Hollande : chômage et destin

Le premier à souffrir du chômage ? (Photo AFP)

Le premier à souffrir du chômage ?
(Photo AFP)

C’est entendu, François Hollande a lié sa décision de se présenter pour un second mandat à la fameuse inversion de la courbe du chômage. Il a répété cet engagement face à la presse présidentielle dimanche dernier, alors que, 24 heures plus tard, on comptait seulement 1 400 chômeurs de plus en France, grâce à une nouvelle méthode de calcul sans laquelle le nombre de demandeurs d’emploi aurait augmenté de 10 000 personnes supplémentaires.

LA VÉRITÉ est que rien, à ce jour, dans l’action du gouvernement, n’a permis de juguler le chômage. Le président de la République se targue pourtant d’avoir engagé des réformes qui, instituant des baisses de charges et des crédits d’impôts, et assorties de contrats aidés, auraient dû permettre d’obtenir des résultats sur le front de l’emploi. Il me semble que les pouvoirs publics, depuis que M. Hollande est au pouvoir, ont envoyé aux chefs d’entreprise un message particulièrement brouillé qui ne les autorise pas à prendre des risques, c’est-à-dire à se lancer dans l’embauche avec un minimum de confiance.

Un geste pour la gauche.

La raison de l’échec du président n’est pas de nature économique. Quand il a nommé Manuel Valls Premier ministre et Emmanuel Macron ministre de l’Économie, il les a incités, notamment dans le cadre de la fameuse loi Macron, à déverrouiller l’économie française. En même temps, constatant que ces mesures déclenchaient sur sa gauche une levée de boucliers, il a tenu, notamment par des baisses d’impôts, à donner des gages idéologiques aux frondeurs et autres écologistes avec lesquels il ne désespère pas de former une coalition capable de le conduire en 2017 à une victoire électorale.
Cela signifie que, tant que des freins politiques ralentiront la libéralisation de l’économie, la France stagnera dans une sorte de marais conjoncturel où la croissance crée moins d’emplois que partout ailleurs en Europe, par exemple en Italie, où la gauche au pouvoir, débarrassée de ces préjugés qui, décidément, ont la vie dure en France, recommence à créer des emplois. Car, si nous devons nous inquiéter, ce n’est pas seulement parce que le taux de chômage augmente en France, c’est parce que nos voisins et partenaires ont ouvert une voie dans laquelle nous hésitons à nous engager, au détriment de l’emploi, du pouvoir d’achat et de l’optimisme national.

Une dissertation philosophique.

Franchement, pour les Français, le sort personnel de M. Hollande, comme il en convient lui-même avec modestie, est infiniment moins important que le retour à l’emploi, fût-il progressif et lent. Mais, comme toujours chez nous, l’indestructible chômage, qui suffit à empoisonner la vie nationale, est devenu aussi un sujet de spéculations diverses sur ce qui va se passer, sur le plan électoral, dans un peu moins de deux ans. C’est encore une façon d’alléger le fardeau des ministres du Travail qui se succèdent à un poste maudit, des porte-parole du gouvernement qui n’ont plus rien à dire sur le sujet et de donner au président le thème d’une dissertation philosophique dans laquelle il cuisine le chômage à la mode politique. En d’autres termes, le message du chef de l’État est le suivant : la première victime du chômage, c’est moi. Je vais y laisser une carrière qui s’annonçait belle et va finir en quenouille.
Bien sûr, on trouvera bien, aux alentours de la fin de l’année prochaine, ou même avant, quelques signes encourageants de reprise de l’emploi, qui se répèteront peut-être d’un mois sur l’autre, assez en tout cas pour que M. Hollande puisse dire publiquement qu’il n’a plus de raison de ne pas se présenter. On nous annonce une seconde loi Macron pour nous impressionner (plus réformateur que moi, tu meurs), mais allons, nous savons que le président a besoin d’une majorité et qu’il ne la trouvera qu’à gauche, en caressant dans le sens du poil ses pires adversaires, frondeurs, écologistes butés, extrémistes de gauche indissolubles dans la réforme. Assommant, invulnérable, écrasant, sans doute impardonnable parce qu’il fallait avoir le courage de lutter contre ce fléau par d’autres moyens, le taux de chômage serait presque devenu un atout pour M. Hollande. Ce serait sa coquetterie, sa spécificité de président vaincu par l’adversité, car il a tout fait pour réussir dans ce domaine. Il en souffre, le pauvre. Et les chômeurs avec lui.

RICHARD LISCIA

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