Oublier la dette ?


Sapin défait par la déflation
(Photo S. Toubon)

Signe des temps, le gouvernement renonce au calendrier du redressement des comptes publics : ce matin, Michel Sapin, ministre des Finances, a annoncé que le déficit budgétaire de 2014 serait SUPÉRIEUR à celui de l’an dernier, à 4,4 % (contre 4,2) et que celui de 2015 atteindrait 4,2 %. M. Sapin estime que le déficit de 2017 sera ramené à 3 % alors qu’il devait être complètement résorbé, à zéro pour cent.

BIEN ENTENDU, le ministre donne des explications : il met en cause la déflation, qui n’a pas plus tôt montré le bout du nez qu’elle devient le grand mistigri du gouvernement. Nous lui en proposons une autre : l’insuffisance des mesures mises en oeuvre pour diminuer le déficit budgétaire. Toute une école de pensée nous démontrera que celles qui ont été appliquées ont déjà porté un coup à la croissance, qui a été de zéro au premier semestre et qui, selon M. Sapin, ne dépassera pas 0,4 % cette année.  Il demeure que c’est la hausse des impôts en 2012 et 2013 qui a nui à la croissance, pas la réduction des dépenses ; et que, lorsque les déficits publics et la dette deviennent excessifs, il faut s’attaquer vigoureusement à la dépense publique. Vivre au dessus de ses moyens, c’est dépenser plus qu’on ne gagne et c’est le cas de la France. Elle a besoin d’une cure d’amaigrissement en dépit des inégalités entre les revenus.

Le cap des 21 milliards.

M. Sapin a changé d’avis au sujet de la compression des dépenses. Contrairement à ce qu’il avait dit quelques jours plus tôt, il maintient le cap de 21 milliards d’économies l’année prochaine. On est presque tenté de dire que si le pays fait des économies sans tenir son agenda budgétaire, il n’est peut-être pas utile d’en faire. La vérité est plus simple : ces 21 milliards sont insuffisants, il faudrait économiser davantage. Bref, on a reporté à plus tard une politique d’austérité que tout le monde dénonce mais qui est inéluctable. M. Sapin jure que les impôts ne seront pas augmentés. Pourtant, la rumeur court d’une nouvelle hausse de la TVA pour faire rentrer des recettes fiscales. La précédente, qui a été mise en oeuvre au début de l’année, n’a finalement pas fait de vagues. Les gens ne l’ont pas ressentie, comme c’est souvent le cas avec cet impôt sur la consommation. En période de déflation, elle ne devrait pas se traduire par une hausse des prix telle qu’elle découragerait les achats. Enfin, l’augmentation de la pression fiscale est un dada des socialistes, une méthode où ils sont infiniment plus à l’aise que dans les coupes budgétaires.

Crainte politique.

Certes, non seulement la crise économique et profonde mais, avec les réflexes qu’elle entraîne (épargne plutôt que consommation, ajournement des achats), elle prive le gouvernement des moyens traditionnels de lutter contre elle. Il ne faut pas accuser nos dirigeants d’incompétence, d’autres à leur place ne seraient pas assurés de mieux faire. Il n’empêche que la thérapie mise au point par François Hollande ne correspond pas à la gravité du mal ; et que, accablé par des revers politiques qui le plongent dans un gouffre d’impopularité, il est terrifié à l’idée de prendre des décisions qui, fatalement, augmenteront encore, si c’est possible, la désaffection de l’électorat. Ceux qui briguent le pouvoir doivent le savoir : la situation est si grave qu’il nous faut des remèdes de cheval et que la lointaine guérison à laquelle nous aspirons passe par nombre de souffrances. Exercer le pouvoir aujourd’hui en France, c’est s’assurer  l’hostilité, peut-être même l’aversion et le ressentiment, de la population.

RICHARD LISCIA

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