Où l’on pense à fraterniser

Raffarin  pactise avec l'adversaire (Photo AFP)

Raffarin pactise avec l’adversaire
(Photo AFP)

Les conséquences des élections régionales sont plus importantes qu’on ne pouvait l’imaginer. Elles agissent sur les partis comme un réveil au clairon. Elles ont créé une atmosphère d’urgence sociale et de nécessité politique : faire barrage au Front national. Elles ont soudainement rapproché la majorité et l’opposition.

CETTE ÉVOLUTION est, de toute évidence, voulue par l’exécutif qui a créé la dynamique en demandant à trois listes socialistes de se retirer des élections régionales. Deux ont accepté et ont assuré ainsi la victoire de la droite dans le Nord et en Paca. Du coup, les gagnants, Xavier Bertrand et Christian Estrosi, ont juré de tenir compte du point de vue de la gauche dans la gestion de leur région. Chez Les Républicains un virage a été amorcé à propos de la stratégie du président, Nicolas Sarkozy. Nathalie Kosciusko-Morizet a montré que, sans le front républicain, la droite aurait perdu les deux régions. M. Sarkozy l’a aussitôt privée de son poste de vice-présidente et a nommé à sa place le très droitier Laurent Wauquiez. Ce qui n’a pas découragé Jean-Pierre Raffarin, centriste convaincu, qui a lancé une proposition de coopération avec la majorité pour la lutte contre le chômage, initiative très vite saluée par Manuel Valls.

Scènes de convivialité.

François Hollande n’espérait peut-être pas obtenir aussi vite les fruits de sa stratégie de rapprochement avec la droite, même si elle a été dénoncée par d’autres LR comme Bruno Le Maire et Éric Ciotti. Les scènes de convivialité se déroulent déjà au grand jour comme aujourd’hui dans le Nord où François Hollande et Xavier Bertrand ont inauguré ensemble, ce matin, un monument commémorant la fraternisation entre soldats français et allemands en novembre 1914. Le président de la République espère affaiblir ainsi Nicolas Sarkozy et faire émerger, au terme de la primaire de la droite, un rival peut-être plus facile à battre. Ce calcul subtil contient pourtant une inconnue : comme nous le rapportions hier, les sondages montrent qu’Alain Juppé est le meilleur candidat de la droite à l’élection présidentielle de 2017. Il est en outre le mieux placé pour faire éliminer M. Hollande au premier tour. Dans ces conditions, ne vaut-il pas mieux que le chef de l’État affronte son adversaire de 2012 ?

Renversement d’alliances.

De toute façon, les jeux ne sont pas faits. Le président est agacé, pour ne pas dire exaspéré, par ses frondeurs, par l’ultra-gauche et par les écologistes. Il est donc logique qu’il songe à un renversement d’alliances, d’autant qu’il n’entend pas du tout changer de cap économique et social. Mais il doit tenir compte de la réaction des Républicains à sa tentative de séduction. Il est certain, par exemple, que François Fillon est insensible au charme de la gauche en dépit de son nouveau maquillage. Quant à Alain Juppé, il ne voudra sans doute pas tomber dans le piège. S’il a l’intention de lancer des réformes d’inspiration centriste, il ne souhaitera pas pour autant apparaître comme un traître à son camp. Prudent dans sa contestation des idées et des attitudes de Nicolas Sarkozy, il le sera encore plus, dorénavant, pour ne pas être accusé de faire le jeu de ces deux Machiavel que sont M. Hollande et M. Valls. Aussi bien la proposition de M. Raffarin ne va-t-elle pas jusqu’au rapprochement de la gauche et de la droite. Elle se borne à une coopération provisoire pour améliorer l’emploi en France. Ce qui est sûr, c’est qu’on n’a jamais vu cela en 56 ans de Vè République.

RICHARD LISCIA
PS- Je m’absente quelques jours. Ceux qui me font l’honneur de me lire retrouveront mon blog le 28 décembre.

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

2 réponses à Où l’on pense à fraterniser

  1. BUYCK dit :

    Bonjour. Je suis médecin du travail, et je pense que pour favoriser la création d’emplois, il faut aider les entreprises en modifiant les règles du CDI. Mais cela pourra entraîner un effet pervers, et créer des salariés « kleenex » : on vous embauche, et quand on n’a plus besoin de vous, on vous largue. Ce concept sera bientôt réalité, là-dessus gauche et droite sont d’accord.

  2. Oj dit :

    Le citoyen ne peut que se féliciter d’une volonté de réflexion commune affichée de certains élus sur des questions essentielles à l’instar de ce que font nos voisins allemands et que préconise depuis quelque temps M. Vedrine l’un des meilleurs anciens ministres de la Vè république.
    Le parcours de M. Juppé peut devenir plus compliqué si M. Hollande se met à chasser sur ses terres. Mais ce dernier se taille une croupière s’il s’éloigne trop de ses frondeurs qui risquent de voir leurs rangs gonfler de mécontents de façon très importante, jusqu’à générer un quadripartisme ou favoriser un peu plus le FN. Où l’on peut penser que ses marges de manœuvre, fût-il un orfèvre en la matière, apparaissent limitées.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.