Mortels débats

Le mandat de Hollande est-il trop long ? (Photo AFP)

Le mandat de Hollande est-il trop long ?
(Photo AFP)

Le fonctionnement de la démocratie exige que chaque groupe donne son avis sur tous les sujets. Ils sont nombreux. La déchéance de nationalité donne lieu à des querelles au sein de la gauche, et maintenant entre la majorité et l’opposition. Les indemnités de chômage dégressives sont proposées (sous forme de ballon d’essai) et dénoncées aussitôt. La prolongation de l’état d’urgence agite tous les esprits.

LE SENTIMENT général qu’inspirent ces multiples joutes verbales, c’est que, en dépit de problèmes sérieux à résoudre immédiatement, la nécessité et l’urgence se perdent dans des discussions interminables qui ne contribuent guère à la réponse à la question posée. On peut même se demander si chaque thème ne va pas faire l’objet d’une exploration minutieuse jusqu’à ce que le calendrier législatif oblige les élus à prendre leurs responsabilités. Malheureusement, la nomenclature des arguments divers et contraires ne fera rien pour éclairer la lanterne de ceux qui seront contraints d’agir, c’est-à-dire de voter.

En parler, ou abandonner le projet ?

Prenez la dégressivité des indemnités chômage. L’idée, c’est d’inciter le chômeur à se dépêcher de trouver un emploi et de ne pas se complaire dans le confort d’une inactivité rémunérée. Laissons de côté ce que les bonnes âmes considèrent comme une double peine infligée aux chômeurs. Il y a mieux: la dégressivité a déjà été appliquée dans le passé (pendant neuf ans), elle n’a pas empêché le chômage de progresser. Si c’est vrai, pourquoi soulever ce lièvre ? Mais quelle leçon a-t-on tirée de l’expérience révolue et qui dit que, dans les conditions actuelles, un peu de rigueur dans la distribution des indemnités ne contraindrait pas certains chômeurs à accepter l’emploi qui leur est proposé ? Poser ces questions, c’est, forcément, prolonger le débat. Dans ces conditions, faut-il abandonner le projet ?
La déchéance de nationalité. La France ne créera pas d’apatrides, le droit international le lui interdit. Elle sera donc appliquée aux auteurs d’actes terroristes, quel que soit leur statut, qu’ils aient la double nationalité ou non. Mais, s’ils ne sont que français, comment les priver de leur unique nationalité ? Les opposants au projet, tous à gauche, ne sont pas satisfaits. La droite, qui était prête à voter la loi, se prononcera contre si elle est modifiée. Finalement, à quoi cette loi servira-t-elle ? L’arsenal pénal n’est-il pas suffisant ? Et si une partie, fût-elle faible, des amendements présentés est adoptée, à quoi la loi ressemblera-t-elle après l’essorage des deux chambres ? On sait bien pourquoi François Hollande y tient tellement. C’est parce qu’il veut envoyer un signal aux électeurs de droite et de l’extrême-droite avant l’élections présidentielle de 2017. Ainsi sont délaissés des champs d’action plus importants au profit d’un déluge d’idées, d’amendements, d’analyses et de contre-analyses qui n’apporteront rien à la résolution des problèmes du pays.

La peur du gendarme.

Faut-il prolonger l’état d’urgence ? Dans ce domaine aussi, on trouve des experts pour nous assurer qu’il ne sert à rien sur le plan de la sécurité et qu’il va nous priver de quelques libertés essentielles, comme celle de ne pas subir une perquisition à trois heures du matin quand on est innocent. À la peur du terrorisme, on tente de substituer la peur du gendarme et, là aussi, il y a des gens infiniment plus intelligents que nous pour le prouver. Imaginons que nous abandonnions l’état d’urgence. Imaginons que quelques jours ou quelques semaines après son abandon, un nouveau crime de masse est commis. Le peuple s’empressera de dénoncer le laxisme de notre représentation nationale, législatif et exécutif confondus. Un président de la République devrait avoir les coudées franches pendant ses cinq années de mandat et, si on est mécontent de lui, il suffit d’en élire un autre. En réalité, le quinquennat est encore trop long pour un président qui a perdu la confiance d’une majorité de Français.

RICHARD LISCIA

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