En Marche accélère

Philippe ferme avec les régions
(Photo AFP)

La loi anti-terrorisme a été adoptée hier par l’Assemblée nationale avec une large majorité de 415 voix, 127 contre et 19 abstentions. La République en marche, les « constructifs », la nouvelle gauche et l’UDI ont contribué à l’adoption. Le texte va au Sénat et devrait être adopté définitivement au milieu d’octobre, avant la fin de l’état d’urgence à la fin du mois.

LE DEBAT qui a précédé le vote a couvert de sa fureur une réalité simple : le texte convient non seulement aux partisans de M. Macron mais à nombre de députés qui se situent dans des camps pourtant libres de s’opposer. Il ne changera rien aux habitudes du citoyen moyen et transcrit dans la loi la plupart des mesures prises au nom de l’état d’urgence. Ceux qui, à gauche, l’ont décrit comme « liberticide » et ceux qui, à droite, exigeaient le maintien de l’état d’urgence n’ont visiblement pas rallié les élus à leur point de vue. Ce qui permet d’évaluer l’action du gouvernement à l’aune de la majorité qui le soutient, et qui n’est pas mince, et de relativiser les commentaires tonitruants dont le dialogue républicain est constamment émaillé en France. Il ne suffit pas de crier le plus fort et peut-être ceux qui, non sans courage et abnégation, ont décidé de s’engager dans l’opposition systématique devraient-ils aussi s’interroger sur l’utilité de leur comportement quand la gouvernance macronienne s’appuie non pas sur les sondages d’opinion mais sur sa capacité à réunir autant de de suffrages.

Inlassable Macron.

On n’a pas manqué, pourtant, de souligner l’impopularité du président et du Premier ministre ; on a souligné à gros traits quelques incohérences dans leur action ; et il y a toujours dans l’air de Paris, en dehors des particules fines, ce faux climat de catastrophe annoncée bien que nous vivions à l’abri d’un système qui prouve tous les jours sa stabilité. Emmanuel Macron n’est pas Donald Trump et, dans son action réformiste, il semble inlassable. La loi sur la sécurité est à peine adoptée par l’Assemblée qu’elle examine le projet relatif à l’environnement et vote la fin de l’extraction des hydrocarbures en France en 2040. Très vite, les élus s’occuperont du projet de budget pour l’année prochaine qu’il faut inscrire, lui aussi, dans le cadre de la réforme.
M. Macron s’est rendu mardi à Amiens pour y passer deux heures en compagnie des employés de Whirlpool. Il leur avait promis de revenir les voir lorsqu’il était candidat. Sa première visite s’était plutôt mal passée, mais l’entreprise a désormais un repreneur qui sauvera trois quarts des emplois, et le président a trouvé cette fois des oreilles plus attentives. Juste pour dire que l’impopularité liée aux réformes ne sera pas éternelle, surtout si, croissance aidant, le pays atteint sa vitesse de croisière.
Le plus surprenant, c’est que, à part quelques gages donnés aux âmes tendres qui veulent taxer les yachts et les avions privés, le gouvernement ne fait aucune concession susceptible de réorienter les réformes. Edouard Philippe, venu à la Conférence des régions, a annoncé plutôt froidement et sans rhétorique bienveillante, la suppression pure et simple de l’allocation annuelle de 450 millions accordée par François Hollande aux régions. C’était assez brutal, d’autant que cette nouvelle coupe budgétaire s’ajoute à la suppression progressive de la taxe d’habitation, à la diminution du nombre d’emplois aidés (si prisés par les collectivités locales) et autres restrictions qui rendent bien compliquée la gestion des communes et des départements. Philippe Richert, président de la région Grand-Est et de l’Association des régions, a démissionné.

Marine nous rend l’euro.

Le pays ahane sous le poids croissant des changements que le gouvernement lui impose. Mais il n’est pas de réforme qui n’implique des sacrifices. Surtout, on doit réfléchir à l’utilité d’un combat, celui des diverses oppositions, qui est mené avec une éloquence stridente mais avec la faible crédibilité des partis qui ferraillent. Il suffit d’assister à ce spectacle de commedia dell’arte offert par les Républicains, qui ont décidé de limoger Edouard Philippe mais ne savent pas comment le lui dire et ont jugé plus facile d’exclure d’abord Gérald Darmanin, Bruno Le Maire, lui, ayant déjà pris ses distances avec le parti. Lequel souhaite aussi faire un sort aux « constructifs », qui ont pourtant formé leur groupe à l’Assemblée et se moquent bien d’être ou non étiquetés LR. LR est en si grande forme qu’il n’a qu’un candidat à la présidence du mouvement : c’est Laurent Wauquiez, qu’aucun autre poids-lourd (Valérie Pécresse ou Xavier Bertrand) ne souhaite concurrencer. On méditera aussi sur l’état des Insoumis réduits au concert des casseroles chiliennes, comme s’il pouvait noyer le programme de M. Macron dans les décibels. Ou celui du Front national, qui vient de perdre son numéro deux et qui croit qu’il va devenir un parti de gouvernement parce qu’il décidera, un jour, on ne sait pas quand, de renoncer à la sortie de la France de l’euro. Il est normal d’adresser des reproches à un gouvernement qui bouge. Mais les tranchées d’où partent les coups sont bien vulnérables.

RICHARD LISCIA

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