Trump défie la Russie

Poutine et Trump
(Photo AFP)

Le président Donald Trump a annoncé sa décision de dénoncer le traité INF (Forces nucléaires intermédiaires), qui a été conclu entre Ronald Reagan et Mikhaïl Gorbatchev en 1987. À l’époque, le traité avait été salué comme une contribution considérable à la détente Est-Ouest. Aujourd’hui, on craint une reprise de la course aux armements.

LE CONSEILLER de M. Trump pour la sécurité nationale, John Bolton, est aujourd’hui au Kremlin pour expliquer à Vladimir Poutine pourquoi les États-Unis abandonnent le traité. Connu pour ses attitudes très hostiles à la Russie, M. Bolton, qui a sans doute largement influencé M. Trump dans cette affaire, reproche principalement à Moscou de ne pas respecter le traité. Ce qui veut dire que les Russes sont en train d’installer des missiles nucléaires d’une portée comprise entre 500 et 5 500 kilomètres à la frontière des pays est-européens de l’OTAN. Le gouvernement russe ne nie pas la présence de ces missiles, mais affirme qu’elle respecte le traité. De leur côté, les États-Unis n’ont pas caché qu’ils souhaitaient fabriquer des missiles nucléaires à portée courte et moyenne pour faire pièce aux tentatives de la Russie, mais aussi de la Chine, d’acquérir une supériorité en la matière. Quant aux Européens, ils n’ont jamais fait mention d’un désir quelconque d’accueillir ces missiles sur leur sol (à part la Pologne), et ils espéraient mettre au point avec les États-Unis un plan commun qui aurait permis de négocier avec la Russie pour qu’elle abandonne sa tentative de déstabilisation.

Retour à la guerre froide.

Bien entendu, la décision américaine signe le retour à la guerre froide. Il n’est pas impossible que M. Trump ait seulement  abattu une carte pour négocier avec Moscou à partir d’une position de force ; mais, une fois de plus, comme pour toutes ses orientations diplomatiques, il a totalement ignoré ses alliés de l’OTAN, qui pourront manifester leur mauvaise humeur en refusant d’installer les nouveaux missiles sur leur territoire. Sous l’influence de Bolton, et peut-être de Mike Pompeo, le secrétaire d’État (affaires étrangères), M. Trump prend une option inquiétante : celle qui consisterait à retirer les États-Unis de tous les traités nucléaires avec la Russie et d’installer un rapport de forces entièrement fondé sur les armes, étant entendu que les Russes ne pourront pas lutter d’égal à égal dans une course aux armements : les budgets de la défense sont d’une soixantaine de milliards de dollars en Russie et de plus de 700 milliards aux Etats-Unis. Il faut se souvenir que le plan « Guerre des étoiles », adopté par Ronald Reagan, avait relancé la course aux armements entre Washington et Moscou. Epuisés par des dépenses militaires insoutenables, les Russes ont été contraints de conclure le traité INF. La suprématie militaire, à la fois conventionnelle et nucléaire, acquise par les Américains a participé à l’effondrement du bloc soviétique.

Dans la foulée de Reagan.

La position adoptée par Trump consiste donc à lancer à Poutine un défi très comparable à celui de Reagan à l’URSS, dont le régime était, dans les années quatre-vingt, très affaibli par une crise économique de longue durée. Il ne fait pas de doute que le maître du Kremlin, dont les forces militaires narguent celles de l’OTAN dans des manœuvres dangereuses et s’organisent comme si elles préparaient une guerre, cherche non pas à dominer l’Amérique, mais à la séparer de l’Union européenne, elle-même susceptible d’être vulnérable aux opérations de déstabilisation dont la Russie a donné un exemple avec son ingérence dans les élections américaines de 2017. Il est vrai que Donald Trump contribue énormément, par ses politiques diverses, à une séparation entre son pays et ses principaux alliés.  De facto, la guerre froide, lentement mais sûrement, était instaurée avant la décision de Trump, qui, lui-même, n’adresse ses reproches aux Russes que parce qu’il veut retrouver sa liberté d’établir avec la Russie et la Chine un nouveau rapport de forces. Cette stratégie est dangereuse dans un monde où les conflits régionaux n’ont jamais nui, jusqu’à présent, à l’équilibre Est-Ouest. Ce qui a été souligné par tous les géopoliticiens : l’équilibre de la terreur a permis d’éviter une troisième guerre mondiale. Il y avait sûrement une approche du problème plus sage et moins spectaculaire, mais ça, ce n’est pas le style de Trump.

RICHARD LISCIA

 

 

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Une réponse à Trump défie la Russie

  1. Michel de Guibert dit :

    Trump montre une nouvelle fois qu’il est un dangereux irresponsable en remettant en cause la signature des USA dans des traités internationaux, ce traité INF avec Moscou après l’accord sur le nucléaire iranien.
    La Russie d’aujourd’hui n’est pas l’URSS d’hier et l’Iran d’aujourd’hui n’est pas non plus l’Iran de Khomeini.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.