Fillon abat ses cartes

Fillon hier (Photo AFP)

Fillon hier
(Photo AFP)

François Fillon ne tient pas la pole position dans les sondages sur la primaire à droite, mais il est incontestablement celui des candidats de la droite qui a le plus travaillé sur son programme. Il a en a annoncé hier les grandes lignes : règle d’or budgétaire inscrite dans la Constitution, quotas migratoires, réduction du mille-feuilles territorial, diminution du nombre de parlementaires, égalité des régimes de retraites privé et public, toutes dispositions qu’il entend soumettre au peuple par voie de référendum.

L’ANCIEN Premier ministre estime qu’il a gagné la bataille des idées et que ses concurrents le copient. Depuis qu’il fait campagne, il tente de compenser son déficit de popularité par la clarté de son travail. Et il est vrai qu’il a très vite proposé la suppression de l’ISF, qui ne plaisait ni à Alain Juppé ni à Bruno Le Maire. Ils ont fini par le rejoindre sur ce point. M. Fillon a aussi raison de dire qu’il prendra, s’il est élu président, « le TGV des réformes structurelles ». Tout se décide pendant les cent premiers jours d’un mandat et, si les Français ne sont pas pris de court, ils décident immanquablement de bloquer les réformes. François Fillon est donc compétent, il a un programme que la droite ne saurait désavouer, la stratégie à grande vitesse qu’il propose est de bon aloi. On s’étonnera toutefois du recours au référendum en cinq questions, peu compatible avec une action ultra-rapide. En outre, il nous semble qu’il vaut mieux appliquer les idées sur lesquelles on a été élu que de courir le risque, en dépit de la victoire électorale, d’essuyer un « non » au référendum. Et alors, quoi ?

Une question lancinante.

Pour réussir, l’ex-chef du gouvernement devra surmonter la question insidieuse et lancinante que l’opinion ne cesse de lui poser sur ce qui peut bien le différencier de Nicolas Sarkozy après cinq ans d’étroite collaboration au pouvoir. M. Fillon nous a donné la preuve que la vengeance est un plat qui se mange froid et personne ne doute que, dans sa volonté de conquérir la magistrature suprême, son désir de battre l’ancien président est au moins aussi fort que l’idée qu’il se fait de ses propres qualités. L’opinion, de droite ou non, craint ce genre de passion chez les candidats parce qu’il n’a rien à voir avec la simple volonté de servir et risque d’avoir des effets dommageables sur l’accomplissement du mandat. Le même soupçon, d’ailleurs, poursuit Nicolas Sarkozy, trop préoccupé par un mauvais rêve, celui de battre celui qui l’a battu, ce qui est sans rapport avec le salut du pays.

La répétition d’un miracle.

En fait, M. Fillon tente de démontrer que ce qui l’oppose à M. Sarkozy, c’est son caractère, son calme apparent, son sérieux, son mépris des flamboyances inutiles, et il n’est pas vain qu’il rassure alors que beaucoup de nos concitoyens hésitent à accorder à l’ancien président un nouveau mandat après avoir été échaudés par la gestuelle parfois insupportable qu’il leur a déjà infligée. Faire campagne sur le thème « Je suis le contraire de Sarkozy » pendant que l’autre répètera à l’envi qu’il a changé peut comporter des avantages. Mais les voies qui conduisent au pouvoir sont aussi impénétrables que celles du Seigneur, M. Fillon n’étant pourvu que d’un médiocre charisme contre lequel la solidité d’un programme ne suffirait pas. La personnalité de M. Sarkozy est à la fois son plus grave défaut et l’ingrédient de son leadership, qualité rare dont M. Fillon est, hélas pour lui, dépourvu. Il croit dur comme fer, comme ses rivaux à droite, que, à l’instar de François Hollande en 2011, l’on peut partir de très bas et gagner quand même, mais la répétition des miracles est encore plus rare en politique que dans la vie de tous les jours.

RICHARD LISCIA

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