélation faite dans ces conditions est forcément partiale, surtout si elle charge encore plus le suspect. Qui nous dit qu’il n’existe pas de nombreux éléments à décharge qui n’ont pas été publiés ?

Une mauvaise comparaison.

Contrairement à ce qu’affirment les très nombreux détracteurs de M. Sarkozy, sa tribune dans « le Figaro » n’est pas un pamphlet exorbitant du droit ou tellement excessif qu’il en deviendrait insignifiant. C’est une plaidoirie argumentée. Personne, ni à gauche ni à droite, ne peut plus continuer à se promener en ville en arborant ses principes vertueux, indépendance de la justice, stricte application de la loi, rigueur de la police. L’acharnement des juges est visible, l’écoute des conversations Sarkozy-Herzog anormale, la démesure des commentaires dérisoire. M. Sarkozy, par exemple, a été comparé à Silvio Berlusconi : il s’agit là d’un amalgame scandaleux. L’ancien président n’est pas l’homme le plus riche de France, il n’a pas fait voter des lois propices à la protection de son patrimoine financier, il n’a pas été mis en examen pour une affaire de moeurs. La trêve politique devient nécessaire et urgente.

RICHARD LISCIA

 

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5 réponses à La meilleure défense, c’est l’attaque

  1. Dr Jérôme Lefrançois dit :

    Les socialistes, à commencer par le premier d’entre eux, François Hollande, montrent leur vrai visage : celui du travestissement de la vérité, du harcèlement jusqu’à l’hallali de leur (seul) adversaire (Nicolas Sarkozy), le machiavélisme du président Hollande (sous ses dehors bonhommes), la moisissure avancée de quelques leaders socialistes comme Mme Taubira…
    Sarkozy avait indisposé beaucoup de monde (y compris moi) par ses comportements, mais là, nous sommes arrivés à un état de pourrissement du fonctionnement de l’État à son plus haut niveau, extrêmement surprenant et préoccupant.
    De ce point de vue, François Hollande est un vrai champion.
    Pourvu que les citoyens français le lui fassent savoir dans les urnes…

  2. Dr Delahousse dit :

    Tout cela est en effet franchement nauséabond.
    Pauvre France, quand retrouveras tu ta grandeur avec un vrai homme d’État à sa tête?
    Pitoyable.

  3. LECRU JEAN dit :

    IL y a longtemps que le bon sens populaire a compris la malveillance que cache la multiplicité de ces révélations toujours opportunes dans un contexte de collusion judiciaro-médiatique avec toujours les mêmes acteurs (Médiapart, JDD, Libération et syndicat (kk dixit coluche) de la magistrature, dont la présidente, bien que mise en examen, a été reçue par M. Hollande); votre article est très juste mais il faut préciser que, actuellement, M. Sarkozy ne fait l’objet d’aucune mise en examen. S’il l’était, il pourrait avoir accès à ses dossiers et ainsi de prendre connaissance des preuves et de l’identité des instigateurs qui le chargent.

  4. JMB dit :

    Montesquieu avait fait de la séparation des pouvoirs la base de la démocratie. Comme la Vème république a rendu croupion le pouvoir législatif (comparons avec celui des États-Unis par exemple), le pouvoir judiciaire respectait le moins mal ce principe. L’ensemble des magistrats considère qu’il est mieux respecté depuis deux ans qu’au cours des cinq ans précédents.
    Pour qu’il y ait secret de l’instruction, il faut qu’il y aient des juges d’instructions. Cette fonction devait être supprimée. Les enquêtes auraient été confiées aux procureurs plus sensibles au pouvoir exécutif. Durant cinq ans, la politique étant vécue comme un show médiatique, tout fait divers singulier a été l’occasion de généraliser et d’évoquer le laxisme des magistrats.
    Le secret de l’instruction est précieux et surtout défendable quand il pourrait s’exercer sur vous et à votre avantage.

  5. JMB dit :

    Sont-ils nombreux ceux qui accepteraient sans déplaisir qu’un condisciple de lycée ouvre subrepticement une ligne téléphonique à votre nom pour échapper à des écoutes judiciaires ?

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