Migrants : désordre européen

Migrants en Hongrie (Photo AFP)

Migrants en Hongrie
(Photo AFP)

La question de l’immigration devient certes tragique pour les migrants eux-mêmes et pour les Européens, elle n’en est pas moins abordée par les pays membres de l’Union avec 28 avis différents qui ne contribuent certainement pas à un traitement sérieux de la crise. Il aura fallu le courage, l’énergie et le bon sens d’Angela Merkel pour la replacer dans un contexte plus raisonnable.

NOUS AVONS tous la mémoire courte : ce n’est pas d’aujourd’hui que se pose la question migratoire en France et en Europe. Notre situation géographique et notre relative prospérité font de notre pays et de notre continent des pôles attractifs pour des populations marquées par la misère absolue et rendues encore plus vulnérables par la multiplicité de conflits épouvantables en Afrique et au Proche-Orient. Ce qui n’est pas nouveau, c’est la permanence des facteurs qui rendent la condition humaine aussi désespérée. Au lendemain de la guerre mondiale, le nombre des réfugiés était plus élevé qu’aujourd’hui. Plus récemment, l’affaiblissement du bloc soviétique a engendré des mouvements de populations considérables. Enfin, les différences de niveau de vie en Europe ont entraîné une émigration des plus pauvres vers les plus riches, par exemple les centaines de milliers de Polonais qui se sont rendus en Grande-Bretagne (mais n’y sont pas forcément restés). En Europe, les mélanges de nationalités et d’ethnies ont été nombreux jusqu’au vingtième siècle : Allemands en Tchécoslovaquie, Russes dans les pays baltes ou en Ukraine, juifs en Pologne. Il est vrai que la majorité s’accommode toujours mal des minorités nationales ou religieuses et on sait comment les Allemands ont traité la présence de ces minorités.

La peur des Européens.

Je ne suis pas naïf pour autant : toute la rigueur morale n’empêche pas de comprendre qu’une population qui a le sentiment d’être envahie par d’autres peuples, ethniquement et religieusement très différents, craint pour la pérennité de ses coutumes et traditions. Je ne dis pas que le problème est inexistant mais qu’il faut l’examiner avec d’autant plus de sang-froid qu’il atteint cette années des proportions quelque peu effrayantes. Quand des centaines de milliers d’émigrés clandestins voguent vers nos rivages, se pose d’abord un problème humanitaire qui, en dépit des difficultés économiques et sociales du moment, ne peut être combattu qu’avec des moyens nouveaux et importants. Il y a longtemps que la commission de Bruxelles aurait dû exiger l’adoption d’un budget européen de crise. Quand on apprend qu’elle a accordé cinq millions d’euros supplémentaires à la France pour que celle-ci s’occupe des clandestins de Calais, on est frappé par la disproportion des moyens. Si nous laissons les migrants dans un état de dénuement total, nous seront les premiers à en souffrir. Leur accorder un minimum de décence et d’hygiène n’est pas un devoir mais une nécessité. Il n’est pas vrai que cela créerait un appel d’air : s’ils arrivent en masse, c’est qu’ils n’ont pas le choix, surtout les Syriens qui ne s’exilent que pour échapper à la mort. Je milite presque tous les jours pour l’équilibre budgétaire, mais je ne vois pas comment nous pourrions éviter d’augmenter les dépenses pour l’accueil des réfugiés, quitte à faire des économies ailleurs.

Soigner le mal à sa racine ?

Je l’ai déjà écrit dans cet espace, je ne crois pas non plus qu’on puisse établir une différence hypocrite entre réfugiés politiques, qui mériteraient toute notre sollicitude, et migrants économiques tout juste bons à être renvoyés dans leur pays d’origine. Ils ne repartiront pas d’eux-mêmes et la seule solution qui nous soit offerte, c’est de les répartir aussi équitablement que possible entre tous les membres de l’Union européenne. L’idée que nous combattrons le phénomène en améliorant les conditions de vie dans les pays d’où ils viennent a déjà 40 ans mais n’a jamais été suivie par les investissements qu’elle implique : par exemple, le taux moyen de développement en Afrique atteint 5 %, mais il est variable ; dans certaines régions africaines, le vie est insupportable. La crise migratoire exige donc la mise en place d’un système d’accueil à forte capacité et d’une administration bien pourvue en fonctionnaires qui examineront tous les cas. Les reconduites à la frontière ne doivent pas être abandonnées après l’épuisement de tous les recours. La possibilité d’empêcher, par la force, le départ d’Afrique ou du Proche-Orient doit être envisagée. Une coordination étroite entre les pays européens et un financement raisonnable sont nécessaires. L’immigration a mis en lumière l’extraordinaire désordre européen, avec une foule de pays qui ne veulent que les avantages de l’intégration et aucun des inconvénients.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Migrants : désordre européen

  1. jean-louis dit :

    Ce qui rend la situation plus inquiétante encore, c’est l’impuissance, et même la bêtise de nos dirigeants politiques actuels. Car tout est alors possible.
    Il y avait la main invisible du marché, maintenant il y a la main invisible de la mondialisation. Ou pour le dire autrement, si mon droit d’habiter chez moi et d’empêcher l’irruption d’étrangers est presque nul, si ça se sait, je ne donne pas cher de ma tranquillité. C’est devenu pareil pour les nations. (surtout européennes) Et ça se sait.
    Il y a un mot magique que les démagogues à gauche et les profiteurs du monde savent employer à tout bout de champ, c’est le mot « droit ». Comme si le droit venait du ciel et ne dépendait de rien d’autre. C’est un droit de « l’HAUME ».
    Enfin, ce qui était voulu par l’Europe pour hâter la désintégration des nations et leur dissolution, va peut-être entraîner une saine réaction des peuples contre cette pétaudière annoncée.

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