Une émission ratée

Moins souriant que d'habitude (Photo AFP)

Moins souriant que d’habitude
(Photo AFP)

Je reviendrai lundi, dans le « Quotidien du médecin », sur l’enseignement politique que l’on peut tirer du rendez-vous télévisé, hier, entre François Hollande et l’opinion publique. L’émission a été un échec pour le président de la République qui n’a pu attirer que trois millions et demi de téléspectateurs, soit presque trois fois moins que lors de son dernier rendez-vous télévisé.

CE SCORE donne une idée de la désaffection des Français pour le chef de l’État dont l’impopularité est telle qu’ils lui préfèrent les programmes de fiction. L’émission a pourtant été préparée avec soin par le nouveau directeur de l’information de France-Télévisions, Michel Field. L’événement a eu lieu dans le décor solennel du Musée de l’Homme et pour l’occasion, Lea Salamé, star de « On n’est pas couchés » a été convoquée ; elle a posé quelques questions féroces qui n’ont guère facilité la tâche du président et, en déclarant, après l’une de ses remarques, « C’est une plaisanterie ! », elle a cru exercer les moyens du quatrième pouvoir alors qu’elle s’abandonnait seulement à l’insolence. François Hollande a quelque mérite à ne pas l’avoir remise en place, ce qui montre qu’un président affaibli perd un peu les avantages de sa position. Il a dû ferrailler avec quatre invités choisis dans la société civile, qui ont tous dit ensuite qu’il ne les avait guère convaincus et qui, de toute façon, avaient plus l’intention d’exposer leurs doléances que d’écouter le président. Ce qui pose la question de l’utilité de ce genre d’émission où les effets d’annonce sont pour le moins limités.

Une éloquence confuse.

M. Hollande a néanmoins affirmé que « la France va mieux », sinon bien, propos modeste et cependant très optimiste dans la mesure où le chômage continue de progresser en France. Conformément à sa rhétorique traditionnelle, qui enrobe dans une éloquence confuse le positif et le négatif étroitement mêlés, il a désavoué son Premier ministre en affirmant qu’il n’y aurait pas de loi sur le voile à l’université, cette loi que Manuel Valls avait pourtant annoncée. Enfin, il a déclaré qu’il déciderait à la fin de l’année si oui ou non il serait candidat. Sans doute n’avait-il pas besoin d’organiser un tel raout pour cette seule information. Mais elle a son importance. Elle inscrit une décision essentielle dans le calendrier politique, c’est-à-dire au moment où la primaire de la droite sera achevée et où l’on saura le nom du candidat de l’opposition pour la présidentielle de 2017. Elle montre aussi que M. Hollande n’a que faire de la primaire de la gauche, laquelle devrait elle aussi avoir lieu vers la fin de l’année. Mais il semble que le président de la République ne lie pas du tout son sort personnel au résultat de cette primaire, et qu’il n’y participera guère. Ce qui veut dire que, s’il est candidat, celui que la primaire aura désigné n’aura aucune importance à ses yeux et qu’il se fait fort de le mettre rapidement en minorité ou plutôt hors course.

Une dose de sang-froid.

On ne saurait néanmoins négliger la capacité de M. Hollande à affronter l’adversité avec un certain courage et avec une constance démocratique qui l’honore. Il a répété sans relâche à des interlocuteurs très remontés qu’ils avaient le droit de s’exprimer et, lui, le devoir de répondre à leurs questions, parce qu’il est leur président, même s’ils ne votent pas pour lui. Il a gardé son sang-froid tout au long d’une émission qui a duré une heure et demie, alors que les jugements négatifs, les mauvaises notes, les accusations et les provocations pleuvaient sur lui, comme lors de ces jours de cérémonie où il est resté stoïque sous des trombes d’eau sans réclamer un parapluie. Je crois qu’il a fait le constat immédiat de l’échec de l’émission parce que ses interlocuteurs, journalistes ou invités, n’ont même pas eu pour lui la déférence due à la fonction, sinon à la personne, et que l’ambiance sur le plateau était si lourde qu’on n’en voyait pas la fin. Tout le talent oratoire du monde ne suffit pas à donner une meilleure impression si le bilan est aussi mauvais que le sien.

RICHARD LISCIA

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