Les ennuis de Darmanin

Gérald Darmanin
(Photo AFP)

Ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin fait l’objet d’une enquête ouverte par le parquet de Paris au sujet d’une accusation de viol. Déjà, l’an dernier, la première plainte déposée par Sophie Spatz, à propos d’une affaire qui remonte à 2009, avait été classée sans suite.

LE GOUVERNEMENT  a exprimé à plusieurs reprises sa solidarité avec M. Darmanin et a souligné l’importance de la présomption d’innocence. Il a aussi rappelé que la règle veut qu’un ministre ne démissionne pas tant qu’il n’a pas été mis en examen. François Bayrou, Sylvie Goulard et Marielle de Sarnez, membres du premier gouvernement Philippe, ont pourtant quitté leurs fonctions à la suite de l’ouverture d’une enquête sur les dépenses des élus européens du MoDem et, à ce jour, ils n’ont pas été mis en examen. Il est vrai que Mme Goulard avait d’emblée demandé à démissionner de son poste de ministre de la Défense. Il avait fallu quelques jours pour que M. Bayrou se décide à quitter ses fonctions de ministre de la Justice. Le cas de Richard Ferrand, soupçonné de conflits d’intérêts, est encore plus compliqué. Il a démissionné de son poste de ministre de la Cohésion des territoires, puis il a fait l’objet d’un non lieu, ce qui lui a permis de prendre la présidence du groupe la République en marche à l’Assemblée, mais la justice a jugé nécessaire de rouvrir l’enquête le concernant, comme dans le cas de M. Darmanin.

Volonté de nuire.

Cela fait beaucoup de démêlés judiciaires pour plusieurs personnalités de la majorité. Il demeure que les accusations ne sont pas prouvées, alors que la présomption d’innocence n’empêche pas le public de jaser et de juger peut-être qu’il n’y a pas de fumée sans feu. La réaction mondiale des féministes aux révélations sur le harcèlement et l’agression sexuels explique-t-elle l’acharnement de Mme Spatz contre M. Darmanin ? La justice n’en est qu’au stade préliminaire de l’enquête, qui prendra donc beaucoup de temps et risque de gêner sérieusement son action au gouvernement. Les médias n’ont pas donné aux accusations contre M. Darmanin un écho excessif. Le jeune ministre n’a que 35 ans, et n’en avait que 26 (il était alors à l’UMP) quand se seraient déroulés les faits qui lui sont reprochés. Il a déposé une plainte en diffamation contre son accusatrice et il ne voit dans son attitude qu’une volonté de lui nuire.

La majorité embarrassée.

Les circonstances dans lesquelles Mme Spatz a rencontré M. Darmanin sont bizarres. Ex-call girl, elle souhaitait qu’il l’aide à effacer son passé et il y aurait consenti, selon elle, en échange de ses faveurs. Il sera très difficile à la justice de prouver qu’il y a eu viol et tout aussi difficile de dire que le jeune conseiller de l’UMP et Mme Spatz ont eu une relation. Le problème, pour le ministre, c’est qu’il ne peut pas échapper à une enquête qui se poursuivra encore longtemps et entravera son activité politique. Déjà, une porte-parole de LR, Lydia Guirous, a lancé contre lui  une charge tout à fait disproportionnée, en soulignant la gravité des faits et en voyant dans l’affaire la preuve que la République en marche n’est pas le monde transparent qu’elle prétend être . L’opposition de droite voudrait politiser l’affaire sans se soucier des faits et uniquement pour affaiblir la majorité qu’elle ne s’y prendrait pas autrement. Ce n’est pas glorieux de se battre sur ce terrain mouvant et il est même curieux que des responsables politiques ne craignent pas de révéler par leurs propos combatifs leur vraie motivation, c’est-à-dire la vengeance. Car M. Darmanin vient de LR, dont certains membres l’ont accusé de trahison parce qu’il avait franchi la ligne séparant la droite de la République en marche. On ferait bien de respecter la présomption d’innocence, mais il ne faut pas espérer un changement dans les moeurs politiques françaises. Elles restent cruelles, pour ne pas dire révoltantes.

RICHARD LISCIA

 

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

3 réponses à Les ennuis de Darmanin

  1. Michel de Guibert dit :

    « Ex-call girl, elle souhaitait qu’il l’aide à effacer son passé et il y aurait consenti, selon elle, en échange de ses faveurs »…
    En fait, c’est moins l’affaire d’un supposé viol qui est le scandale, mais le fait d’avoir proposé une relation sexuelle en échange d’une intervention auprès de la garde des Sceaux de l’époque, Michèle Alliot-Marie, pour faire effacer, non pas « son passé », mais une condamnation pour « chantage, appels malveillants et menace de crime » de son casier judiciaire.

    Réponse
    Nous n’en savons rien. Pourquoi la première enquête a-t-elle été classée sans suite et pourquoi une deuxième enquête a-t- été lancée ? Rien n’est clair dans cette affaire et, pour ma part, je me garderai bien de juger avant la justice.
    R.L.

  2. JB7 dit :

    Merci, pour cette excellente analyse !
    Le soir même (ou le lendemain), pendant que je faisais ma comptabilité tout en écoutant les infos, certains députés LR dézinguaient leur ancien collègue de façon ignoble. Heureusement, d’autres anciens collègues rappelaient qu’il avait droit à la présomption d’innocence, tant que l’affaire n’était pas jugée. Il est bon que des élus aient le courage de faire un rappel de la loi, devant les caméras de télévision.

  3. Anath dit :

    Il est un principe dans le droit français selon lequel une personne suspectée d’infraction est considérée comme innocente tant que sa responsabilité n’est pas légalement prouvée. Peut-être serait-il sage que certaines et certains s’en souviennent et laissent la justice faire son travail avant d’en appeler au départ d’un ministre du gouvernement.
    Pour rappel, une enquête est automatiquement ouverte en cas de plainte pour viol. Cela signifie que si quelqu’un accuse une personne de viol, quels que soient les faits, cette personne sera visée par une enquête.
    Si le combat contre le harcèlement et les violences sexuelles est important, nécessaire, médias et réseaux sociaux ne doivent pas avoir vocation à devenir des tribunaux ou des places de lynchage public modernes. Seule la justice est à même d’établir l’innocence ou la culpabilité de M. Darmanin.
    C’est pourquoi, sauf en cas de mise en examen, il ne doit pas quitter le gouvernement.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.